Valérie Trierweiler reçoit handicap.fr à l'Elysée

Femmes victimes de violence, enfance maltraitée, personnes handicapées... Valérie Trierweiler s'engage ! La première dame a reçu handicap.fr à l'Elysée pour une interview exclusive. Le handicap, c'est aussi une part de sa vie...

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H.fr : Vous avez récemment convié à l'Elysée Philippe Croizon, le nageur amputé des quatre membres. Pour quelle raison ?
VT : Je l'avais entendu dire, lors d'une interview, qu'il n'aurait jamais eu une vie aussi extraordinaire sans son accident. J'ai été bouleversée par sa force. Je lui avais déjà posté un twitt après sa traversée de la Manche mais n'avais jamais osé l'appeler. Et puis, cet été, lorsqu'il s'est fait voler son fauteuil, je lui ai envoyé un petit mot. C'est ainsi que le lien s'est fait...

H.fr : Au cours de cette entrevue, qu'avez-vous pensé ?
VT : Que mon impression était la bonne. J'ai rencontré un homme généreux qui a certainement un rôle à jouer. Ce qu'il fait est important, il doit continuer. C'est, je crois, la première fois qu'une personne handicapée est, à ce point, médiatisée. Une excellente opportunité pour tous ! Son parcours permet deux choses : donner de la force à ceux qui n'en ont plus et changer le regard des autres.

H.fr : A-t-il évoqué avec vous la demande qu'il a adressée dernièrement au Premier ministre ?
VT : Vous voulez parler du handicap en tant que Grande Cause nationale en 2014 ou 2015 ? Oui, évidemment. L'idée lui tient à cœur. A moi aussi... Mais il est vrai que je défends, avec le sénateur André Vallini, notre « dossier » sur l'enfance maltraitée. C'est une concurrence amicale et je suis certaine qu'il y aura de la place pour tous. L'année 2015 serait symbolique pour le handicap puisque ce seront les dix ans de la loi de 2005.

H.fr : D'où vous vient cette sensibilité à l'égard des personnes handicapées ?
VT : Certainement de mon père. Il était amputé d'une jambe. Un obus laissé dans un champ, pendant la guerre. Il avait douze ans. Il a lutté contre la mort, a survécu mais, psychologiquement, ne s'en est jamais vraiment remis. J'ai grandi avec une personne handicapée même si mon père a toujours refusé d'être considéré comme telle. Il était appareillé mais son infirmité ne lui a jamais permis de trouver un travail. Il a vécu de sa pension. Aujourd'hui, sa vie serait peut-être différente, mais il est décédé à 53 ans...

H.fr : Le handicap n'est donc pas une « différence » qui vous heurte ?
VT : Non, je ne suis jamais mal à l'aise devant une personne handicapée, ni devant aucune autre différence d'ailleurs. Par exemple, lors de ma rencontre avec Philippe Croizon, je ne me suis pas demandé comment j'allais lui dire bonjour. Les choses se sont faites naturellement...

H.fr : Vous devez être souvent sollicitée par des associations de personnes handicapées ?
VT : Oui, c'est vrai. J'essaie d'y répondre du mieux que je peux. Je m'implique, par exemple, aux côtés d'une association de personnes non-voyantes. Si ma notoriété peut leur apporter l'aide nécessaire pour collecter des fonds, j'en suis heureuse. Mais je me concentre avant tout sur les enfants, qui sont encore plus vulnérables.

H.fr : Vous vous êtes également engagée aux côtés de Trisomie 21. Pourquoi cette association ?
VT : Peut-être parce que, lorsque j'étais petite fille, notre voisine était trisomique... Elle avait porte ouverte à la maison car son transistor était souvent cassé et elle venait voir mon père pour le faire réparer. Peut-être parce qu'une de mes amies a un petit garçon trisomique... Il y a quelques mois, des élèves en CAP cuisine, tous trois trisomiques, m'ont fait une proposition : venir préparer un petit-déjeuner à l'Elysée. L'idée était belle ; j'ai accepté, les cuisiniers du Palais aussi. Le Président et la ministre de la santé, Marisol Touraine, étaient conviés. J'ai gardé le contact avec les mamans de ces jeunes qui m'ont dit à quel point elles avaient dû enfoncer des portes pour qu'ils puissent suivre leur scolarité, comme tout un chacun. L'un d'entre eux travaille aujourd'hui dans un restaurant. Cette rencontre a démontré leur aptitude à s'intégrer socialement et professionnellement.

H.fr : On vous a également vue sur un plateau télé aux côtés d'Eléonore, une jeune femme trisomique qui n'a pas la langue dans sa poche...
VT : Oui, c'était un beau moment. Eléonore est particulièrement pétillante. Elle a vingt-deux ans, vit dans son propre appartement, a un petit ami, travaille... Elle a, par sa seule présence et son naturel devant les caméras, fait bien plus que tous les discours pour nous convaincre qu'une place faite aux personnes handicapées est une chance.

H.fr : Vous vous êtes rendue dans une école pour la dictée en faveur de l'association ELA ?
VT : Oui, en 2012, grâce à Guy Alba. J'y ai rencontré Solenne, une jeune fille de douze ans, en fauteuil roulant, que je continue d'ailleurs à voir. Nous avions pris le parti de la faire venir devant les collégiens pour les sensibiliser à la leucodystrophie, cette maladie invalidante grave. Tous semblaient terriblement touchés. Cette année, cette dictée aura lieu le 18 octobre. J'irai, cette fois-ci, dans l'école de mon enfance, à Angers. On a même retrouvé mon ancienne institutrice de CM1 à laquelle je vouais une véritable admiration. Elle sera à mes côtés.

