L'Assemblée nationale a adopté le 17 mai 2018 une proposition de loi MoDem qui doit permettre aux personnes de plus de 75 ans de bénéficier de la prestation de compensation du handicap, une « véritable avancée » selon le gouvernement. Le texte, porté par le député Philippe Berta dans le cadre d'une niche parlementaire du groupe, supprime la barrière d'âge de 75 ans au-delà de laquelle il n'était plus possible d'accéder à cette Prestation de compensation du handicap (PCH). Cette aide financière est versée par les départements pour certaines dépenses comme l'aménagement du logement. La suppression de la barrière d'âge, qui devrait concerner moins de 10 000 personnes, représentera un coût de 69 millions d'euros par an pour les départements. Attention, elle ne concernerait que celles qui sont en mesure de justifier, certificats médicaux à l'appui, que leur handicap est apparu avant l'âge de 60 ans (ou à celui de départ à la retraite) ; dans le cas contraire, elles ne peuvent prétendre à la PCH mais uniquement à l'APA (Allocation personnalisée d'autonomie) dédiée aux personnes âgées.
Fonds de compensation
La proposition, votée à main levée en première lecture, prévoit aussi une expérimentation sur trois ans (avec un point d'étape après un an) dans des départements volontaires afin de limiter le reste à charge lors de l'achat, par exemple, d'un fauteuil roulant. Il s'agit de sortir d'une « impasse juridique », selon M. Berta, la loi de 2005 qui prévoyait que le reste à charge soit limité à 10% du revenu net de la personne handicapée, le décret d'application n'ayant toujours pas été pris. « Plus de 13 ans après la grande loi de 2005, il nous est apparu urgent d'agir et de proposer des réponses concrètes pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap », a affirmé l'élu du Gard, présentant sa proposition comme « une première avancée ».
Encore de grands chantiers
La secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées Sophie Cluzel a dit soutenir « sans réserves cette proposition » qui « n'épuise pas les travaux que le gouvernement souhaite engager sur la compensation du handicap ». Elle a salué « une véritable avancée » avec la suppression de la barrière d'âge, et indiqué que « plusieurs départements avaient fait part de leur intérêt » pour l'expérimentation. Le texte a obtenu le soutien de tous les groupes, même si des élus de divers bords ont exprimé des bémols et mis en exergue, à l'instar d'Ericka Bareigts (Nouvelle Gauche), les « grands chantiers qui restent à traiter ».
Une asso conteste
Les dents grincent malgré tout dans certaines associations (article complet en lien ci-dessous). Handi-social, par exemple, se dit favorable à l'article 1 sur la barrière d'âge même si elle la considère comme une « micro mesure », le vrai combat étant, selon elle, de faire tomber la barrière d'âge de 60 ans pour permettre à toute personne confrontée à un handicap de percevoir cette prestation, quel que soit son âge. Elle est nettement plus arqueboutée sur l'article 2, qui « contrairement à ce que dit monsieur Berta » est un « recul majeur ». Elle conteste le fait de tester ce dispositif sur trois départements (seulement ?) : « Il n'est pas admissible de vouloir expérimenter une loi votée il y a 13 ans sur un territoire limité », s'indigne sa présidente, Odile Maurin. Elle juge également inacceptable la notion énoncée dans le texte : « dans la limite des financements de ce fonds ». Selon elle, « si les choses sont faites avec le budget actuel, il devient impossible de respecter cette condition de 10 % des ressources nettes de la personne comme reste à charge maximum ». « Cela revient à remplacer l'article de loi tel qu'il était prévu par la loi de 2005 par un autre », poursuit-elle. Elle cosigne une lettre ouverte adressée par un collectif de cinq associations aux 577 députés le 11 mai afin de les alerter sur ce sujet, estimant qu'il n'est plus temps d'« expérimenter » mais de « faire appliquer la loi ».
Cette proposition doit maintenant être discutée au Sénat. Sera-t-elle plébiscitée en l'état ?