AVS et enseignante témoignent !

Le statut et les conditions d'attribution des AVS (Auxiliaire de vie scolaire) créent le débat. Certains parents crient au scandale mais qu'en est-il des AVS eux-mêmes et des enseignants ? Le point avec Carole et Sandrine, en charge de Lili, 4 ans.

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Le point de vue de l'AVS, Carole Delpech, 29 ans

Quelle qualification avez-vous ?
J'ai une licence de STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives) et je prépare depuis six ans le concours de professeur des écoles. Je voulais, en attendant, trouver une activité en lien avec mon futur métier.

Quel est votre statut, votre salaire ?

Je touche le SMIC horaire. Je suis en CDD de septembre à décembre, puis à nouveau de janvier à juin si tout se passe bien avec l'enseignante. C'est très précaire et il n'y a évidemment aucune évolution de carrière.

A-t-il été difficile de vous faire recruter ?

Je me suis adressée à la mairie de Toulouse car le recrutement des AVS en maternelle se fait par le biais des mairies. Parcours classique : CV + lettre de motivation + entretien ! Le problème, ce n'est pas de trouver des postulants, ce sont les moyens.

Certains enfants n'auront donc pas d'AVS faute de moyens ?
C'est évident ! L'année dernière j'ai été embauchée le 1er octobre pour un élève qui attendait une AVS depuis trois ans. A l'école, personne n'y croyait plus !

Pourquoi n'avez-vous pas suivi cet enfant ?

Car il rentrait au CP, et le recrutement relevait alors de l'Education nationale. Mais, même en dehors de ce cas particulier, on a rarement la garantie de pouvoir suivre l'enfant. C'est dommage car on était devenus vraiment complices et je comprenais parfaitement sa façon de travailler. Il faut du temps pour s'apprivoiser...

Comment êtes-vous perçue par le corps enseignant ?
J'ai le sentiment d'être très complémentaire de la maîtresse, qui me laisse d'ailleurs beaucoup autonomie. Elle ne passe pas son temps à me surveiller.

Avez-vous été formée pour prendre en charge des élèves handicapés ?

Zéro formation ! On a signé mon contrat et on m'a dit « Vous commencez demain ! ». C'est ça notre problème, on ne sait rien de l'enfant. C'est le papa de Lili qui m'a dit, à 12h30, le jour de la rentrée, qu'elle était autiste. On réclame haut et fort des formations mais pour l'instant c'est peine perdue. On est vraiment lâchés dans la nature et on doit faire au feeling. Certains AVS vous disent : « Moi ce que je veux c'est mon salaire à la fin du mois ». Mais lorsqu'il n'y a pas de motivation réelle, c'est dommage pour l'enfant. Cette profession n'est pas reconnue alors qu'il pourrait y avoir un travail constructif pour lui.

Alors comment pouvez-vous aider Lili ?

Elle est prise en charge dans une école pour enfants autistes l'après-midi alors je m'y suis rendue et j'y ai vu ce qu'elle était capable de faire alors que je n'osais rien lui demander en classe. Suite à une réunion pédagogique avec l'ensemble des intervenants impliqués, on a pu avancer. Mais avec elle, c'est du 200% en permanence, je ne peux pas la lâcher. Alors, pour être payé au SMIC, il faut vraiment en vouloir.

Comment voyez-vous l'avenir dans ce poste ?
A très court terme. Je n'ai pas la garantie d'avoir un contrat pour 2010 et encore moins avec Lili. Mais je vous assure que malgré l'intérêt que je porte à ma fonction et l'estime que nous témoignent les parents, si j'ai l'opportunité de trouver autre chose, je saute sur l'occasion. C'est trop précaire de travailler de six mois en six mois. Il n'y a pas encore d'associations qui regroupent les AVS mais il faudrait vraiment y songer.

Le point de vue de Sandrine Corte, professeur des écoles, cycle 1 (toute petite, petite et moyenne section de maternelle)

Comment percevez-vous la présence d'une AVS dans votre classe ?

J'accueille depuis quelques années des enfants handicapés et j'ai toujours eu la chance de bénéficier du soutien d'une AVS. Carole s'occupe exclusivement de Lili ce qui me permet de dégager du temps pour le groupe. Mais il est vrai que notre ambition pédagogique, c'est que Lili devienne la plus autonome possible. Si nous arrivons, en fin d'année ou en fin de cycle, à ce que l'AVS ne soit qu'en observation au fond de la classe, nous avons atteint notre objectif !

Que pensez-vous de la qualité du recrutement des AVS ?

Avec Carole, nous sommes vraiment tombés sur la perle rare. Mais il est vrai que j'ai travaillé avec quatre autres AVS et qu'ils ne sont malheureusement pas toujours aussi impliqués. Je fais un point régulièrement avec Carole sur le comportement et les acquis scolaires de Lili, elle est présente aux réunions, elle a vraiment un rôle important.

L'accueil d'un enfant handicapé engendre-t-elle pour vous une surcharge de travail ?

Je vais être franche, on n'a de toutes façons pas le choix : c'est la loi. Mais, ça ne change pas grand-chose car, en classe, nous proposons un travail différencié pour chaque élève. Certains enfants en grande difficulté, mais qui ne relèvent pas d'un quelconque handicap, n'ont pas la chance d'avoir une AVS et demandent pourtant une attention soutenue. La présence de Lili n'a jamais causé aucun préjudice. Au contraire, nous apprenons à vivre ensemble en étant différents. Les parents d'élèves se montrent plutôt réceptifs, même très contents car ils me disent : « Mon enfant va apprendre à vivre avec une petite fille différente ».

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