Nouveau comité pour la bientraitance : une coquille vide ?

Depuis le 7 janvier 2013, une troisième version du Comité contre la maltraitance des personnes âgées et handicapées a vu le jour. Plus de 10 ans d'existence et des actions encore trop modérées. En finir avec les violences, c'est pour bientôt ?

• Par

Une mamie dont une maison de retraite se débarrasse aux urgences d'un hôpital, un résident d'un centre de rééducation retrouvé mort dans un placard, une institutrice condamnée à deux mois de prison avec sursis pour avoir fessé une élève polyhandicapée... Le petit récit d'une semaine d'une violence devenue ordinaire, dont sont souvent victimes les plus fragiles. Personnes âgées, adultes et enfants handicapés, même combat face à la maltraitance ? Alors forcément, lorsque le 7 janvier 2013, Jean-Marc Ayrault signe le Décret n° 2013-16 portant création du « Comité national pour la bientraitance et les droits des personnes âgées et des personnes handicapées », en présence de Marie-Arlette Carlotti (ministre déléguée aux personnes handicapées), de Michèle Delaunay (ministre des personnes âgées) et de Marisol Touraine (ministre de la santé), c'est le soulagement ! De courte durée... Car la coquille semble bien vide.

Un accouchement en trois étapes ?


Il existait en effet déjà un « Comité national de vigilance contre la maltraitance des personnes âgées », créé en 2002. Qui s'est métamorphosé en 2007, en « Comité national de vigilance et de lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des adultes handicapés ». Le mandat de la seconde instance était arrivé à expiration en mars 2012 et n'avait pas été renouvelé depuis (C'est donc chose faite le 7 janvier 2013 !). Déjà deux versions et une apparente inertie puisque, depuis sa création, ce comité semble ne s'être jamais réuni. Ou peut-être une fois, en 2009, souvenir vague de ceux à qui l'on a posé la question... Alors pourquoi, aujourd'hui, changer « l'emballage » d'un flacon aux fragrances évaporées ? Quel bénéfice cette nouvelle « recette » va-t-elle apporter aux personnes handicapées ? Avec le vieillissement de la population, le gouvernement souhaite-t-il réellement réactiver cette question ? Selon l'APAJH, « on note une réelle mobilisation des associations de personnes handicapées autour de cette thématique. Ce nouveau comité témoigne de la volonté de faire renaître une initiative jusque-là plutôt endormie. »

60 organisations impliquées


Sur le papier, l'intention semble louable. Mais sur le terrain ? Enquête auprès des organismes concernés, qui sont tous inscrits sur la liste du comité composé de hauts fonctionnaires, de présidents d'associations et de personnalités qualifiées. Pas moins de soixante entités ! Parmi elles, deux représentants du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées), d'Allo maltraitance, du Défenseur des droits mais également des principales associations de personnes handicapées, prenant place autour de la table aux côtés du directeur des affaires criminelles et de celui de la Police nationale ! Une assemblée hétéroclite à laquelle viennent s'ajouter dix personnalités nommées en raison de leur compétence ! A définir...

Des membres pas très informés


Et pourtant, parmi les intéressés, personne n'a l'air très informé. Une bouteille à la mer lancée auprès de l'APF, de l'APAJH, du Défenseur des droits... Mais aucune réponse à l'horizon. On se renvoie la balle, y compris au sein du cabinet de madame Carlotti qui, selon le décret, préside pourtant, elle aussi, à la destinée de ce nouveau comité, en compagnie de Michèle Delaunay. Le cabinet de la seconde nous informe que la réunion d'installation n'aura lieu qu'en février, lors de laquelle seront précisés le mode de fonctionnement, les champs d'intervention et la composition de ce comité. En attendant, les textes nous livrent des bribes d'informations aux nuances subtiles. Le nouveau comité voit son champ d'actions élargi ; il devra s'occuper de la promotion de la « bientraitance » et plus seulement de la « lutte contre la maltraitance », en étendant également ses compétences aux mineurs handicapés. Il se réunira au moins une fois par an (là où le décret du 12 mars 2007 prévoyait au moins une réunion par semestre !) et pourra « renvoyer à des commissions l'étude des questions soumises à son examen » et procéder « aux auditions qu'il juge nécessaires ».

Des objectifs ambitieux


Pour le moment, cette annonce a donc de quoi laisser plutôt sceptique. Reste à espérer que la version rénovée de ce comité poursuivra les objectifs définis dès 2007. Et ils sont nombreux : susciter une démarche d'amélioration de la qualité dans les établissements, sensibiliser et former les personnels à la bientraitance, augmenter les effectifs dans les établissements, valoriser les métiers et améliorer le cadre de vie des résidents. Pour renforcer la lutte contre la maltraitance, d'autres mesures sont préconisées : faciliter les signalements, désigner dans chaque DDASS un « correspondant maltraitance », doubler le nombre des inspections dans les établissements, veiller à l'application des sanctions et assurer un meilleur suivi des contrôles. En attendant que ce train à vapeur se mette en marche, que dire à tous ceux qui, derrière les murs de certaines institutions, rêvent d'un locomotive TGV pour échapper, au plus vite, à la... fessée !

Lien vers le décret :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000026916037&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id

« Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par Handicap.fr. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, sans accord. »

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
Commentaires3 Réagissez à cet article

Thèmes :

 
3 commentaires

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.