Employeur face au handicap : quelques vérités ?

" On est dans la m..... ! ". C'est à ce cinglant constat que se résume parfois l'intégration d'un travailleur handicapé dans une entreprise. Mais les employeurs sont-ils pour autant toujours les " méchants " ?

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L'inclusion d'un travailleur handicapé dans une entreprise suppose un travail de sensibilisation des managers et des équipes qui n'est pas toujours au rendez-vous. Les patrons ont besoin d'être rassurés ! Une tache colossale semble-t-il ! Mais colossale pour les deux parties, à la fois recruteurs et travailleurs.
Chacun se renvoie la responsabilité, et tente de défendre ses prérogatives, dans une étreinte lascive sur fond de « Je t'aime moi non plus ! ».

Pour les premiers, le quota d'embauche de 6 % (de travailleurs handicapés) est un plafond à atteindre et, pour les seconds, un plancher à ne pas enfoncer. A force de crier haro sur le baudet, on n'en a parfois oublié que le milieu professionnel n'était pas l'ennemi à abattre mais le partenaire à convaincre. « Les entreprises ont en marre qu'on leur dise qu'elles ne font pas bien, explique Jean-Marie Barbier, président de l'APF, car certaines sont réellement impliquées. » Cet « hommage » de la sphère associative ouvre une brèche dans laquelle le patronat aurait tort de ne pas s'engouffrer.

Le coup de gueule du MEDEF


Hervé Allart de Hees est le représentant du MEDEF (Mouvement des entreprises de France) de l'Est parisien. Il était invité par L'ADAPT au colloque d'ouverture de la Semaine de l'emploi des personnes handicapées. Et, légitimement, au cœur de cette assemblée essentiellement associative, il se fait la voix du patronat. « Il y a des propos qui me font bondir. Certaines entreprises engagent des actions remarquables. » Cet entrepreneur vient de lancer le recrutement d'une vingtaine de salariés et regrette qu'aucun profil de travailleur handicapé ne lui ait été proposé. « Je rencontre souvent des patrons qui me disent « Ils sont où les travailleurs handicapés ? ». Même son de cloche chez la plupart des chargés de mission handicap qui prétendent passer des heures sur les salons et forums pour récolter quelques CV.

Et monsieur Allart de Hees de s'indigner : « Il n'y a aucune raison que la question de l'emploi de travailleurs handicapés ne repose que sur les employeurs. Pourquoi les représentants de Pôle emploi ne sont-ils pas sur cette estrade aujourd'hui ? Et ceux de l'Education nationale ? Pourquoi n'ont-ils pas l'obligation, eux aussi, de « flécher » 6 % des recrutements ? Plus on sera nombreux à œuvrer dans ce sens et mieux ça ira ! La situation n'est pas encore citrique mais on va indéniablement vers une baisse des moyens. Il faut donc revoir nos modèles de financement pour que cet engagement soit pérenne ». Cette intervention n'a pas laissé les intervenants de marbre, et a même suscité quelques applaudissements dans le public.

Les PME, de bons élèves !


Propos repris en écho, plus nuancés, par Geneviève Roy, vice-présidente de la CGPME (Confédération générale des PME). « Il faut poursuivre les actions de sensibilisation car, pour certains chefs d'entreprise, rentrer dans cette démarche est loin d'être une évidence. Et la formation en amont est évidemment primordiale ! Le handicap n'est pas rédhibitoire dans l'emploi ; la CGPME a d'ailleurs mis en œuvre des campagnes sur les contrats pro ainsi que sur la formation continue, notamment les VAE (Validation des acquis de l'expérience) qui permettent de se maintenir dans l'emploi. Nous menons également des opérations avec Pôle emploi pour accompagner ceux qui manquent de qualifications. » Les grandes entreprises sont indéniablement sensibilisées sur le sujet, ont le moyens de mettre en place des missions handicap ou de lancer de vastes campagnes de communication. Mais on a tendance à penser que l'histoire se construit avec elles, or, en France, les principaux pourvoyeurs d'emplois sont les PME, TPME (Très petites et moyennes entreprises) et commerçants. Certains osent évidemment prétendre « Le handicap ce n'est pas pour nous ! ». Moins de 20 salariés, pas concernés ! Mais la plupart se montrent malgré tout engagés. 56 % des entreprises en conformité avec la loi sont des PME, c'est-à-dire des établissements de moins de 50 salariés. « Depuis plusieurs années, ce sont les petites structures qui embauchent le plus de travailleurs handicapés » déclare Joël Tarche, chargé de mission à la direction des services et des entreprises de l'Agefiph.

Entreprises dans la tempête


Et pourtant, en temps de crise, eux aussi doivent affronter la tempête. Or l'accessibilité, par exemple, représente des coûts importants pour les entreprises, un seuil souvent difficile à franchir, même si madame Roy admet que « c'est un investissement important car ces adaptations offrent, à terme, un profit pour l'ensemble des usagers ». Plus largement, les chefs d'entreprises ont besoin d'être informés, or le budget dédié de l'Agefiph sera en baisse dès 2012. Il n'y a donc sur cette question ni bon ni mauvais. Les acteurs avancent, tous, c'est certain, mais chacun à son rythme, selon ses propres contraintes. Dans le bureau des directions d'entreprises, on entend sanction, pénalités, contribution... La coercition est parfois nécessaire mais on peut admettre qu'elle fasse grincer certaines dents. Chacun voit midi à sa porte, il n'en a jamais été autrement !

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