H.fr : Votre implication vous permet-elle d'influencer le Président ?
VT : Influencer, ce n'est pas le bon terme. Disons plutôt sensibiliser. Mais je vous assure que le Président ne m'a pas attendue pour savoir à quoi ressemble la vie des personnes handicapées ; il a été maire et Président de Conseil général.

H.fr : Est-ce toujours le rôle de la première dame d'agir en faveur des citoyens les plus « fragiles » ?
VT : Je ne sais pas si cela fait partie de notre « rôle » mais il est vrai que, parmi les lettres qui me sont adressées, presque cinq cents par mois, beaucoup parlent de pauvreté, de vulnérabilité et témoignent d'une grande souffrance, quel que soit le sujet. Mais pas seulement. Dans le cadre du Mariage pour tous, par exemple, j'ai reçu de nombreux témoignages de gens heureux d'accéder aux mêmes droits que chaque citoyen.

H.fr : Ce qui signifie que, sur ces questions, on préfère s'adresser à sa compagne plutôt qu'au Président ?
VT : N'allez pas croire cela. Le Président reçoit près de cinq mille lettres par mois. Et elles abordent aussi des questions éminemment humaines.

H.fr : Vous répondez à chacun de ces courriers ?
VT : Non, cela m'est impossible à titre individuel, sauf pour quelques-uns. Alors j'adresse plutôt des réponses aux associations concernées. Je ne vais pas vous cacher que la « Première dame » découvre, à travers ces confidences, des réalités dont la « citoyenne » ne pouvait avoir conscience...

H.fr : Votre engagement en faveur des femmes victimes de violence en temps de guerre a dû également vous révéler l'indicible...
VT : Oui j'ai côtoyé l'horreur lors d'un récent déplacement au Congo, en tant qu'ambassadrice de la Fondation France Libertés. Je visitais l'hôpital du docteur Mukwege, spécialisé dans la prise en charge de ces femmes qui n'ont pas seulement subi des viols mais toutes sortes de sévices sexuels d'une aberrante cruauté. Ce ne sont parfois que des petites filles. Quatre générations de victimes, pour certaines, toutes violées, toutes issues de viols... Les séquelles et handicaps résultant de ces traumatismes sont profonds, à la fois physiques et psychologiques. Des mutilations, des amputations ! J'ai pris la parole à ce sujet le 24 septembre 2013, à l'occasion de la 68ème assemblée générale des Nations Unies. Nous attendons une résolution du Conseil des droits de l'homme sur cette question, et militons pour que le docteur Mukwege soit retenu pour le prix Nobel de la paix, l'année prochaine. Il y a urgence...

H.fr : Mais la France a aussi son lot de tragédies, souvent occultées...
VT : Vous faites probablement allusion au foyer pour enfants maltraités, le Village Saint-Exupéry, que j'ai récemment visité à Angers. Certains sont devenus handicapés sous les coups. Je vous épargne les détails... Les spécialistes assurent que, en France, un à deux enfants meurent chaque jour, victimes de maltraitance, mais les statistiques oublient trop souvent ceux qui en conservent des séquelles à vie...

H.fr : C'est à ce titre que vous vous souhaitez révéler la situation des enfants vulnérables à travers le monde. Quel a été le déclic ?
VT : En 2012, un rapport de l'Unicef révèle qu'un enfant sur dix vit dans une extrême pauvreté. Il est publié le jour où Laurence Ferrari quitte TF1. Le scoop était trop beau, et les médias ont totalement passé ce rapport sous silence. J'étais tellement offusquée que j'ai décidé de m'impliquer pour mettre en lumière tous ces enfants, quels qu'ils soient : pauvres, maltraités, handicapés... Je ne choisis pas entre plusieurs détresses. J'aide donc aussi le Secours populaire.

H.fr : En novembre prochain, vous irez à Vichy à la rencontre de Théo. Qui est Théo ?
VT : C'est un jeune garçon de treize ans que Philippe Croizon a surnommé son « Mini-moi ». Amputé lui aussi des quatre membres, il a décidé de conjurer le sort en intégrant un CREPS (Centre de ressources, d'expertise et de performance sportives) pour devenir nageur de haut-niveau. Il vise les Jeux paralympiques, peut-être ceux de Rio. Lorsque Philippe m'a demandé de l'accompagner, j'ai aussitôt dit « Oui » parce que je suis convaincue des bénéfices de la pratique sportive en cas de handicap, même lourd comme celui de Théo. Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées, sera également avec nous.

H.fr : Cette année, l'Elysée ouvre plus grand ses portes à ces enfants que l'on prétend différents...
VT : Oui, pour le prochain Noël de l'Elysée, j'ai demandé à ce que, parmi nos 550 invités, il soit fait une plus large place aux enfants handicapés, à ceux que j'ai croisés dans les associations que je soutiens.

Copyright de la photo de l'entretien avec Philippe Croizon: ©présidence de la République/C. Alix
Copyright du portrait de Mme Trierweiler: ©présidence de la République/S. Ruet

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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