Jean-Noël, 40 ans, père d'enfants

Jean-Noël Lucas, 40 ans, a laissé sa femme Isabelle, également aveugle, seule avec leurs deux enfants

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Par Samir TOUNSI PARIS, 9 oct 2004 (AFP) - Jean-Noël Lucas, 40 ans, a laissé sa femme Isabelle, également aveugle, seule avec leurs deux enfants "voyants", pour quêter sur la voie publique à Paris, avec son chien-guide Lad, samedi et dimanche, 'journées nationales des associations d'aveugles et de mal-voyants'. Parents aveugles, enfants voyants ? "Tout est naturel. On ne leur demande pas de faire des choses à notre place", sourit le père de Guillaume, 5 ans, et Justine, 21 mois, pendant une pause-café, avant de repartir devant le bureau de poste de la rue de Rennes et ses commerces bondés le samedi. "Guillaume a tendance à me prendre le doigt pour me faire toucher ses dessins en me disant: papa, là, c'est un éléphant. On joue le jeu", ajoute Jean-Noël, qui a perdu la vue à l'âge de 18 ans. Pour les histoires du soir, les parents s'arrangent avec quelques notes en braille sur les livres des enfants et une bonne dose d'imagination. "Il y a des bouquins pour enfants aveugles et parents voyants", souligne-t-il. Mais ll'inverse est rare. Les petits bobos ne leur échappent pas: "Aujourd'hui ma petite fille a de la fièvre. Ca se voit: elle est nerveuse, elle veut descendre quand on la prend dans les bras. Pour les boutons sur la peau, on s'en rend compte par le toucher", ajoute-t-il. Leur cas ne doit pas être si rare puisqu'un service de Protection maternelle et infantile (PMI) de Paris organise des réunions pour des mères aveugles, affirme-t-il. "Elle me répond en regardant à côté" Une vie parentale quasi-normale, donc. Mais le regard des voyants "n'a pas changé: il y a encore du travail", affirme Jean-Noël. Il cite une expérience récente lors d'une hospitalisation de son fils, qui a des problèmes de mobilité des jambes: "Je pose une question à l'infirmière. Elle me répond en regardant... une personne voyante à côté de moi". En plus de collecter des fonds, les 14 associations à l'origine des deux journées veulent aussi sensibiliser l'opinion, en insistant sur "le long chemin à parcourir pour garantir une vie digne à plus d'un million de nos concitoyens". "S'il y a autant d'associations, c'est qu'il y a un malaise. Si on arrivait vraiment à s'adapter, il n'y en aurait pas autant", reconnaît Jean-Noël, amateur de tir à l'arc, standardiste à mi-temps au journal l'Etudiant. Un exemple ? "Ma femme était analyste-programmatrice. Elle faisait de la maintenance informatique. Avec son handicap, elle mettait plus de temps que les autres. On lui a mis la pression. Elle a craqué. Elle est partie. Maintenant elle s'occupe des enfants", raconte-t-il. "Une personnes mal-voyante qui veut partir en week-end n'a souvent pas de guide. On ne les trouve pas gratuitement. Le but de l'association, c'est aussi d'amortir ces frais-là", poursuit l'adhérent actif de "Voir ensemble", l'une des organisations qui font cause commune autour des quelque 1,2 million d'aveugles ou de mal-voyants. st/dg/reb [BI]Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© (2003) Agence France-Press.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par l'AFP. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, modifiée, rediffusée, traduite, exploitée commercialement ou réutilisée de quelque manière que ce soit sans l'accord préalable écrit de l'AFP. L'AFP ne pourra être tenue pour responsable des délais, erreurs, omissions qui ne peuvent être exclus, ni des conséquences des actions ou transactions effectuées sur la base de ces informations. ".[EI]
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