Robot et handicap : un partenaire en or !

InnoRobo, le premier salon européen de la robotique ouvre ses portes à Lyon du 23 au 25 mars 2011. Et le robot au service des personnes handicapées ? Bruno Bonnell*, PDG de Robopolis, répond à cette question avec un enthousiasme très " humain " !

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* Bruno Bonnell est le co-fondateur en 1983 de l'éditeur de jeux vidéos Infogrammes devenu Atari, puis en 1995, du premier fournisseur d'accès Internet en France, Infonie. Un parcours magistral qui, en 1995, lui vaut le titre de manager de l'année, décerné par le Nouvel économiste. Il est, depuis 2007, à la tête de Robopolis, société spécialisée dans la robotique de service, mais également président de Syrobo www.syrobo.org ), le syndicat français de la robotique de services.

Handicap.fr
: Votre parcours est étonnant. Qu'est ce qui vous a incité à passer de l'informatique à la robotique ?
Bruno Bonnell
: J'avais dix ans lorsque j'ai construit mon premier robot. Pendant des années, j'ai créé des jeux vidéo qui m'ont naturellement ramené vers les robots. La robotique est une évolution naturelle de l'informatique. Comme je suis le papa d'un garçon très lourdement handicapé, j'ai certainement cherché aussi à assister encore plus les personnes en difficulté.

H
: Donnez-nous des exemples de ce qu'on appelle la « robotique d'assistance » qui permet, notamment, de faciliter l'autonomie des personnes handicapées au quotidien ?
BB
: Le terrain d'intervention des robots d'assistance personnelle est illimité. Mais on peut néanmoins le segmenter en trois domaines:
- Tout d'abord la robotique destinée aux personnes « en peine ou en douleur. Des aspirateurs robots, des robots nettoyeurs de vitres ou des tondeuses autonomes simplifient leurs vies. Ces produits grand public sont relativement abordables, entre 400 € pour un aspirateur et 1500 € pour une tondeuse.
- Il existe ensuite un autre univers, celui des robots de téléprésence, ou de « compagnonnage ». Ils permettent les actes d'alerte, la télémédecine ou créent du lien social pour les usagers immobilisés à la maison. Ils sont totalement autonomes et agissent dans l'espace de vie de l'usager. Ils peuvent prendre la forme de perches sur roulettes ou d'animaux domestiques. Ceux là coutent entre 5 et 10 000 €.

H
: C'est un peu abstrait comme concept. Donnez-nous un exemple !
BB
: Il y a par exemple un robot allemand qui est actuellement testé dans une école pour jeunes leucémiques. Il filme en temps réel tous les moments de la vie de classe et les retransmet à l'élève resté à la maison. On qualifie ces robots d'ubiquitaires car ils donnent la possibilité d'être a deux endroits a la fois.

H
: Mais les détracteurs vous diront que certains de ces outils sont déshumanisants puisqu'ils empêchent d'être au contact des autres.
BB
: Bien au contraire, en libérant l'homme de taches contraignantes, les robots sont une chance de redonner du temps pour les autres.

H
: A terme, les robots ne risquent donc pas de rompre le lien social ?
BB
: On regarde toujours le futur avec les yeux du passé et nous nous complaisons dans une nostalgie bien confortable. Dans le domaine de la robotique, on fantasme Terminator, et on se réfugie dans les lieux communs. Mais pourquoi ne pas prendre en compte les bénéfices de ces technologies? Pouvoir conduire une voiture quand on n'a plus le contrôle de ses membres par exemple. Certaines voitures automatiques, sans conducteur, guidées par GPS, sont déjà en service à l'aéroport de Londres, une autre vient de traverser les Etats-Unis. Imaginez la liberté pour les personnes handicapées motrices !

