En première instance, en mai 2012, la compagnie avait été condamnée par le tribunal correctionnel de Paris à 5.000 euros d'amende et à verser 5.000 euros de dommages et intérêts à la passagère et un euro à l'Association des paralysés de France (APF).
Le commandant de bord avait été relaxé, le tribunal ayant estimé qu'après avoir tenté de trouver une solution, il s'était borné "à exécuter la décision de débarquement".
L'affaire remonte au 21 mars 2010. Marie-Patricia Hoarau, 39 ans, qui se déplace en fauteuil roulant depuis un accident de VTT, enregistre et embarque sans encombres dans un avion Paris-Nice. La veille, elle a déjà accompli sans problème le voyage en sens inverse.
Mais dans l'avion, l'équipage lui demande si elle est capable de rejoindre une sortie de secours de manière autonome. Elle répond non. Le personnel lui indique alors qu'elle doit être escortée par un accompagnateur. Sollicité par l'équipage, un pilote qui voyage dans le même avion accepte de s'asseoir à côté de la jeune femme et de jouer le rôle d'accompagnateur.
Le commandant de bord, alerté de l'incident, prend contact avec sa direction, qui refuse cette solution et lui ordonne de débarquer la passagère, au motif que l'accompagnant aurait dû être enregistré au sol. Marie-Patricia Hoarau est donc débarquée.
Elle embarquera un peu plus tard dans un autre avion, avec comme accompagnateur un sexagénaire qui s'est enregistré en même temps qu'elle.
Me Patrick de La Grange, avocat de la plaignante et de l'Association des paralysés de France, a dénoncé une situation qui est "quoi qu'en disent (ses) contradicteurs, l'apanage d'EasyJet".
"On vous débarque comme un vulgaire colis", a plaidé l'avocat, estimant que le stewart avait commis un "excès de zèle".
Dans son réquisitoire, l'avocat général Denys Millet a fustigé le "travestissement de la notion d'autonomie" des passagers handicapés, "qui va conduire EasyJet à tenir un double langage". "L'exigence" d'avoir un accompagnant "ne répond pas à la notion d'exigence de sécurité", a-t-il poursuivi.
Au nom de la "dictature de l'argent", "pour économiser trois sous on est prêt à faire n'importe quoi n'importe comment au mépris de la réglementation internationale".
Mais pour la défense d'EasyJet, qui plaide la relaxe, il s'agit de "cas marginaux", a souligné Me Maud Marian, estimant qu'il y a pu avoir méprise concernant l'autonomie de la passagère, qui avait été aidée par deux personnes pour s'installer dans son siège, alors qu'elle est en mesure de le faire seule.
Comme lors de précédents procès, son confrère Me Philippe Van Der Meulen a rappelé que la compagnie britannique transportait 1.000 personnes à mobilité réduite quotidiennement, soit 350.000 en moyenne chaque année. "EasyJet n'a aucune politique discriminatoire", a-t-il assuré.
Insistant sur l'obligation de résultat en matière de sécurité qui incombe aux transporteurs aériens, il a affirmé que certaines compagnies embarquent des passagers seuls "alors qu'une assistance s'avérerait nécessaire", pour éviter un procès et la mauvaise publicité qui en découle.
La cour a mis son arrêt en délibéré au 11 février.
Jeudi, la compagnie doit faire face à un nouveau procès du même genre, cette fois à Boigny (Essonne). Le 5 février dernier, la cour d'appel de Paris avait confirmé la condamnation d'EasyJet à 70.000 euros d'amende pour pour avoir refusé l'accès d'un avion à trois personnes handicapées non accompagnées. La compagnie a formé un pourvoi en cassation.