Un prix littéraire décerné par des patients en psychiatrie ? C'est le concept du Folire, unique en France, dont la douzième édition s'est tenue le 26 juillet 2024, dans l'amphithéâtre du Centre hospitalier de Thuir, près de Perpignan (Occitanie). Organisé conjointement par ce dernier et le Centre méditerranéen de littérature (CML), il poursuit un objectif principal : déstigmatiser la psychiatrie.
Un « drôle » de portrait de notre société
Cette année, face à ses deux concurrents Du temps de ma splendeur d'Aurélie Djian et Mourir avant que d'apparaître de Rémi David, c'est La robe de Jérôme de Verdière qui fait l'unanimité – un portrait de notre société décrit avec un humour mordant. « Et largement ! », s'enthousiasme Françoise Claverie, présidente du CML. « Le livre est léger, drôle et très rythmé. Je pense que les lecteurs l'ont choisi parce qu'il leur a permis de s'évader et de rire. En tant que patients, c'est souvent un critère important. »
La culture comme outil thérapeutique
Car, au-delà d'un concours, le prix Folire se veut un véritable outil thérapeutique. Les patients, accompagnés de soignants, sont engagés dans le projet dès le début : parmi tous les livres envoyés par les maisons d'édition, un comité de sélection se réunit pour choisir trois finalistes. Puis les ouvrages sont remis aux participants, qui travaillent et échangent dessus pendant les activités thérapeutiques, sur le principe de l'art thérapie. « Ils ont des avis très tranchés, qui mènent à des discussions vraiment riches. On a trop souvent tendance à leur coller une étiquette, et ces débats sont une belle preuve de leur capacité et de leur esprit critique », affirme Fabienne Guichard, directrice du centre hospitalier.
Les bienfaits de la culture auprès des patients sont d'ailleurs bien connus, puisqu'elle est de plus en plus présente au sein des établissements psychiatriques. Même si des freins demeurent, comme les « limites financières et humaines », avec des besoins en soins « de plus en plus importants ».
Le prix Folire, un espace de rencontres
Cette année, ils étaient 128 patients et soignants à voter, soit vingt groupes de lecture, répartis sur huit établissements : cinq centres hospitaliers, une maison d'accueil spécialisée et deux EHPAD. En février dernier, des rencontres littéraires ont été organisées avec les trois auteurs. Une volonté de favoriser l'échange qui s'est également illustrée avec la cérémonie du 26 juillet, animée par Françoise Claverie, puisque les personnes ont rencontré Jérôme de Verdière lors d'un temps d'échange collectif. Puis lors de temps individuels pendant les dédicaces, ponctuées de la remise du prix par le parrain de l'édition – Pierre Micheletti, docteur, écrivain et membre de la CNCDH – et de son discours, d'un goûter et du concert d'un violoncelliste. « La cérémonie est toujours très forte en émotions. Tout le monde était ravi d'être là, s'émeut Fabienne Guichard. Et les patients attendent déjà la prochaine avec impatience. »
© CH de Thuir