Politiques en direction des personnes « autrement capables » : Les engagements internationaux de la France sur les questions de l'invalidité.(1ère partie)

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Après son second passage au Sénat, le « projet de Loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » suscite toujours de nombreux désaccords et insatisfactions chez les personnes et organisations concernées. Selon le Groupement Français des Personnes Handicapées, ce projet de Loi ne répond pas ou de façon très parcellaire aux orientations définies par la France avec les Institutions et ONGs européennes et internationales, et il semble que ce soit la logique même du processus réformateur proposé qui soit à questionner. [BB]Définir le « handicap »[EB] Quand il est fait référence à la « Classification Internationale des Handicaps » adoptée par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) pour justifier une définition « du handicap », il n'est tout d'abord pas possible d'ignorer la vision claire exposée par le Dr Philip Wood, le concepteur de la première version adoptée en 1981 par la France à l'OMS, dans son introduction : « La classification (du handicap, ou du désavantage) s'y fait non pas selon les individus ou leurs caractéristiques, mais plutôt en fonction des conditions de vie dans lesquelles les personnes frappées d'incapacité peuvent se trouver, conditions susceptibles de placer ces individus dans une situation désavantageuse par rapport à leurs pairs, du point de vue des normes sociales. » Pour ce qui est du « handicap » d'un individu donné, la définition élaborée par Philip Wood est celle du « préjudice qui résulte de sa déficience ou de son incapacité et qui limite ou interdit l'accomplissement d'un rôle considéré comme normal compte tenu de l'âge, du sexe et des facteurs socio culturels » ; donc de facteurs identitaires, contextuels et environnementaux. Philippe Lazar, Directeur général de l'INSERM, ajoute enfin dans la préface de l'édition française de 1988, que « cette classification a permis de donner du concept de handicap lui-même une acception claire et forte, celle du désavantage individuel insuffisamment compensé par la société ». Bientôt 25 ans plus tard, si le projet de Loi est enfin cohérent avec ce dernier éclairage en proposant de compenser les incapacités, il est clair que la définition retenue dans le projet de Loi ne reflète nullement les conceptions et l'approche adoptées sur le plan international et européen. La Classification Internationale du Fonctionnement (CIF) récemment adoptée par l'OMS, avance plus loin que ne l'avais fait Philip Wood dans la prise en compte et la classification des facteurs environnementaux, mais surtout ne donne pas de définition pour cette raison contextuelle. Elle laisse à chaque pays le soin d'élaborer sa propre définition en accord avec sa culture et ses choix, et offre une série d'outils qui permettent une estimation des besoins en prenant en compte le mode et le cadre de vie de la personne dans l'évaluation de sa situation, de ses besoins et des compensations qui peuvent lui être attribuées. L'analyse comparative des définitions utilisées dans différentes administrations , conclue que « les définitions du handicap n'ont de sens que dans le contexte spécifique dans lequel elles sont utilisées, lorsque les facteurs personnels, sociaux et environnementaux sont identifiés. » Les États ont besoin de circonscrire le volume des mesures particulières qui doivent être prises pour prévenir ou supprimer les désavantages subis par une partie de la population, mais il n'est pas possible, comme le propose le projet de Loi, d'identifier «l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique » ( comme la seule origine de ces désavantages. Avec les Nations Unies, la France a adopté une série de décisions en vue « de combattre et de vaincre la discrimination à l'égard des (personnes)handicapé(e)s et de promouvoir leur participation intégrale et effective à la société » , et dont les « Règles pour l'égalisation des chances pour les personnes handicapées » adoptées en décembre 1993 constituent le document de référence. Aujourd'hui, c'est en participant aux travaux préparatoires à l'élaboration d'une « Convention pour la protection et la promotion des droits et de la dignité des personnes avec des incapacités (Persons with disabilities) » que la France contribue à défendre les principes « d'autonomie, d'auto détermination, d'inclusion, d'égalité des personnes handicapées et de leur droit à exister de façon différente. » Le principe d'égalité de traitement, ou de non-discrimination, implique que soit d'abord rétablie l'égalité des chances, une non-discrimination, avec toutes les mesures positives nécessaires ; des mesures qui doivent permettre aux citoyens « autrement capable » d'être réellement acteurs de leur vie. Telle qu'elle est envisagée par le projet de Loi, la compensation ne pourra s'apparenter à une mesure positive que si elle offre à chaque personne les moyens financiers dont elle a réellement besoin pour participer à la marche de la société et mener sa vie selon ses choix. En Europe, la France s'est appuyée sur la communication de la Commission Européenne «Vers une Europe sans entraves pour les personnes handicapées » pour décider l'Année Européenne 2003. Cette communication vise à « élaborer et à soutenir une stratégie globale et intégrée pour aborder les obstacles aux niveaux social, architectural et conceptuel, qui empêchent sans raison les personnes handicapées de participer à l'activité économique et sociale. » Comment comprendre, au regard de ces orientations soutenues par la France, que les principes d'action adoptés hier sur le plan international ne puissent aujourd'hui trouver leur place dans notre législation nationale ? Lire la suite: http://www.handica.com/acces_themes/article.php?cat=1.2.0.0&art=1445 Élaboré avec les contributions des Membres et sympathisants du Groupement Français des Personnes « Handicapées » http://gfph.free.fr
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