Taxi accessible : 25 000 euros pour motiver les chauffeurs

100 taxis accessibles en 2013. Pour Serge Metz, PDG de TAXIS G7, c'est un investissement social et une démarche volontaire sans précédent. La mobilité pour tous s'offre un nouvel " Horizon ".

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Handicap.fr : 100 taxis de votre flotte accessibles avec un fauteuil roulant électrique, c'est une obligation légale ou une initiative personnelle ?
Serge Metz : Une initiative personnelle puisque la création de notre service Horizon remonte à 2004, avant la loi de 2005 (sachant que l'obligation porte de toutes façons sur le bâti mais pas sur les véhicules). A cette époque, sur 15 000 taxis parisiens (dont 4 000 pour la flotte TAXIS G7), seuls trois pouvaient prendre en charge les fauteuils roulants non pliables (pour les autres, c'est différent, il suffit de les ranger dans le coffre). Le réseau PAM n'existait pas encore et, pour cette clientèle, il n'y avait donc aucune solution, à part les transporteurs issus des associations de personnes handicapées. En tout cas, aucun système de réservation centralisé. Nous avons poussé notre coup de gueule ; ce n'était pas normal !

H.fr : Le souci, c'est que vous n'aviez aucun véhicule en propre et qu'il vous fallait donc convaincre vos chauffeurs affiliés, tous indépendants...
SM : Oui, et ce n'était pas gagné car, pour eux, ce genre de courses n'est pas particulièrement rentable, et surtout l'investissement en aménagements trop important. Mais en tant que leader sur le marché, il en allait de notre responsabilité sociale. C'est ainsi qu'est née, en 2004, notre première flotte Horizon, sur un nombre de véhicules restreints, une quinzaine ! On a mis pas mal d'années à trouver la bonne incitation financière pour arriver à ce chiffre de 100 aujourd'hui. Pour les handicaps moteurs plus légers, nous avons une flotte de 5 000 véhicules à plancher bas.

H.fr : 100 taxis adaptés sur 7 500. Dans un récent article, certains de nos internautes ont trouvé que ce n'était finalement pas tant que cela ?
SM : C'est une flotte suffisamment vaste pour offrir un service 24h/24 et 7 jours/7, dans toute l'Ile-de-France. Nous proposons la même réactivité que pour les autres clients. Nous espérons une dizaine de véhicules supplémentaires chaque année. Mais je vous assure qu'il faut user de persuasion pour convaincre les chauffeurs d'adhérer à ce service...

H.fr : Pour cela, quelles incitations avez-vous mises en place ?
SM : Entre 2004 et 2010, nous offrions aux chauffeurs en activité 10 000 euros d'aides pour équiper leur véhicule, notamment d'une rampe d'accès. Mais cela ne suffisait pas à créer des vocations. Alors, à partir de 2010, nous nous sommes adressés à tous ceux qui souhaitaient se lancer dans la profession en les aidant à acheter leur licence. 25 000 euros par chauffeur !

H.fr : C'est tout bénéfice pour eux, cela couvre largement les 10 000 euros d'équipements...
SM : Il n'y a pas que cela, c'est un engagement à plus long terme car ce type de course prend plus de temps qu'une course traditionnelle, en moyenne vingt minutes de plus pour mettre la rampe en place puis sangler le fauteuil... Pour un tarif évidemment identique !

H.fr : Et les taxis équipés ne sont spécialisés que dans cette clientèle ?
SM : Non, cela ne représente pas plus de 20 à 30 % de leurs courses. Notre centrale de réservation fait en sorte de les limiter à 2 ou 3 par jour (sur 12 courses en moyenne). Nous tenons à cette mixité de la clientèle !

H.fr : Qu'est ce qui incite ces volontaires à franchir le pas ? Se sentent-ils plus particulièrement concernés par le handicap ?
SM : Les premiers chauffeurs qui nous ont rejoints étaient en effet touchés par le handicap d'un proche pour la moitié d'entre eux, puis ce sont les incitations financières qui ont élargi le cercle. Mais, globalement, c'est notre projet qui les intéresse ; ils sont très fiers d'avoir été lauréat du Recueil des belles pratiques et bons usages en matière d'accessibilité, décerné en 2012 au service Horizon par le ministère des Transports et du développement durable.

H.fr : Il existe tout de même le réseau PAM, plus avantageux financièrement pour les usagers ?
SM : Oui mais il ne faut pas oublier que Paris est aussi une capitale qui reçoit des touristes et des provinciaux qui n'ont pas accès à ce service. Et puis PAM ne fonctionne qu'à certaines heures, et oblige à réserver à l'avance. Ce n'est pas très souple. Quand je vois le montant des subventions accordées, je me dis qu'on ferait mieux d'aider les taxis !

H.fr : Il y a tout de même eu un petit coup de pouce en 2012 de la Préfecture de police...
SM : Oui, en effet, elle a mis en place un dispositif de licences PMR (personnes à mobilité réduite). Sur les 200 à 300 licences créées chaque année, une centaine était accordée prioritairement aux chauffeurs qui s'engageaient à rendre leur taxi accessible.

H.fr : Ne pourrait-on pas imaginer une flotte de taxis à l'image des cabs londoniens qui sont, a priori, tous accessibles ?
SM : Ils le sont mais dans de mauvaises conditions : avec des rails manuels, l'obligation de mettre le fauteuil en biais alors que les normes françaises imposent qu'il soit placé face à la route. Les taxis londoniens ne seraient pas homologués en France pour des handicaps lourds. Et, très honnêtement, lorsque les chauffeurs voient une personne en fauteuil roulant, la plupart ne s'arrête pas...

H.fr : Et à Paris, héler un taxi G7 lorsqu'on est en fauteuil roulant, c'est donc possible ?
SM : C'est compliqué. C'est pourquoi nous sommes les seuls à avoir mis en place un numéro de téléphone prioritaire qui permet de répondre à la demande en moyenne en 10 minutes et au maximum en 30.

H.fr : Un tel service est-il rentable pour votre compagnie ?
SM : Franchement, ce n'est pas l'objectif ! Environ 200 courses « fauteuil électrique » par jour sur 50 000, ça reste très limité ! Nous n'avons aucun retour sur investissement. D'autant que nous finançons également des formations au sein de l'hôpital de Garches pour familiariser les chauffeurs avec les situations de handicap. C'est un engagement financier que nous assumons avec plaisir...

H.fr : Dernière chose, certains taxis refusent encore les chiens-guides. Qu'en est-il chez vous ?
SM : J'ai eu connaissance d'un seul cas en trois ans et nous avons immédiatement résilié son affiliation. Tous les chauffeurs connaissent cette réglementation. C'est inscrit dans leur certificat de capacité. Mais certains jouent la mauvaise foi : pas vu, pas pris ! Ce sont des pratiques qui doivent être combattues. Il faut alors relever la plaque d'immatriculation et porter plainte auprès de la Préfecture de police ou de sa compagnie s'il est affilié. Il encourt la suspension de son certificat.

Service Horizon pour PMR :  www.taxisg7.fr/decouvrez-nos-services/g7-taxis-parisiens-mobilite-reduite-handicap

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