SOS Emploi !

Jérôme Jankowiak a 25 ans. IMC, avec de gros problèmes d'élocution, il a néanmoins mené ses études tambour-battant. Aujourd'hui il recherche un emploi à la hauteur de ses compétences. Mais, de son propre aveu : c'est pas gagné !

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Portrait

On le prend parfois pour un handicap mental. Triste méprise chez les personnes IMC qui présentent des troubles de l'élocution. Et pourtant, son cerveau est intact. Jérôme Jankowiak l'a prouvé : un BAC ES, une licence de sciences humaines et un master en sciences de l'information et du document. Blindé le garçon ! Sur le CV, rien à redire mais dans la vraie vie... Oui, Jérôme parle avec difficulté. Oui, il a des problèmes pour marcher. Oui, il est un handicapé ! Un de plus, qui doit, comme tous ses compères, multiplier les efforts pour se faire une place sur le marché du travail. « La façon dont je me déplace et dont je m'exprime renvoie une mauvaise image de moi. J'ai fait des stages pendant ma scolarité mais pour ce qui est d'un emploi, je dois vraiment, plus que tout autre, faire mes preuves. C'est comme être sur un ring de boxe sans pouvoir baisser la garde ! »

Aller contre les préjugés

L'intégration, à tout prix, Jérôme ne jure que par çà. Même au lycée lorsqu'on lui propose un emploi du temps adapté, il crie haut et fort : « Laissez-moi essayer d'être comme tout le monde ! » « C'était dur, explique-t-il ! Surtout lorsque vous ne savez pas écrire et que, du jour au lendemain (après les années collège dans un établissement spécialisé), vous n'avez plus de secrétaire pour prendre vos notes. J'ai donc repiqué ma seconde. Mais, en 1999, j'ai été l'un des premiers à pouvoir bénéficier d'un AVS (Auxilliaire de vie scolaire). Au lycée, il y avait forcément quelques préjugés. Une mère d'élève qui plaignait les profs car nous étions quatre élèves handicapés dans la classe. Ou encore ce prof de math qui doutait fortement de mes capacité mentales, tout simplement parce que j'étais mauvais dans sa discipline. Mais ca ne m'a pas empêché d'avoir mon Bac du premier coup. »

Privé d'AVS

A la fac, les choses se compliquent. Plus d'AVS, une affaire un peu complexe ! Cet étudiant atypique doit alors se débrouiller seul, avec quelques photocopies ou jongler avec les cours de ses camarades. En Histoire, un copain aveugle prend les cours en braille et les convertit en format texte pour que Jérôme puisse les lire. Entraide inter-handicap ! Puis vient le Master. Deux stages à réaliser et une nouvelle confrontation avec la réalité. Aucune aide dans ses démarches ! Il met un point d'honneur à trouver un stage par lui-même. Par connaissance, il décroche un stage au sein de l'APF (Association des paralysés de France), chargé de réaliser le site internet de la délégation du Nord. Une entrée en douceur dans le monde professionnel. Pour le second, l'affaire commence mal. On lui propose un entretien téléphonique mais le bigophone, c'est pas son fort. Il rate son coup mais se rattrape en envoyant un mail et en expliquant la situation. Il obtient un rendez-vous et défend âprement sa candidature, ce qui lui permet de décrocher un stage en milieu professionnel ordinaire.

Et le permis aussi

Jérôme s'est lancé dans une nouvelle bataille en février : chercher du travail ! Il a vu la pub de l'Aghefip, comme tout le monde. Sympa, drôle. Merci Jamel ! Mais l'accessibilité de leur site n'est pas au point. Il ne sait pas vraiment à qui s'adresser. « Et puis mon problème d'élocution est vraiment un frein. Je suis obligé de rechercher les coordonnées de mes interlocuteurs et je les transmets à la conseillère chargée de l'insertion des étudiants handicapés de mon université, Lille 3, pour qu'elle les appelle. » Pour le moment, ses recherches restent vaines. Il a enfin réussi à déposer son CV sur le site de l'Aghefip. Mais qui dit travail dit permis de conduire. Et pour Jérôme, un obstacle supplémentaire ! « Le plus dur, c'est d'obtenir l'autorisation de la Préfecture, valable seulement deux ans, après visite médicale. Malheureusement le handicap n'est pas connu et encore une fois le fait d'être IMC engendre des préjugés. Mais, ça y est, je l'ai ! ». Permis en cours, diplômes en poche, moral encore au top... Jérôme a tout pour lui. Mais tant reste à faire...
« J'ai envie de dire que ce n'est pas parce que je suis handicapé que je dois accepter le premier boulot qui me passe sous la main. J'ai le droit d'avoir un emploi à la hauteur de mes compétences. » Loi de 2005, Aghefip, égalité des chances... Il entend toutes ces belles promesses mais cet écho reste lointain. Les effets d'annonce, Jérôme s'en méfie : il a perdu son AVS pendant l'année européenne des personnes handicapées ! Alors, pour le moment, à sa manière, il fait entendre sa voix, une voix particulière certes, mais qui révèle tempérament et pugnacité... sur fond de colère !

 

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