Emploi & Handicap: Management (partie 1)

Je découvre que mon collaborateur est en situation de handicap à son poste de travail ou qu'il va revenir dans mon équipe après un accident du travail ou qu'il est devenu handicapé.

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Avant tout, il est essentiel que je sois convaincu que je ne suis pas tout seul.

Les possibilités sont les suivantes :
- Formation à l'intégration d'un salarié travailleur handicapé dans mon équipe
- Sensibilisation du reste de mon équipe à l'intégration d'un salarié handicapé
- Prise en charge budgétaire d'éventuels aménagements par la Direction, ou la cellule handicap de mon entreprise (sachant que moins de 20% des personnes en situation de handicap ont besoin d'un aménagement de leur poste de travail)
- Mise en place du tutorat du salarié handicapé par une autre personne de mon équipe.

ET que je sois convaincu des enjeux pour mon équipe :
- Un salarié handicapé est un salarié compétent comme les autres
- Un salarié handicapé est très souvent un salarié motivé, et motivant (diminution de la « bobologie » ...)
- Il participe à l'enrichissement de mon équipe (apport de créativité, d'adaptabilité, développement d'une meilleure communication, d'un esprit d'équipe...)
- Il permet à mon équipe de participer à la politique globale de mon entreprise en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés.

Plus spécifiquement, lors de l'embauche d'un salarié handicapé dans mon équipe, j'ai travaillé avec l'équipe RH sur un certain nombre d'objections et de préjugés que nous avions.

A partir de là, je suis dans la meilleure démarche possible me permettant de tenir mon rôle de manager dans les 3 situations citées plus haut.

Je découvre qu'un collaborateur de l'équipe que je manage est en situation de handicap

Situation puis Analyse

Thierry Ersin : « J'anime l'équipe n° 4 de la plate-forme téléphonique. Ces dernier temps, je sens comme des remous sur le plateau. Le climat social se détériore. J'ai entendu des rumeurs selon lesquelles Madame Prunelle déserterait régulièrement son poste. Cela me paraît bizarre. Je l'ai observée discrètement hier. Effectivement, elle s'est absentée un quart d'heure. Je l'ai convoquée pour qu'on s'explique. »

- Bonjour Madame Prunelle. J'entends dire que vous vous absentez souvent de votre poste. Vous connaissez les horaires de travail ? Ils sont contractuels. Je peux vous sanctionner.
- C'est-à-dire que j'ai le diabète. Je dois me faire 4 injections d'insuline par jour, dont 2 pendant les horaires de bureau. C'est pour cela que je m'absente.
- ... ! Ah bon... Je comprends... Mais je ne savais pas. Vous ne me l'avez pas dit quand je vous ai recrutée ?
- Non, je n'y ai pas pensé...
- Vous me mettez dans une situation embarrassante...
- ...
- Bon, que voulez-vous que je vous dise ?! A l'avenir, évitez de vous absenter en dehors des pauses.
- Merci Monsieur Ersin. Au revoir.

Léa Prunelle : « Evitez de vous absenter en dehors des pauses. Il ne comprend donc rien ! Les pauses ne correspondent pas aux horaires de mes injections. Heureusement que Justine me couvre quand je dois y aller. Justine est la seule personne que j'ai mise au courant. En fait, c'est elle qui a deviné quelle était ma situation, car son mari aussi est diabétique. Elle a pris les devants et est venue m'en parler. Le problème, c'est qu'elle n'est pas toujours là. Et puis les autres cancanent. On verrait ce qu'ils feraient s'ils étaient à ma place. C'est déjà malheureux d'avoir un handicap, mais en plus être incomprise et montrée du doigt... »

Thierry Ersin : « Je ne m'y attendais pas ! Je n'ai pas su quoi faire, quoi dire. Une personne handicapée ! Je ne veux pas l'enfoncer. Je vais fermer les yeux. »

Le directeur (quelques semaines plus tard) : « Je ne sais pas ce que fait Thierry Ersin, mais il y a de plus en plus d'absentéisme dans son équipe. Quant à l'ambiance, elle est désastreuse. Les chiffres dégringolent. La plate-forme n'atteindra pas ses objectifs. Thierry Ersin n'est pas un bon manager. »

Analyse


Le manager agit correctement en provoquant une rencontre avec sa collaboratrice. Cet entretien lui permet de savoir que la situation a pour origine le handicap de la personne (et non sa négligence ou son manque de compétence).

