David Blunkett, le ministre qui a réussi à faire oublier sa cécité
par Olivier LUCAZEAU
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LONDRES, 29 nov (AFP) - Aveugle de naissance et donc obligé de se faire traduire tous les documents en braille, né au sein d'une famille très pauvre de Sheffield (centre de
l'Angleterre), rapidement privé de son père mort dans un accident du travail, David Blunkett ne disposait d'aucun des atouts nécessaires pour sortir d'un destin de misère a priori inéluctable.
A 57 ans, et malgré un franc-parler légendaire qui ne lui a pas fait que des amis dans les rangs travaillistes, ce fils d'ouvrier est pourtant devenu incontournable au sein du gouvernement New Labour de Tony Blair. Certains observateurs politiques voyant même en lui un Premier ministre potentiel.
Une certitude: personne ne pense plus à mentionner son handicap physique, que lui-même avait qualifié avec dédain de banal "inconvénient". "Je vois ce que vous voulez dire" ou bien "vous m'avez ouvert les yeux" comptent d'ailleurs parmi les réparties favorites de ce barbu intarissable, enseignant de formation.
Refusant comme par bravade de céder au politiquement correct, David Blunkett est devenu en fait un atout maître dans le jeu du Premier ministre travailliste par ce bon sens populaire dont il sait user et parfois abuser. Au point d'échapper aux critiques des tabloïdes les plus 'poujadistes' comme le Daily Mail, le Daily Express ou le Sun.
Incapable de voir autre chose que d'aimables "farfelus" dans ceux qui le critiquent pour des lois antiterroristes liberticides, le ministre de l'Intérieur ne craint jamais de choquer.
Méthodiste au discours tranché, socialement conservateur malgré des premiers pas politiques à Sheffield au sein de ce qui était alors connu comme "la république socialiste du South Yorkshire", David Blunkett n'a par exemple
pas hésiter à supprimer les bons d'alimentation pour les demandeurs d'asile, dès son arrivée au Home Office en 2001. Enjoignant brutalement les immigrés afghans ou kosovars de "rentrer chez eux" pour aider à la reconstruction de leur pays.
Très secret sur sa vie privée depuis son divorce en 1990 de sa femme Ruth, dont il avait eu trois fils, il porte toujours son alliance de mariage. Une façon d'écarter les prétendantes, expliquait-il avec humour en 2001, précisant vouloir se concentrer sur son travail de ministre: "c'est un moyen utile de m'assurer que les gens ne croient pas par inadvertance que je suis disponible".
C'est pourtant sa vie personnelle, et cette liaison aujourd'hui terminée avec Kimberly Quinn, directrice du magazine Spectator, qui menace une carrière politique jusque là irréprochable.
Membre du conseil municipal de Sheffield à 22 ans, député à 40 ans, à la tête de la circonscription de Sheffield-Brightside, David Blunkett avait jusque là franchi toutes les étapes sans encombre, jusqu'au gouvernement.
Comme ministre de l'Education d'abord, à partir de 1997, puis au Home Office. Flanqué en permanence de sa fidèle chienne-guide, Lucy jusqu'en 2003, Sadie depuis.
Une Lucy qui avait fait les délices des analystes politiques après avoir vomi sur la moquette de la chambre des Communes lors de l'intervention de l'alter ego conservateur de son maître: c'était sa façon d'exprimer son opinion sur les discours des "tories", avait-il expliqué.
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