Les 'mentaux 'privés de JO ?

Les propos tenus par Gérard Masson, président de Handisport, à propos de la participation des sportifs handicapés mentaux aux JO ont déclenché la polémique. Coup de gueule d'Yves Foucault, président de la FFSA (Fédération française du sport ad

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Le 17 septembre dernier, lors des JO de Pékin, à la question sur la réintégration des handicapés mentaux aux Jeux Paralympiques de 2012 à Londres, Gérard Masson, président de la Fédération handisport a répondu « Aujourd'hui, on n'est pas prêts à cela. Les sportifs handicapés physiques en ont très peur, ils ne veulent pas concourir avec les handicapés mentaux. En terme d'image, on y perdrait beaucoup. ».

Handicap.fr : En tant que président de la Fédération française du sport adapté, comment réagissez-vous à ces propos ?
Yves Foucault : Nous avons lu ces déclarations dans L'Equipe le 18 septembre au matin. Ca a été évidemment un coup de poignard dans le dos, d'autant plus que nous nous connaissons très bien avec Gérard puisque nous faisons tous deux partie du Comité national paralympique depuis trois ans. Je l'ai appelé jeudi soir et lui ai passé un savon. Il a le droit de penser ces choses là mais pas de les dire. Nous devons servir ensemble la cause des sportifs handicapés. Ca fait 40 ans que je la défends alors ce serait bien qu'on évite de nous faire payer un prix trop cher. Il n'est jamais bon que les représentants de personnes handicapées se tirent dans les pattes. La citoyenneté est pour tous. Mes sportifs méritent autant de respect que les siens. Disons que c'était une grosse maladresse, montée en épingle par la presse. Je n'ai donc pas l'intention de me lancer dans une querelle entre présidents. Nous avons de nombreux projets en commun et du pain sur la planche. Mais je serai tenté de lui dire : « La prochaine fois que tu vois un journaliste, tu fais gaffe ! ».

Handicap.fr : Aviez-vous déjà abordé ce sujet avec lui ?
YF ; Non c'est une question qui n'a jamais été discutée ouvertement lors des réunions du comité paralympique. J'ai, bien sûr, des soupçons sur ce qu'on pense de nos sportifs mais cela n'a jamais été clairement exprimé. Mais ce n'est pas le cas de tous car, il y a deux ans, lors des championnats d'Europe à Dreux, Assia El'Hannouni, porte drapeau de la délégation française à Pékin, est venue parrainer une journée et s'étonnait justement de l'absence des « mentaux » aux JO.

Handicap.fr : Qu'en est-il de leur participation aux JO ?
YF : Ils y ont participé jusqu'en 2000. L'équipe espagnole avait intégré dans ses rangs un journaliste économique qui a vendu la mèche. Plutôt que d'exclure les Espagnols, nous avons tous été mis dans le même bateau sous prétexte qu'il est difficile de définir des critères d'éligibilité avec le handicap mental. Mais le problème se pose avec la même acuité dans le handicap physique : comment admettre qu'un athlète avec deux prothèses hypersophistiquées concourent avec ceux qui n'en ont qu'une ?

Handicap.fr
: C'est vrai ! Qu'est-ce qui définit un sportif handicapé mental ?
YF : La référence, c'est un QI de moins de 75. Mais vous imaginez bien que la limite est ténue. Un sportif à 78 de QI ne peut, a priori, pas participer mais certaines équipes, certains pays, savent s'accommoder de ces nuances.

Handicap.fr
: Peut-on imaginer la réintégration des sportifs handicapés mentaux lors des JO de 2012 à Londres ?
YF : C'est ce qui est envisagé. A priori le gouvernement britannique œuvre dans ce sens. Nous avons des championnats du monde et d'Europe mais il nous manque cette vitrine, notamment pour attirer les sponsors. Il faut savoir qu'avec près de 40 000 licenciés, la FFSA n'a un budget que d'un million d'euros par an contre 6 millions pour Handisport qui compte pourtant moins de 20 000 licenciés. Ils bénéficient d'une aide publique mais également de nombreux sponsors privés.

Handicap.fr : Les JO c'est donc aussi une affaire de business ?
YF : Oui, il ne faut pas se voiler la face. Alors, dans ce contexte, je peux comprendre qu'on n'ait pas très envie de voir débarquer des handicapés mentaux dans l'équipe de France. 4200 sportifs sont présents lors des JO paralympiques. On ne peut pas en mettre un de plus. Alors si les « mentaux » retrouvent leur place, à savoir 400 ou 500 athlètes (à peine 7 ou 8 pour l'équipe de France), c'est autant de moins sur le quota des « physiques ». Donc vous comprenez bien pourquoi ils n'encouragent pas notre réintégration.

Comment expliquez-vous cette réticence ?

YF : Le handicap mental fait peur car on le confond trop souvent avec la maladie mentale. Mais je peux vous assurer que mes athlètes de haut niveau sont tout à fait présentables, à condition de ne pas les faire trop parler. Vous savez, ce n'est pas eux qui vont vous dire qu'ils ont été blessés par les propos de Gérard Masson car ils ne savent pas lire. Mais c'est mon devoir de les défendre, a fortiori lorsque j'ai 40 000 familles qui me tombent dessus !

Propos recueillis par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste à Handicap.fr

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