Handicap.fr : En pratique, à quoi ressemble l'assistance ou l'accompagnement sexuel ?
Marcel Nuss : Chaque séance dure en moyenne 90 minutes et peut avoir lieu au domicile ou au sein d'un établissement. Du fait de sa longueur, elle ne doit pas être confondue avec une passe. Les personnes qui ont fait le choix d'assister doivent faire preuve d'une réelle sensibilité. Ce sont parfois des prostituées spécialement formées à cette prise en charge ou bien des volontaires, professionnels issus du secteur médical ou paramédical (kiné, psychologues, infirmiers...). Les postulants assurent entre 3 et 4 séances par mois.
H : Ces personnes sont-elles rémunérées ?
MN : C'est justement là qu'il y a un problème, notamment avec le NID (Mouvement pour l'abolition de la prostitution). Pour l'instant, puisqu'il est encore illégal en France, l'accompagnement sexuel est pratiqué par charité ou par compassion, avec tous les risques pénaux que cela suppose. Mais nous partons du principe qu'il y a une vraie formation et que cela doit donc être considéré comme un vrai travail. Il ne s'agit pas, vulgairement parlant, de faire une branlette mais de mettre en place un contexte spécifique avec un vrai protocole. L'accompagnement repose sur la réappropriation et la réincarnation du corps de la personne handicapée, ce qui nécessite la mise en place d'une ambiance adaptée, beaucoup de massages, et éventuellement une masturbation ou un acte total. La seule chose qui n'est pas donnée, ce sont les baisers, à cause de la connotation trop sentimentale. Derrière un baiser, il y a forcément un sentiment amoureux et il faut éviter de créer ce type de confusion. Cela étant, 80 % de l'accompagnement porte sur l'affectif. Ce n'est pas seulement une question de sexe, nous abordons la globalité de la problématique. Je tiens également à préciser que cet accompagnement est réservé aux personnes majeures.
H : La demande vient-elle plutôt des hommes ou des femmes ?
MN : Globalement plutôt des hommes. C'est un désir revendiqué. Hommes et femmes n'attendent pas la même chose. L'homme veut jouir tandis que la femme a besoin de tout un contexte, de plus de sensualité. Dans le groupe d'accompagnants formé à Genève, il y avait plus d'hommes que de femmes.
H : L'accompagnement sexuel est-il destiné également aux personnes handicapées mentales ?
MN : La problématique n'est pas la même car une personne handicapée mentale est capable de se masturber mais ne sait pas toujours comment faire. Dans ce cas, l'accompagnement sexuel vise à leur apprendre à « apprivoiser » leur corps pour les rendre ensuite autonomes. C'est important car on constate que derrière l'agressivité de beaucoup d'entre eux, il y a une grande frustration sexuelle. Répondre à cette frustration permet de tempérer ou de faire disparaître leur violence. L'accès à la sexualité peut agir comme une vraie thérapie.