Sexualité : pourquoi en être privé en cas de handicap ?

La sexualité des personnes handicapées ? Alicia Baca Mondéjar prend la plume sur ce sujet tabou. Sur son blog, elle parle de choses et d'autres, avec élégance et sincérité. Sexe, amour ou tout simplement affection, comment ne pas en être privé ?

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Si les personnes handicapées revendiquent une « sexualité », ce terme prend toutes sortes de directions et s'affiche plus que jamais comme un terrain vague semé des tabous et d'une volonté consciente ou inconsciente d'ignorer cette situation pour le moins délicate. « Je veux faire l'amour », tel est le leitmotiv qui s'affirme dans les couloirs de la non-tolérance d'un pays où la prostitution est illégale.

Un besoin primaire

Or la sexualité, considérée comme l'un des besoins primaires tels que manger ou boire, ne se limite pas au monde des non-handicapés. La nature humaine est incroyable puisque la plupart des personnes handicapées n'ont pas perdu cette nécessité ultime qui est celle de la reproduction. Malheureusement, au moment précis où vous devenez l'une d'entre elles, vous passez de l'autre côté, dans une sorte de no man's land intransigeant dont les étiquettes sont lourdes à porter. Essayons d'imaginer. Pensez à toutes ces choses que vous aimez, que vous faites durant la journée... Et puis un jour, le handicap. Ce qui est le plus terrible dans l'histoire, plus que le handicap en soi, ce que vous êtes toujours la même personne mais, pour les autres, vous êtes passé de l'autre côté. Handicap devient synonyme de « débile mentale », de sympathie enfantine et surtout d'être asexué...

Finie la drague !

Avez-vous vu le film « De rouille et d'os » ? Marion Cotillard se fait draguer dans un bar. Tout à coup le monsieur en question remarque qu'elle a une canne et s'excuse. Elle hurle, « Pourquoi tu t'excuses ? ». Il répond : « Je n'avais pas vu que... ». Et Cotillard : « Tu n'avais pas vu quoi ? ». Pourquoi attire-t-elle le regard des hommes dans un premier temps mais devient, dès que son handicap est découvert, celle qu'il ne faut plus courtiser ?

Assistant sexuel : c'est quoi ?

Pour remédier à cette grande misère à la fois affective et sexuelle, il existe une solution : l'assistant sexuel ? En quoi diffère-t-il d'une (ou d'un) prostituée ? Bien que le but soit le même, le moyen est abordé tout autrement. Nous parlons thérapie, approche, découverte à un monde souvent totalement méconnu. Le concept « prostitution » se divise pour mieux accompagner la personne en détresse : ce sont parfois des thérapeutes qui remplissent ce rôle. Il est clair que, dans une société où des mères sont obligées de masturber leur garçon handicapé, cette solution se veut plausible. Sans compter tous les êtres humains touchés par le handicap depuis la naissance et qui n'ont grandi qu'au sein de l'environnement familial. Ils ont toute leur tête mais sont enfermés dans un corps caricatural. Et puis, un jour, deviennent adultes. Pensez-vous que le désir sexuel n'existe pas ? On peut s'habituer à dépendre des autres mais peut-on réfuter ce que le corps exige de toutes ses forces ?

Compter pour quelqu'un

Mais peut-on faire l'amour avec une ou un inconnu, thérapeute ou pas ? Les Anglais font bien la différence entre faire l'amour ou avoir du sexe. Je veux en venir à l'affection, à ce besoin humain d'être touché, caressé, être pris dans les bras de quelqu'un, pleurer sur une épaule autre que celle de ses parents, mais aussi ces échanges anodins avec le reste du monde. Ces mini flirts qui ne durent parfois que quelques secondes, ce regard volé dans le métro, cette impression que tu comptes pour quelqu'un.

La demande d'amour

Le corps d'une personne handicapée ne connaît que les mains des thérapeutes, auxiliaires de vie et parents. Et même si, heureusement, elles font souvent preuve d'une certaine tendresse, la personne handicapée se retrouve isolée du monde et dans un manque d'affection incommensurable. Cet assistant(e) sexuel(le) qui fournit un travail en échange d'un salaire saura-t-il combler ce vide, cet énorme cratère qui est la demande d'amour ? Il est légitime d'avoir envie de faire l'expérience mais je suis persuadée, et cela me rend très triste, qu'un jour, nombreuses sont celles parmi toutes ces personnes qui ont revendiqué un acte sexuel qui se rendront compte que ce n'est pas ce qu'elles voulaient vraiment. Ou seulement.

Un peu d'affection...

Si cet article vous donne envie de faire quelque chose pour une personne handicapée mais vous ne savez pas quoi, je vais vous le dire parce que c'est d'une simplicité étonnante. Pas besoin de s'habiller en mère Teresa ou en Jeanne d'Arc, pas besoin de devenir le porte-parole des causes perdues, pas besoin d'aider physiquement, pas besoin de prendre son cheval blanc à la recherche des « handicapés » en détresse. C'est facile : juste les considérer, nous considérer, comme ce que nous sommes des personnes avant d'être des personnes handicapées. Les a priori sont lourds, la pensée collective tellement ancrée. Mais passer outre le trouble que la différence peut provoquer, tel est le début de l'affection.

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