Percujam à l'Olympia : jeunes autistes et bêtes de scène !

De jeunes autistes ont fait vibrer les 1 800 spectateurs de l'Olympia. C'est l'effet Percujam qui met le feu aux plus grandes salles. Conversation au diapason avec Laurent Milhem, musico et chef de service à Alternote.

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Handicap.fr : Le 4 avril 2016, Percujam faisait un tabac à l'Olympia ; pas trop le trac les artistes ?
Laurent Milhem : Ça dépend de chacun mais les jeunes ont souvent moins le stress que les éducateurs qui les entourent. Ils ont moins de « filtres », sont plus authentiques. Si certains avaient déjà joué un morceau à l'Olympia au début de cette aventure, là c'était un peu différent : Percujam en tête d'affiche et en lettres de feu sur la façade de cette salle mythique !

H.fr : C'était une soirée privée, avec seulement des invités ?
LM : Bien sûr que non. Ce concert avait bénéficié d'un très fort battage médiatique et le public était au rendez-vous. Percujam est produit par Alexandra Lederman (fille de Paul, producteur de Claude François). Elle a senti le potentiel de ce groupe !

H.fr : Le concert était précédé d'un documentaire qui permettait de découvrir le groupe. Certains jeunes ont des troubles autistiques ou psychotiques assez sévères mais, dès qu'ils montent sur scène, ils font preuve d'une formidable assurance…
LM : Oui et, pourtant, ils ont tous un handicap supérieur à 80%. Certains reviennent de loin et avaient mis en place des troubles sévères qu'au fil du temps ils ont fini par lâcher. Lorsqu'ils sont arrivés, nous leur avons dit « Il va falloir que vous grandissiez pour faire de la scène » ; ils se sont vraiment sociabilisés et ont réussi à adopter les comportements adaptés qui leur permettent d'assurer.

H.fr : Mais c'est tout de même un tour de force car les personnes autistes sont souvent très ritualisées alors qu'elles mènent avec Percujam une vraie vie de bohème…
LM : Oui mais nous avons donné à tous ces jeunes la faculté de pouvoir s'adapter même si, il ne faut pas se leurrer, ils auront besoin toute leur vie d'être pris en charge. Cette expérience a permis une véritable éclosion et a aussi changé le regard que leurs parents portaient sur eux.

H.fr : Au point que l'on se demande « C'est lesquels les autistes ? ».
LM : Comme c'était une question qu'on nous posait sans cesse, c'est le nom que nous avons donné à notre premier album (NDLR : Percujam a enregistré trois albums, dont le dernier « Nouveau rêve »). Parfois les gens viennent pour la « bonne cause » et ressortent avec la larme à l'œil et un milliard de questions auxquelles on ne peut pas répondre. C'est ça la force de Percujam.

H.fr : Comment est née cette aventure ?
LM : A la base, c'était un petit atelier musical proposé dans un IME. J'avais repéré trois jeunes autistes qui avaient des aptitudes pour la musique, et notamment un, qui, depuis, a quitté le groupe. Je remarquais que, chaque fois que je fredonnais une chanson, il était capable de la reprendre au piano. Percujam est né de cette alchimie très forte. Et puis a contaminé d'autres jeunes et d'autres éduc…

H.fr : Mais de là à créer un groupe qui a déjà fait deux Zénith et un Olympia…
LM : Oui, il a même participé à un festival pour l'Unapei au parc de La Villette avec M, devant 20 000 spectateurs ! Il est certain que cela ne s'est pas fait du jour au lendemain ; des années de travail ont permis d'arriver à ce résultat que les gens disent bluffant. Comme le projet initial prenait corps et que les jeunes grandissaient, nous nous sommes dits, notamment avec madame Allier, à l'origine de cette belle aventure, plutôt que de les envoyer dans d'autres institutions spécialisées pourquoi ne pas leur proposer un lieu de vie où ils pourraient faire ce qu'ils aiment, c'est-à-dire de la musique. C'est ainsi qu'est né, en 2009, Alternote, à Antony (92). C'est un FAM (foyer d'accueil médicalisé) qui accueille 8 jeunes dont 7 en internat. Il est unique en France et dispose même d'un studio de répétition.

H.fr : Mais, à partir de là, vous avez dû tout de même vous professionnaliser ?
LM : Disons que les éducateurs étaient tous des autodidactes et qu'il a fallu faire appel à des musiciens plus pédagogues qui sont, à leur tour, devenus éduc spé. Mais nous ne faisons pas de « musicothérapie ». Ce sont des jeunes qui n'aiment a priori pas grand-chose alors on a misé sur ce qu'ils aimaient le plus, la musique.

H.fr : Quel est votre prochain grand rendez-vous ?
LM : Nous faisons en moyenne deux concerts par mois, ou trois dès le printemps, dans toute la France, parfois même à l'étranger. Notre prochain grand rendez-vous c'est le festival du Futur composé, le 30 juin 2016, au théâtre Monfort, à Paris (15). Ce festival culturel permet la rencontre entre des artistes professionnels et amateurs intervenant dans des institutions spécialisées dans la prise en charge des personnes autistes (lien ci-dessous). Percujam se produira aux côtés de Grand corps malade, dont nous avons déjà fait la première partie…

© Photos portfolio Facebook : Images NB : Anne-Charlotte Compan. Images couleur : Emmanuelle Dal'Secco.

Illustration article Percujam à l'Olympia : jeunes autistes et bêtes de scène !
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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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