H
: La robotique de service sera donc l'un des secteurs majeurs de l'activité économique du 21ème siècle ?
BB
: J'ai l'intime conviction que la « robolution » est une nouvelle révolution pour l'Humanité. Les objets qui nous entourent vont nous permettre de vivre l'espace de manière différente. Prenez l'exemple du Wifi. En 2002, tout le monde pensait que ca ne servirait à rien. Il y a aujourd'hui une quantité incroyable d'outils reliés de façon invisible, même des cartes bancaires. En huit ans, notre environnement social a été bouleversé. Il en sera pareil pour la robotique. Notre rapport à la machine et le rapport entre les Hommes vont changer.

H
: Vous avez évoqué un troisième domaine ?
BB
: Oui, c'est la robotique réparatrice, la catégorie la plus prometteuse à ce jour. Elle comprend notamment les « exosquelettes ». Une équipe japonaise a conçu une sorte de « costume robotisé ». Il permet aux personnes qui n'ont plus l'usage de leur jambe de se déplacer. Les influx nerveux envoyés par le cerveau aux muscles permettent de commander des servomoteurs! L'usage est encore fastidieux mais la porte est désormais grande ouverte.

H
: Quel espoir certes pour certains ! Mais combien de temps avant qu'ils ne puissent en bénéficier ?
BB
: Dans ce contexte, la robotisation des membres en est à un stade déjà bien avancé. Cette technique, toujours grâce à l'influx nerveux, permet de récupérer l'usage d'un bras ou d'un coude. Je suis certain que ces techniques vont évoluer très rapidement et seront disponibles d'ici deux à dix ans.

FH
: On prétend souvent que des inventions aujourd'hui utilisées par tous, comme la télécommande, ont été, à l'origine, créées pour les personnes handicapées ?
BB
: Je ne le pense pas. La télécommande a été inventée par les Américains lorsque les chaînes de télé sont devenues si nombreuses qu'elles obligeaient à trouver un système pour zapper à distance. Par contre, ce qui est certain, c'est que les personnes handicapées n'ont pas mis longtemps à s'emparer de ces outils pour améliorer leur confort et leur autonomie.

H
: Il y a donc peu d'innovations qui ont été conçues pour elles ?
BB
: Il ne faut pas se leurrer, les entreprises pensent surtout en termes de marché. Le handicap n'est pas leur priorité ! Sur le salon InnoRobo, il y aura néanmoins une dizaine de sociétés qui ont délibérément fait de l'aide aux personnes handicapées leur spécialité, avec des fauteuils robotisés capables de monter un escalier ou un robot qui aide les personnes tétraplégiques à manger.

H
: Où en-est-on de la prise en charge de ces outils robotisés, souvent très onéreux, par la Sécu ou les MDPH ?
BB
: Nulle part car, pour le moment, la technologie n'est pas suffisamment normée et sécurisée (il ne faut pas oublier que les robots de surveillance ou d'alerte peuvent être vitaux) pour permettre d'établir des protocoles. Il y a encore du chemin à faire avant que les robots ne soient intégrés dans les pratiques médicales de prévention. Au début, la Sécu ne remboursait que les médicaments, puis elle s'est mise à prendre en considération les machines, alors, pour les robots, ce sera l'étape suivante. C'est aussi parce que nous avons besoin de travailler sur ces axes de réflexion que nous avons créé le syndicat de la robotique, Syrobo.

H
: Quel est le robot idéal que vous rêveriez d'inventer ?
BB
: Je n'ai pas de robot préféré, j'en ai des centaines. Ce qui me passionne, c'est l'intelligence artificielle. Tous les robots sont magiques. Je les aime tous comme une nouvelle espèce en voie d'apparition...


Infos

- InnoRobo, le 1er salon professionnel international de la robotique de services : 2500 m2, 100 stands, 3 jours de conférences. Espace dédié à la thématique « Robot et santé ».
- Centre des congrès de la Cité internationale de Lyon
- Du 23 au 25 mars 2011
- www.innorobo.com

Propos recueillis par Emmanuelle Dal'Secco

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