Elève exclu d'Ulis : un référé en justice lui donne raison

Le maintien de Dan, 17 ans, autiste, en Ulis collège est refusé et sa nouvelle orientation MDPH ne lui convient pas. Sa famille décide de faire un référé auprès du tribunal judiciaire et obtient gain de cause grâce à cette procédure d'urgence.

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Dan*, un jeune Parisien autiste a été orienté en Ulis (Unité localisée pour l'inclusion scolaire) Collège pour l'année 2021-2022, en équivalent de troisième. En cours d'année, il doit souvent s'absenter pour des raisons de santé et suit donc une scolarité très partielle. L'année suivante, alors qu'il a 17 ans, ses parents demandent son maintien (redoublement) au directeur de son collège, qui le refuse implicitement. « 'Il faudrait envisager autre chose pour l'année prochaine', leur dit-on. Les parents ont formulé plusieurs demandes par oral et par mail sans recevoir aucune réponse officielle par écrit », explique maître Caroline Pierrey, avocate au Barreau de Paris, en charge de ce dossier.

Une orientation contestée

La famille a, plusieurs mois auparavant, déposé un dossier MDPH pour réclamer cette orientation en Ulis Collège pour 2022-2023. L'été approche et toujours pas de réponse explicite. Le 7 juillet, ils reçoivent une décision mentionnant une orientation dans un dispositif d'accompagnement au projet professionnel. Dédié aux jeunes en situation de handicap, il est proposé au sein d'un lycée public parisien pour permettre, durant un an, une insertion en milieu ordinaire via des stages en entreprises qui, selon la famille, « ne comportent que des taches peu qualifiées : combler des rayonnages et autres activités basiques ».

De grandes compétences

Les parents s'y opposent au motif que, même si Dan a de grandes difficultés dans certains domaines, il a d'énormes capacités dans d'autres, notamment en maths, en géographie -il connait toutes les capitales du monde-. Ils estiment donc que ce projet n'est pas à la hauteur de ses compétences et réclament plus de coopération de la part de l'école ordinaire. Mais, avec la direction le dialogue est verrouillé. Rien n'y fait. « Le blocage ne venait pas de la MDPH mais elle était l'un des recours possibles, précise maître Pierrey. Nous aurions pu attaquer le collège en direct mais ce n'est pas la stratégie que nous avons choisie. Trop long, trop compliqué. »

Un RAPO, trop long !

Immédiatement, la famille décide donc de faire un RAPO (recours administratif préalable obligatoire). Le hic, c'est que la MDPH a deux mois pour répondre, compromettant, de fait, la rentrée du jeune homme. En cas de refus, impossible de contester la décision avant mi-septembre, auquel il faut ajouter, en cas de procédure juridique, les délais d'audience du tribunal de quelques mois... « En gros, l'année était perdue », déplore l'avocate.

Une action en référé

La famille décide donc d'exercer une action en référé pour obtenir une décision rapide du tribunal, d'autant plus qu'elle permet de ne pas attendre l'écoulement du délai de deux mois après le RAPO, comme le veut la procédure « classique ». Un référé, c'est quoi ? « Une procédure judiciaire d'urgence qui permet, dans le respect du débat contradictoire, où chaque partie est en mesure d'exposer son point de vue et de discuter des preuves, faits, arguments liés à l'affaire concernée, de prendre des mesures provisoires et rapides pour régler un litige », détaille le site service-public.fr.

Selon maître Pierrey, de nombreux « référés » sont engagés devant le tribunal administratif (les référés liberté par exemple) mais elle dit n'avoir jamais entendu parler de ce type d'action devant le Pôle social du tribunal judiciaire. « Il est néanmoins difficile de le savoir car les ordonnances de référés sont rarement publiées, explique-t-elle. Je me suis dit, c'est peut-être l'occasion ». Le 5 août, la famille fait une « assignation » (dépôt de dossier). Le juge abonde dans son sens considérant qu'il y a en effet urgence et que la situation évoquée entre bien dans le champ du référé.

Une décision en 3 semaines

L'audience est fixée au 31 août. Dès le lendemain, la nouvelle tombe. Bonne ! Dan obtient gain de cause. « Un résultat en trois semaines et a fortiori au mois d'août, c'est super rapide », se félicite l'avocate. Le juge ordonne à la MDPH de notifier une décision d'orientation vers l'Ulis Collège pour l'année 2022-2023. De son côté, à la vue du jugement, le collège décide de réadmettre Dan qui peut ainsi faire sa rentrée à temps. « Dan était ravi et son enseignant aussi, poursuit-elle. C'était surtout au niveau de la direction que ça coinçait car elle considérait qu'il avait fait son temps dans ce dispositif Ulis où les places sont chères. »

Pour d'autres familles ?

L'avocate juge cette décision, « sans doute une première », « très encourageante ». « Ce référé (RG 22/02162 du 1er septembre 2022 du Tribunal judiciaire de Paris) pourrait en effet être invoqué lorsque des familles n'obtiennent pas la notification espérée peu de temps avant la rentrée », poursuit-elle. Un bémol, cependant : il s'agit d'une décision propre au tribunal judiciaire de Paris qui n'a donc pas la même portée qu'un arrêt de cassation qui fait jurisprudence  « Néanmoins, des parents, dans d'autres régions, peuvent la produire. L'avantage, c'est que ce référé a été rendu à Paris et, même si ce tribunal n'est pas au-dessus des autres, on sait que ses décisions ont un certain rayonnement. C'est une réalité dans le monde judiciaire. », conclut l'avocate.


* Le prénom a été modifié.

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