Pass sanitaire en psychiatrie : la profession s'inquiète!

Vive inquiétude du monde de la psychiatrie face à la nécessité de présenter un pass sanitaire pour accéder aux lieux de soin. Elle réclame une dérogation pour les patients avec un handicap psychique, jugés plus vulnérables et démunis.

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Le pass sanitaire pourrait devenir obligatoire dès le 9 août 2021 pour les patients non urgents ayant des soins programmés dans les hôpitaux et lieux de soins ou les visiteurs dans les établissements de santé et maisons de retraite. Adopté par le Parlement le 25 juillet pour faire face à la pandémie, le mot de la fin reviendra au Conseil constitutionnel. Verdict le 5 août. En attendant, l'Ordre des médecins s'inquiète « vivement des conditions de cette mise en œuvre (…) qui ne doit pas priver des patients de soins ». Même son de cloche dans le champ de la psychiatrie, qui a mis en place des « gestes barrière et l'éducation à la santé bien rôdés depuis le début de la pandémie » et se dit en mesure de continuer à les faire respecter, redoutant l'effet delétère du pass sur ses patients.

La psychiatrie en alerte

Le 30 juillet 2021, dans une lettre ouverte, la Fédération française de psychiatrie, soutenue par des associations et syndicats, fait part de ses inquiétudes au Premier ministre : « Les malades sans pass sanitaire bannis des soins ». Cette obligation concernera en effet également les centres médico-psychologiques, qui accueillent des personnes avec des troubles psychiques ou mentaux. « Avec le pass sanitaire, deux principes constitutionnels sont honteusement bafoués : la liberté d'aller et venir à l'hôpital et la protection de la santé en désirant se faire soigner », font valoir les signataires. Ils jugent ce positionnement « déontologiquement et éthiquement inacceptable pour des soignants », qui pourraient, en outre, « être accusés d'un défaut de soins ». Cette contrainte est « rejetée par la majorité des psychiatres et soignants (…), d'autant plus que le besoin en santé mentale et les troubles mentaux se sont accentués avec la pandémie, notamment chez les jeunes ».

Un accompagnement pédagogique

Accepter la demande de soin sans restriction permettrait, selon les associations, « un accompagnement pédagogique pour prodiguer une information claire et adaptée afin d'apaiser les angoisses sur la vaccination » d'un public particulièrement « vulnérable ». Souvent isolées, la capacité à prendre des décisions des personnes avec des troubles psychiatriques peut en effet être altérée et compliquer l'accès au vaccin (article en lien ci-dessous), alors même que, pour de multiples raisons, elles présenteraient des risques accrus de formes sévères de Covid-19 et de mortalité (article en lien ci-dessous). 

Savoir se servir d'un smartphone

Par ailleurs, elle rappelle que certains patients, au regard de leurs troubles cognitifs, se trouvent parfois « démunis » pour, tout simplement, « présenter un pass sanitaire que ce soit en format papier ou numérique ». « Tous n'ont pas ou ne savent pas se servir d'un smartphone ou peuvent oublier de le porter sur eux pour se rendre à la consultation », précisent les associations qui rappellent au gouvernement que « la fracture numérique existe et que l'accès aux soins n'est pas égalitaire parmi la population ». Les signataires se disent profondément hostiles à ce « tri », redoutant par ailleurs qu'il ne génère des « tensions » avec les patients mais aussi au sein du personnel, entre anti et pro, qui pourraient « dégénérer en conflits sociaux ». La lettre ouverte évoque également les personnes détenues présentant des troubles psychiatriques et somatiques dans les unités sanitaires en milieu carcéral, interrogeant sur la « lisibilité de la campagne de vaccination dans les prisons ».

Selon la profession, « cette obligation peut amener à de nouveaux retards dans les prises en charge ». Plutôt que d'éloigner des patients des services de soin, elle encourage à « favoriser les accompagnements vers les lieux de vaccination pour les patients les plus démunis sur le plan psychologique ». 

Une exception pour les soins palliatifs ?

De son côté, la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) se fend également d'un communiqué, réclamant le « maintien du lien dans les services de soins palliatifs ». Déjà au début de l'épidémie, les visites aux patients en fin de vie ont été soumises à des « restrictions drastiques ». Elle redoute que « l'obligation de présenter le pass sanitaire », qu'elle juge « légitime par ailleurs dans un souci de protection de tous et particulièrement des plus fragiles », ne « vienne de nouveau empêcher la présence des proches ». La Sfap réclame donc une exception pour ce public.

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