Handicap et pesticide : le combat d'une mère

Comment le fait de pulvériser un désherbant alors que Sabine était enceinte a-t-il pu engendrer de telles déformations chez son enfant ? Depuis un an, cette maman alerte le gouvernement. Sans réponse pour le moment !

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On se souvient tous d'Erin Brokovitch, incarnée à l'écran par la pétillante Julia Roberts. Cette Américaine a mené une lutte acharnée contre un groupe industriel suspecté de polluer les eaux autour de son usine, au mépris de la santé des riverains qui furent en grand nombre touchés par de graves maladies. Sabine reprend à sa façon le flambeau de ces femmes militantes. Sabine s'appelle aussi Grataloup. Cette mère engagée mène un âpre combat pour son fils, Théo. Elle alerte le gouvernement pour l'inciter à mener des études sur les désherbants à base de glyphosate, les plus vendus au monde. Qui contaminent par ailleurs déjà 50% des rivières françaises...

30 anesthésies depuis sa naissance

Théo, qui a aujourd'hui trois ans, est né avec de graves malformations de l'œsophage et du larynx qui ont nécessité une trachéotomie (un trou à la base du cou) dès sa naissance pour l'aider à respirer et qui l'empêche aujourd'hui de parler. Il a, depuis, subi une trentaine d'anesthésies générales pour la reconstruction de son œsophage, de l'entrée de son estomac, de son larynx... Malgré plusieurs séjours à l'hôpital de Lausanne (Suisse), où se trouve un des meilleurs spécialistes mondiaux de la reconstruction du larynx chez l'enfant, il ne peut toujours pas respirer normalement. On recense environ 200 cas d'atrésie de l'œsophage par an en France : une maladie orpheline avec trop peu de cas pour motiver le financement de la recherche !

Un désherbant en cause ?

Une question est donc posée : ces graves malformations seraient-elles dues à la manipulation d'un désherbant lors des trois premières semaines de sa grossesse ? Sabine avait alors pulvérisé un herbicide à base de glyphosate sur une carrière d'équitation, soit plus de 700 m², sans aucune protection particulière puisque rien n'indiquait sur le bidon qu'il fallait en prendre, ignorant par ailleurs qu'elle était enceinte, de seulement trois semaines. Malheureusement, les malformations de l'œsophage et du larynx interviennent à la quatrième. Il était donc déjà trop tard...

Des recherches convergentes

Quelques études semblent converger vers l'implication de ce type de produit. C'est notamment le cas d'une équipe néerlandaise qui a envoyé un questionnaire à des familles touchées par cette maladie. Le seul point commun à tous ces cas était l'exposition aux désherbants ! De son côté, Eric Seralini, professeur de biologie moléculaire à l'Université de Caen, a démontré la toxicité des désherbants à base de glyphosate, les plus vendus au monde, sur les cellules du placenta humain. « A la naissance, Théo ne pouvait pas respirer seul, explique Sabine, car ses poumons communiquaient avec son estomac. Il ne doit sa survie qu'à une prise en charge dans un grand hôpital de Lyon. Dans les pays où le système de santé est moins performant, les enfants ne survivent pas un quart d'heure. Ils sont comptabilisés mort-nés et n'entrent pas dans les statistiques. Pas d'autopsie, pas de témoin ! ». D'autres familles touchées par l'atrésie de l'œsophage ont contacté Sabine pour lui confirmer qu'elles aussi ont eu une très forte exposition aux désherbants, en particulier celles qui vivent dans des régions viticoles.

Le  glyphosate : danger avéré !

C'est surtout une grande étude scientifique publiée en août 2010 dans la revue américaine Nature qui a confirmé la conviction grandissante que l'herbicide chimique le plus utilisé dans le monde, à base de glyphosate, est un danger pour la reproduction des vertébrés. Ce programme de recherche, effectué par une équipe multinationale dirigée par le professeur Carrasco, directeur du Laboratoire d'embryologie moléculaire à la faculté de médecine de l'université de Buenos Aires, présente la démonstration alarmante qu'à des concentrations de loin plus faibles que celles utilisées dans l'agriculture, le roundup est lié à des anomalies congénitales chez deux sortes de vertébrés, les amphibiens et les poulets. Les implications sont énormes pour la santé des populations exposées à ces pesticides.

Gouvernement : silence radio !

Il est démontré que 50% des rivières françaises sont déjà contaminées par cette molécule, c'est donc toute la population qui semble menacée. Face à cette menace potentielle sur la santé publique, Sabine décide donc de tirer le signal d'alarme. Par une lettre datée d'octobre 2009, elle alerte différents membres du gouvernement (Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jean Louis Borloo, Bruno Lemaire et Roselyne Bachelot) et leur demande de diligenter les études nécessaires, auprès de scientifiques compétents et indépendants. Elle reçoit un bref accusé de réception lui précisant que c'est Roselyne Bachelot qui est concernée par ce dossier. Et pourtant aucune réponse du Ministère de la Santé depuis un an ! A l'époque, la ministre est préoccupée par un fléau bien plus menaçant : la pandémie de grippe A ! Face à ce manque de réactivité, la famille Grataloup décide d'en appeler aux médias, en comptant peut-être sur le témoignage d'autres femmes... En novembre 2010, Marie Claire, le premier magazine mensuel féminin, consacre un dossier aux dangers des pesticides et évoque le cas de Théo500 000 lectrices et peut-être une large tribune qui permettra d'ouvrir enfin le débat !

Pour tout complément d'informations, contactez Sabine et Thomas Grataloup - maman@theo.sg

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