Témoignage: Une maman prête à tout

Nicole Fumeron vient de l'annoncer : à partir du 11 mai, cette mère de 61 ans entame une grève de la faim pour dénoncer l'injustice faite à son fils de 42 ans, malentendant. Pas de travail malgré ses diplômes !

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Le 11 mai prochain, elle garera sa voiture sur le trottoir, face à la préfecture de la Vienne, à Poitiers. Une banderole, une table de camping, les bulletins scolaires de son fils, une photo de lui et un livre d'or. Pas de matelas, elle préfère dormir dans sa voiture, question de sécurité. Et puis elle cessera de manger. Tout le monde est prévenu, y compris monsieur Sarkozy... Les services de la préfecture ont bien tenté de l'en dissuader : plus d'une heure au téléphone pour lui faire entendre raison et renouveler quelques promesses... Ah, les promesses !

Enfin un diagnostique !
Elle, c'est Nicole Fumeron, 61 ans, professeur retraité. En colère mais pas résignée. Une maman prête à tout qui, à travers cette action, entend défendre les intérêts de son fils. Il s'appelle Boris, il a 42 ans. Boris est malentendant. Une histoire singulière, qui commence six mois après sa naissance. Le nouveau né pleure jour et nuit. Le psy pose un « vrai » diagnostique : « Il a quelque chose mais je ne sais pas quoi ! ». A trois ans, toujours rien. Boris est étiqueté « débile ». C'est une religieuse qui finit par trouver la solution : Boris est malentendant. Tout simplement ! Il fait des otites séreuses à répétition, particulièrement douloureuses, ce qui justifie ses pleurs. Tout s'explique car, l'ouïe étant source de l'équilibre, Boris présente également un retard psychomoteur. Il ne sait pas faire du vélo, pas monter sur une échelle.

Malentendant, malentendus... La vie de Boris, c'est ça : une succession d'incompréhension, d'injustices, d'errances et de galères. Handicapé mais pas trop, incasable, ballotté de formations en préparations. Le « paysagiste » doit renoncer à cause des bruits de moteurs. L'élève en CAP comptabilité excelle à l'écrit mais perd pied à l'oral. L'étudiant en capacité en droit obtient une mention mais sans pour autant trouver d'emploi. Boris surprend par son courage et sa pugnacité mais, dans le milieu de travail, ca ne paye pas

Sa tête explose !

Il a la « chance » de pouvoir bénéficier d'une greffe de tympan à l'âge de 29 ans. Quelle chance ? En découvrant les bruits, sa tête manque d'exploser. On ne l'avait même pas prévenu. Ces effets secondaires sont si perturbants qu'il fait une tentative de suicide. Handicapé, déprimé, fou... Mais qu'est ce qu'il a Boris ? Les psys se repenchent sur son cas : « Ce n'est pas une maladie mentale, c'est la maladie du travail ! ». A 29 ans, il n'a jamais eu d'emploi. « Une fois, alors qu'il voyait un couple s'embrasser, confie Nicole, il m'a dit : « Maintenant que je vais avoir du travail, je vais pouvoir trouver une femme. » Tout son équilibre tourne autour de sa vie professionnelle. Il m'en parle vingt fois par jour. Et ce n'est pas seulement une question financière, car nous pouvons l'aider dans ce domaine, mais davantage une affaire d'épanouissement personnel, de reconnaissance. »

En 2007, il finit par obtenir son BEP comptabilité et s'offre, à ses frais, de nombreuses formations en informatique. Mais rien n'y fait. « Il ne rentre dans aucune case. Pas vraiment handicapé, mais toujours avec cette étiquette. Il a vraiment fait mille démarches, dans toute la région. Et, à son âge, on lui reproche maintenant son manque d'expérience professionnelle (il n'a travaillé que deux ans au total). C'est le serpent qui se mord la queue. Alors, il doit se contenter du RMI. »

Danger vital ?
Nicole s'implique pour son fils... et pour tous les autres : « Ils sont nombreux en France à être dans son cas. Il faut, qu'au-delà des discours, chacun ait vraiment sa chance. J'ai l'impression que les travailleurs dits « handicapés » doivent produire davantage pour faire leurs preuves. » Alors, et les promesses ? « Je suis déterminée et si on ne lui propose rien de définitif avant le 11 mai, j'irai au bout de ma démarche. J'ai reçu une première réponse de l'Elysée qui me certifie qu'elle s'occupe de notre affaire. Aujourd'hui, plus rien ne me fait de peine alors je suis vraiment déterminée à aller jusqu'au bout, même si cela doit me conduire à l'hôpital. » Son médecin la soutient. Avec de l'eau sucrée-salée et quelques vitamines, Nicole peut tenir le coup. Elle emporte son tensiomètres, au cas où... « Mes amis m'ont promis d'être présents pour renforcer mon action. J'ai quelques détracteurs mais je m'en fous. Ca fait 42 ans que je lutte, alors je ne suis plus à ca près ! » Et Boris dans tout çà, il en pense quoi ? « Il ne sera pas présent. Il a une si mauvaise estime de lui qu'il ne se sent pas capable de se mettre sur le devant de la scène... »

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