Pretoria, 25 fév 2014 (AFP)
Les médias sud-africains ont arraché mardi l'autorisation de retransmettre en direct à la télévision la majeure partie du procès du champion paralympique Oscar Pistorius, sauf son témoignage sur le meurtre de son amie le jour de la Saint-Valentin 2013.
Le procès pourra aussi être écouté intégralement à la radio. Prévu à partir de lundi, il s'annonce comme l'un des plus suivis dans les annales judiciaires sud-africaines. Il suscite aussi un énorme intérêt à l'étranger en raison de la personnalité de l'athlète né sans péronés et qui a fait beaucoup pour la reconnaissance des personnes handicapées dans le sport en s'alignant avec les valides aux Jeux olympiques de Londres en 2012. Les circonstances du drame ajoute à la frénésie médiatique, avec plusieurs centaines de correspondants attendus. Lui, riche et célèbre. Elle, pas vedette mais blonde et mannequin, et dont le sort a rappelé que la violence restait endémique de l'Afrique du Sud.
Trois caméras pourront finalement être placées dans la salle d'audience mais à des endroits "non intrusifs" et avec la possibilité pour le juge, Mme Thokozile Masipa, de les débrancher. Les téléspectacteurs pourront ainsi suivre en direct l'exposé du parquet et de la défense au début du procès, les plaidoiries finales, le témoignage des experts appelés à la barre par le parquet, mais pas les témoins cités par la défense ni la déposition de l'accusé lui-même. Les caméras pourront aussi être éteintes durant la déposition des témoins cités par le parquet si eux-mêmes ou la juge le demandent. Le jugement pourra bien sûr être filmé en direct, de même que le verdict qui n'est pas attendu avant plusieurs semaines après le procès selon la pratique judiciaire sud-africaine.
Chaine télévisée spéciale Pistorius
Les caméras seront actionnées à distance, pas par des caméramen. Aucun plan rapproché ne sera permis, a précisé le juge dans l'énoncé des strictes conditions encadrant la retransmission télévisée du procès qui doit durer jusqu'au 20 mars.
Au nombre des médias désireux de filmer le procès, une chaîne spéciale 24 heures sur 24 sur le procès doit diffuser à partir de dimanche sur le bouquet payant DS-TV, essentiellement reçu en Afrique du Sud par 4,5 millions de téléspectateurs. La défense de Pistorius s'y opposait, estimant qu'un procès télévisé serait préjudiciable aux droits de l'accusé, et réclamait le même traitement que pour n'importe quel justiciable. "Pourquoi faire différent? Est-ce parce qu'il court vite sur la piste?", avait lancé son avocat Barry Roux mercredi dernier.
Le juge Dunstan Mlambo a reconnu la difficulté de concilier deux grands principes, liberté d'expression d'un côté, les droits de Pistorius de l'autre, et soupesé le risque que certains témoins puissent être perturbés par la
présence des caméras. Il a toutefois conclu qu'il était dans l'intérêt public de permettre au plus grand nombre, dans l'impossibilité d'assister au procès, de pouvoir suivre la procédure "à titre éducatif et informatif" surtout pour "un procès impliquant une célébrité". C'est une nécessité, a-t-il jugé, "dans un pays comme le nôtre où la
démocratie est encore quelque chose de jeune, et où l'idée reste ancrée dans une large part de la société sud-africaine --particulièrement les pauvres et ceux qui ont du mal à accéder au système judiciaire-- que le système de justice traite les riches et les célèbres avec des gants de velours, avec dureté les pauvres et les vulnérables".
Oscar Pistorius, amputé des deux jambes et surnommé "Blade Runner" pour ses prothèses de carbone, a tué sa petite amie Reeva Steenkamp chez lui le 14 février 2013 en tirant avec son arme à travers la porte fermée des toilettes. Pistorius est accusé de meurtre et le parquet soutient la préméditation. Lui-même plaide l'erreur, affirmant avoir tiré dans un instant de terreur car il pensait qu'un cambrioleur s'était enfermé dans les toilettes attenant à sa chambre.
L'équipe de choc défendant Pistorius n'a aucune intention de négliger les médias qui ont déjà obtenu des fuites la semaine dernière. Elle a prévu de faire animer par des membres de la famille et porte-parole un compte Tweeter durant le procès (@OscarHardTruth).