Fibromyalgie: on la connaît mal, pourtant elle fait très mal

Jouer avec ses enfants, monter les marches... Pour certains patients fibromyalgiques, ces actes anodins sont insurmontables. Des marches, il en reste à gravir pour obtenir la reconnaissance de cette maladie chronique. Alors ils montent au créneau.

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« Pour vous, ce ne sont quelques marches qui mènent à l'étage. Pour moi, c'est une montagne à gravir », « Pour vous, c'est une rue à traverser. Pour moi, c'est un voyage dangereux, épuisant. La fibromyalgie, on la connaît mal, pourtant elle fait très mal », interpelle la nouvelle campagne de sensibilisation lancée par la Société française d'étude et de traitement de la douleur (SFETD) et Fibromyalgie France. Ce syndrome douloureux chronique altère la qualité de vie socioprofessionnelle d'environ 1,6 million de Français, principalement des femmes, à bout. Lassés de souffrir en silence, ils haussent le ton le 12 mai 2021, à l'occasion de la Journée mondiale dédiée et fixent quatre objectifs majeurs : améliorer la connaissance et la prise en charge de la maladie, renforcer le diagnostic et mobiliser la recherche. Première étape ? Obtenir une reconnaissance médicale et institutionnelle de la « fibro ».

Fibromyalgie, quèsaco ?

La fibromyalgie, c'est... « La mort de mes envies », « La révolte du corps », « Un sourire à l'envers », « Elle travestit mon âme », témoignent des patients. Ce n'est pas... « Une maladie rare et orpheline », « une maladie imaginaire ». En raison d'un manque de connaissances, la Direction générale de la santé (DGS) a sollicité la SFETD et Fibromyalgie France pour mettre en place un collectif d'experts ; ils auront pour mission de travailler sur une action d'information à destination du public et des professionnels de santé afin d'apporter des réponses concrètes aux personnes touchées. Le fruit de leur travail ? Un kit pédagogique permettant aux médecins généralistes de mieux comprendre et diagnostiquer la fibro et un film de sensibilisation, réalisé par l'agence Madame Bovary (vidéo ci-contre). Jouer au foot avec ses enfants, porter un sac de courses, traverser la rue... Quand l'anodin devient insurmontable.

Des médecins négligents ou désarmés ?

« La fatigue me colle à la peau, même si je dors », témoigne, de son côté, Carole Robert, présidente de Fibromyalgie France. Troubles du sommeil, cognitifs (problèmes de concentration, d'attention, de mémoire), douleurs abdominales, maux de tête, symptômes anxio-dépressifs... La fibromyalgie est une « pathologie de l'ensemble du corps », constate Françoise Laroche, rhumatologue. « Tu crois toujours que je m'écoute trop ? Viens dans mon corps pour entendre ce qu'il dit », rétorquent certains patients aux médecins « négligents ». « Le syndrome fibromyalgique fait partie de ceux qui marquent l'échec de la médecine toute puissante malgré les progrès spectaculaires de celle-ci. Les praticiens indiquent se sentir désarmés, et les patients sont souvent dans un nomadisme médical », déplore Florence Tiberghien, médecin de la douleur au centre hospitalier Alpes-Léman, en Haute-Savoie. En conséquence : une errance diagnostique parfois dévastatrice, aussi bien sur le plan de la santé physique que mentale.

La solution, un autodiagnostic ?

En 2010, un auto-questionnaire, intitulé « First » (Fibromyalgia rapid screening tool, soit outil de dépistage rapide de la fibromyalgie), a été mis en place, qui présente six facteurs : douleurs localisées partout dans le corps, comparables à des brûlures, des décharges électriques ou des crampes ou d'autres sensations anormales telles que des fourmillements, engourdissements, picotements, s'accompagnant d'une fatigue générale permanente et d'autres problèmes de santé (digestifs, urinaires...), ayant un retentissement important (en particulier sur mon sommeil, ma capacité à me concentrer, avec une impression de fonctionner au ralenti). Cinq réponses positives sur six permettent de dépister une fibromyalgie. Depuis 2016, le diagnostic est posé chez des patients ayant des douleurs diffuses depuis plus de trois mois, touchant au moins quatre régions du corps sur cinq (supérieure droite, supérieure gauche, inférieure droite, inférieure gauche et axiale).

Prise en charge psychologique à ne pas négliger

Divorce, chirurgie, accident, burn out... Souvent, après un évènement traumatique, « le corps s'arrête, dit stop », explique Florence Tiberghien. C'est pourquoi, « dans le syndrome fibromyalgique, il convient d'écouter la parole du patient, son histoire de vie. Les récits retrouvent souvent une enfance 'catastrophe' puis une période paradisiaque hyperactive, une bonne adaptation. Puis un évènement survient et tout bascule souvent brutalement avec l'apparition de ces douleurs ». Une approche multimodale est alors nécessaire, selon elle, pour une prise en charge efficiente sur le long terme. L'enjeu est d'accompagner le patient pour mettre en place des stratégies d'ajustement lui permettant de limiter l'impact de la maladie. Plusieurs recommandations ont ainsi été émises : les traitements non médicamenteux sont essentiels, et principalement l'activité physique adaptée, l'accompagnement psychologique est fortement encouragé, les corticoïdes et les opioïdes ne sont pas recommandés. « J'ai moins mal depuis que j'ai suivi le parcours : rhumatologue, neurologue, algologue... Cette prise en charge par une équipe pluridisciplinaire n'a peut-être pas permis une réelle amélioration de mon état douloureux chronique mais sa stabilisation, ce qui n'est déjà pas si mal. J'ai appris à vivre avec », conclut une patiente.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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