Les sourds et malentendants veulent pouvoir téléphoner
Par Martine VERON
PARIS, 30 mars 2007 (AFP) -
[BC][EC]Pour Jérémie Boroy, président de l'Union nationale pour l'insertion sociale des déficients auditifs (Unisda), "le téléphone est aujourd'hui un outil indispensable à tous. Pour les sourds, ne pas pouvoir téléphoner est un vrai handicap".
L'Unisda, qui a fait de l'accès au téléphone et aux programmes télévisés ses priorités, a invité les candidats à la présidentielle cette semaine à Paris à tester des dispositifs expérimentaux de "centres-relais". Les représentants de Ségolène Royal (PS) et François Bayrou (UDF) se sont déplacés.
[BC][EC]"Dans certains pays, comme les Etats-Unis, la Suède, il est normal de voir des sourds avocats ou responsables en entreprise", affirme Jérémie Boroy, "dans les pays où les centres-relais marchent, la place des sourds a changé radicalement".
SMS, courrier électronique, messageries instantanées, les sourds ont recours à ces palliatifs, mais cela ne remplace pas la conversation directe au téléphone. Dans beaucoup de situations, communications avec la famille, les services publics, les commerces, ou pour appeler en urgence, les sourds ne sont pas autonomes.
Beaucoup d'employeurs par ailleurs sont encore réticents à embaucher une personne sourde, même qualifiée, du fait de ses difficultés à se servir du téléphone.
Le dispositif de "centre-relais" est au point: par écrit sur le clavier d'un ordinateur, ou en langue des signes par webcamera, la personne sourde contacte un centre-relais où un traducteur prend en charge l'appel, contacte en temps réel le correspondant, lui explique qu'il s'agit d'un appel d'une personne sourde et traduit simultanément la conversation.
Mais son financement reste à définir, l'Unisda estimant essentiel que l'implantation soit générale sur tout le territoire et accessible à tous.
L'exemple des Etats-Unis est avancé, où une taxe est prélevée sur la facture des abonnés au téléphone, autour de 2 dollars par an, précise Jérémie Boroy, qui reconnaît cependant qu'il faut une "volonté politique" forte pour aboutir et convaincre les opérateurs de téléphonie.
"L'idée est intéressante, mais c'est compliqué au niveau du financement, de l'harmonisation des normes, il faut que les pouvoirs publics s'engagent", a réagi Jean-Marie Danjou, délégué général de l'Association française des opérateurs mobiles (Afom), après avoir testé le dispositif.
La loi Handicap de février 2005 a franchi un premier pas, en instituant une obligation de mise en accessibilité des services téléphoniques d'urgence et de communication publique, mais son application reste à définir.
L'Unisdat souhaite que la France généralise cette obligation, à l'image de l'"Americain with Disabilities Act" (ADA) votée aux Etats-Unis en 1990.
Le public concerné représente quelque 500.000 personnes, dont le handicap, souligne l'Unisdat, souffre "d'invisibilité".
Selon Websourd, société dédiée aux techniques d'accès à la communication des sourds, l'illettrisme concerne 60 à 80% de cette population et un sourd sur deux en âge de travailler est au chômage.
Quelque 150.000 sourds et autant d'entendants (amis, famille ...) pratiquent la langue des signes, dont l'usage tend à augmenter régulièrement.
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