Par contre, fort de ces informations, ce manager n'agit pas en « manager ». Il commet l'erreur « de ne rien faire », c'est-à-dire de miser sur les petits arrangements locaux pour éviter de procéder à un réel aménagement du poste. Il aurait dû :
- Changer officiellement l'horaire des pauses de Léa Prunelle ou l'autoriser à s'absenter aux moments requis par ses injections,
- Communiquer auprès de l'équipe pour que l'aménagement d'horaires soit compris.

Quelques principes de bonne conduite à retenir


En tant que manager :
Je prends en compte le handicap.
Je privilégie au maximum l'autonomie de la personne handicapée.
J'apporte mon aide...
après avoir pris quelques précautions :
- Ai-je demandé à la personne handicapée si elle souhaitait mon aide ?
- Suis-je le mieux placé pour apporter cette aide ?
- Cela relève t-il de ma compétence ?
en acceptant d'avance un refus quelles que soient les raisons qui le motivent, comme :
- La personne n'a pas besoin d'aide
- La personne est en période d'apprentissage et préfère se confronter à la difficulté
- La personne ne veut pas car elle est de mauvaise humeur Etc.
En tant que manager, je préfère aménager officiellement le poste plutôt que de compter sur les petits arrangements locaux qui, à la longue, viendront dégrader la situation.

Je respecte le rôle de chacun des acteurs internes par rapport à ce salarié.

J'adapte aussi mon comportement en fonction des contraintes liées au handicap du salarié.

Mon collaborateur va revenir dans mon équipe après un accident du travail : il est devenu handicapé

Situation puis Analyse

Henri Person : « Bernard Rivet a été victime d'un grave accident dans l'usine. Il a dû être amputé du bras gauche. Certes, c'est de sa faute : il n'a pas respecté les consignes de sécurité. Comme souvent dans ces cas-là, il avait pris la mauvaise habitude de réparer un certain type de panne en suivant sa méthode, qu'il avait en quelque sorte avalisée par l'expérience. Quand j'étais derrière son dos, il ne le faisait pas ; je lui avais interdit. Mais quand j'étais dans mon bureau ou trop loin pour le voir...

Du fait de l'accident, on s'est bien sûr retourné contre le constructeur, qui a pu démontrer que l'accident était théoriquement peu probable mais tout de même possible. Il fallait que toute une série de coïncidences se conjuguent pour que ça arrive. Mais ça pouvait arriver. Donc il fallait respecter strictement les consignes.

Bernard est revenu lundi dernier. Nous lui avons trouvé un poste de contrôle compatible avec son handicap. C'est même une promotion pour lui : il va gagner plus d'argent. Je suis content qu'on ait trouvé cette solution.

Mais son caractère a bien changé. Son humeur est imprévisible. Parfois, je le sens irascible. J'ai l'impression qu'il en veut à la terre entière. Alors que c'est quand même de sa faute. D'autres fois, il sombre dans un abattement profond. Je ne sais plus quoi faire. J'ai envie de le bousculer pour le faire réagir. »

Analyse


Bernard Rivet, en tant que victime d'un accident, a vécu un traumatisme. Il doit se reconstruire en intégrant le changement auquel il est confronté. C'est ce que l'on appelle le cycle du deuil. Le ressentiment, la colère, voire la dépression, sont les étapes normales de la reconstitution d'une nouvelle image soi.

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