500 suppressions de poste dans le secteur adapté !

500 aides aux postes en entreprises adaptées seront supprimées en 2011. La Fegapei tire la sonnette d'alarme sur une situation qui s'aggrave, un véritable non sens budgétaire. Explications de Philippe Calmette, directeur général.

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Handicap.fr : Que-ce qui vous alerte aujourd'hui ?
Philippe Calmette : L'annonce de la suppression, désormais effective, de 500 aides aux postes en entreprises adaptées suite au vote, en décembre 2010, de la loi de Finances 2011. En avril, les associations commencent à recevoir leur notification de réduction de poste, et sont donc contraintes de licencier. 500 emplois sur 20 000 vont donc disparaître...

H : Avant d'aller plus loin sur cette question, quelles sont les missions de la Fegapei ?
PC : La Fegapei, Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées, fédère 500 associations et 4000 établissements, soit plus de la moitié des établissements accueillant des personnes handicapées, adultes comme enfants, en France. Ce qui légitime notre action, ce sont les 230 000 personnes que nous représentons, qui ont des droits, renforcés par la loi de 2005, mais aussi des projets de vie.

H : Vous défendez donc également les droits des travailleurs handicapés accompagnées par les associations gestionnaires ?
PC : Oui, évidemment. Ces établissements et services emploient 140 000 salariés, aussi bien dans des ESAT (ex CAT, 120 000 personnes handicapées) que dans des entreprises adaptées (20 000 personnes handicapées). Nous sommes également impliqués en faveur de l'accès à l'emploi en milieu ordinaire. Certains salariés, après une période de travail en entreprise adaptée, envisagent une insertion en entreprise « ordinaire ». Le travail est un véritable enjeu de « santé » telle qu'elle est définie par l'OMS (Organisation mondiale de la santé). L'accès à l'emploi fait partie de nos priorités.

H : Revenons à ces emplois menacés. Ils sont subventionnés par l'Etat ?
PC : Oui, en partie. Contrairement aux travailleurs des ESAT qui ont un statut d'usager du secteur médico-social, les employés des entreprises adaptées ont le statut de travailleur à part entière, et l'Etat aide les entreprises pour chaque poste alloué.

H : Depuis la crise de 2008, comment évoluent les ressources allouées au secteur ?
PC : La crise financière s'est transformée en crise budgétaire en 2009, puis en crise sociale en 2010. L'évolution des ressources allouées aux politiques du handicap depuis 2010 en est l'illustration. En effet, elles ont évolué très fortement jusqu'en 2009 et, depuis 2010, au prétexte de la situation des finances publiques, elles sont réduites alors que les besoins ne sont pas satisfaits.

H : Mais la coupe franche n'est-elle pas de rigueur dans tous les domaines ?
PC : La décision prise ici est une véritable aberration sur le plan économique. Une personne qui travaille en secteur adapté coûte en effet un peu d'argent à l'Etat mais, en contrepartie, elle consomme, épargne, paye des impôts. Ces dépenses d'Etat sont donc, avant tout, un investissement et pas seulement un coût. Une étude menée par KPMG1 pour l'UNEA2 a très clairement démontré, qu'au final, les ressources, fiscales et sociales générées par l'emploi des personnes travaillant en entreprises adaptées, étaient, pour l'Etat, supérieures aux dépenses engagées. Les indemnités de chômage que les licenciés vont toucher sont supérieures aux aides allouées lorsqu'ils sont en poste. Cette mesure n'aura pas d'autre effet que d'aggraver le déficit public.

H : Mais comment expliquer un tel non sens ?
PC : On demande à la Direction du Budget de réduire les dépenses « visibles » sans prendre en compte l'impact que cela peut avoir sur d'autres budgets ou ressources de l'Etat. En 2010, nous avions déjà bataillé à l'Assemblée nationale pour empêcher cette coupe et demander aux députés de prendre la mesure des conséquences engendrées par de telles décisions.

H : Cette coupe intervient, par ailleurs, au moment où les entreprises adaptées voient leur activité augmenter ?
PC : Oui, et c'est là une autre aberration. Dans le cadre de l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés à hauteur de 6%, les entreprises « ordinaires » ont deux solutions : soit embaucher des travailleurs en situation de handicap, soit sous-traiter, et c'est une option très souvent choisie, avec le secteur protégé, donc les ESAT et les entreprises adaptées. C'est un non sens de devoir réduire le personnel au moment où les carnets de commande se remplissent à nouveau.

H : Vous aviez déjà alerté le gouvernement en octobre 2010 sur cette question. Quelle avait été sa réponse ?
PC : Que nous avions raison. Mais pour arriver à modifier une telle décision, a fortiori en cours d'exercice, il faut remuer ciel et terre. Nous avons d'ailleurs déjà rencontré mesdames Montchamp et Bachelot à plusieurs reprises cette année. Elles comprennent notre point de vue mais il y a encore beaucoup à faire pour que cette « écoute politique » se transforme en décisions concrètes.

H : Nicolas Sarkozy ne vous avait-il pourtant pas fait de grandes promesses ?
PC : Oui, en effet. Notamment lors de la Conférence nationale du handicap en 2008, puis après la crise financière de 2008, la majorité parlementaire a insisté sur le fait que les personnes fragiles et démunies ne feraient pas les frais de la crise, et que l'accès à l'emploi serait une priorité. Pourtant, dans l'ensemble des domaines qui concernent les personnes handicapées, on est en deçà des promesses, notamment sur la création de places en établissements spécialisés. Et sur la question de l'accès à l'emploi, la situation ne s'arrange pas !

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