Procès Pistorius : la juge ne retient pas le meurtre

La juge ne retient pas le meurtre. Le champion handisport Oscar Pistorius, qui comparaît pour la mort de sa petite amie en 2013, peut néanmoins toujours être reconnu coupable d'homicide involontaire, ou acquitté.

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Il ne l'a pas tuée intentionnellement : le champion paralympique Oscar Pistorius, qui risquait la perpétuité pour la mort de sa petite amie en 2013, a échappé le 11 septembre 2014 à une condamnation pour meurtre, même s'il risque encore la prison pour « usage excessif de la force ». Thokozile Masipa, la juge de Pretoria devant laquelle la star sud-africaine comparaît depuis le 3 mars, a ainsi ouvert la voie à une possible condamnation pour homicide involontaire, avant de renvoyer l'audience au lendemain. « Je suis d'avis que l'accusé a agi trop vite et fait un usage excessif de la force. Dans ces circonstances, il est clair qu'il a fait preuve de négligence », a-t-elle déclaré, estimant que l'athlète aurait pu se précipiter sur son balcon pour appeler à l'aide quand il s'est cru attaqué par un cambrioleur. « Il y avait d'autres moyens de réagir à ce qu'il percevait être une menace pour sa vie », a-t-elle dit.

La peine de prison dans 3 ou 4 semaines

La peine de prison éventuelle ne sera pas prononcée en même temps que le verdict mais séparément, dans trois ou quatre semaines, à l'issue d'un autre mini-procès où la défense pourra plaider des circonstances atténuantes. Avant même que la juge Masipa ne termine la lecture de ses attendus, les premières critiques ont commencé à pleuvoir en Afrique du Sud pour reprocher à la magistrate d'avoir écarté non seulement la thèse de la préméditation mais, plus largement, toute condamnation pour meurtre. L'option d'un acquittement n'est pas complètement écartée. « Je suis choqué », a déclaré à l'AFP le pénaliste Martin Hood.

Le bénéfice du doute

« Ça pourrait vraiment ouvrir la porte à des abus systématiques de notre système judiciaire par des gens qui abattraient leur conjoint et plaideraient la légitime défense. » James Grant, professeur de droit pénal à l'université Wits de Johannesburg, a souligné que le parquet pourrait faire appel s'il estime que la juge a fait une erreur de droit. Thokozile Masipa a longuement expliqué pourquoi elle était légalement obligée de laisser le bénéfice du doute au sportif de 27 ans, dont la carrière s'est arrêtée avec le meurtre. Il clame depuis le début avoir fait une erreur en tirant quatre balles sur la porte des toilettes de sa chambre, croyant à l'intrusion d'un cambrioleur. A la barre, il a même affirmé n'avoir jamais eu l'intention de tuer quiconque.

Mémoire humaine « faillible »

« Le parquet n'a pas démontré au-delà du doute raisonnable que l'accusé était coupable de meurtre avec préméditation », a déclaré la magistrate, estimant également que Pistorius, malgré les faiblesses de son témoignage, avait des raisons de croire sa vie menacée. « L'accusé ne peut donc pas être coupable de meurtre », a-t-elle dit. Pour en arriver à cette conclusion, elle a écarté les témoignages clés de l'accusation. Elle n'a pas contesté leur honnêteté mais elle a estimé qu'il ne serait « pas sage » de s'appuyer sur des souvenirs fragilisés par le caractère « faillible » de la mémoire humaine et brouillés par l'intense battage médiatique autour du procès. Plusieurs voisins avaient témoigné durant le procès des coups de feu et des cris entendus la nuit du drame, mais la juge a tout rejeté en bloc.

Un accusé larmoyant

Assis dans le box des accusés, l'athlète handicapé est apparu la plupart du temps figé, le regard fixe, refoulant ses larmes sans toujours y parvenir. L'accusé et sa victime Reeva Steenkamp se fréquentaient depuis trois mois au moment du drame. L'accusation a soutenu qu'ils se sont disputés alors qu'elle était venue passer la nuit chez lui pour la Saint-Valentin 2013. Oscar Pistorius a été un motif de gloire nationale pendant des années en Afrique du Sud, alliant le glamour d'un sourire de play-boy à une irrésistible réussite sportive perçue comme une revanche pour un jeune homme que ses parents, lorsqu'il avait 11 mois, ont dû faire amputer des pieds et équiper de prothèses. Il avait atteint la célébrité mondiale aux Jeux Olympiques de Londres de 2012, en s'alignant au côté des coureurs valides.

Durant les six mois de procès, où il est défendu par une coûteuse équipe d'avocats très expérimentés, il s'est effondré à plusieurs reprises, pleurant, vomissant, se contredisant, mais toujours soutenu par ses proches, sa sœur Aimée et son frère Carl, présent jeudi malgré un récent accident de voiture.

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