Près de Bordeaux, la 'maison de vie' de quatre traumatisés crâniens

Dominique, Roland, Marc et Michel, rescapés d'un grave accident qui leur a laissé un traumatisme crânien, ont retrouvé un vrai 'chez eux' à Bègles, une maison adaptée à leur handicap qu'ils louent dans le cadre d'une expérience pilote...

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Begles (Gironde), 29 sept 2004
Par Frédéric JEAMMES

"C'est devenu notre maison", explique Michel, 43 ans, le plus jeune de ces quatre hommes, pour la plupart grièvement blessés dans des accidents de la route, et qui sont depuis lors incapables de vivre seuls.
Une "maîtresse de maison", Nathalie, 29 ans, qui bénéficie d'un appartement sur place, reste à domicile 24 heures sur 24, pour les aider. Soutenue par une aide-ménagère, trois aides à domicile et un veilleur de nuit, la jeune femme s'occupe de tout, du petit-déjeuner au dîner, en passant par la prise des médicaments.
La "maison de vie" de Bègles évite ainsi à ses colocataires de se retrouver dans des grandes structures médicalisées ou de revenir dans leurs familles, souvent dépassées par le poids de leurs handicaps et leurs fréquents troubles du comportement: agressivité, violence...
La villa blanche aux volets marrons, située dans un quartier résidentiel, fait partie d'un projet lancé en 1998 par deux associations locales, l'ADPAT et l'AFTP, bénéficiant maintenant du soutien financier de la Fondation MAAF Assurances.
Dix maisons de ce type existent aujourd'hui à Bordeaux et dans sa banlieue, toutes louées par des traumatisés crâniens, à raison de quatre personnes par habitation. Les deux dernières, construites par la fondation, ont été inaugurées lundi.
"Après l'accident, j'étais devenu une épave: je ne pouvais plus supporter le regard de ma femme sur moi et c'était dévalorisant par rapport à mes enfants", raconte Roland, 57 ans, pour expliquer sa venue à Bègles il y a deux ans.


"le regard de l'autre"


"Ici, il n'y a pas de jugement entre nous", résume cet ancien fonctionnaire, brisé il y a dix ans par un accident cérébral. Comme ses trois colocataires, Roland souligne l'avantage de vivre entre "blessés", comme ils préfèrent s'appeler, pour ne pas avoir à supporter "le regard de l'autre".
"Ce regard nous fait revenir sur ce passé qu'on rejette, alors qu'on essaie de tourner la page", relève Dominique, 51 ans, un ancien ingénieur qui a "tout perdu, son entourage et son cercle d'amis", à 26 ans, après son accident de la route.
Contrairement à Roland et Michel, qui semblent moins affectés physiquement, Dominique peine beaucoup à parler, même si son esprit reste vif. Quant à Alain, le quatrième résidant, il n'a jamais retrouvé l'usage de la parole.
Tous ont des troubles de la mémoire ou des difficultés d'orientation, rendant leur réinsertion professionnelle impossible.
"Ils ne peuvent pas vivre seuls, comme se faire à manger", souligne Nathalie, formée par l'association bordelaise "Traumatisés crâniens assistance" (TCA), en charge du personnel des maisons de vie.
Si les repas sont pris en commun, les quatre résidants bénéficient chacun d'une chambre individuelle et peuvent accueillir des membres de leurs familles ou des amis.
Aucun d'entre eux ne souhaite quitter cette maison qu'ils ont ornée d'un panneau sur lequel est peint le nom qu'ils lui ont donné: "Do-mi-si-la-do-ré".

fj/hg/Glk.

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