Handicap-social-violence: La maltraitance envers les personnes handicapées accueillies en établissements médicaux-sociaux est un phénomène multiforme, méconnu et mal mesuré.....
par Claudine DREUILHE
PARIS, 12 juin (AFP) - La maltraitance envers les personnes handicapées accueillies en établissements médicaux-sociaux est un phénomène multiforme, méconnu et mal mesuré, selon les conclusions, publiées jeudi, d'une commission
d'enquête créée en décembre 2002 par le Sénat.
Un document de près de 750 pages, intitulé "Briser la loi du silence", a été présenté à la presse par les sénateurs UMP Jean-Marc Juilhard (rapporteur) et Paul Blanc (président) de la commission.
"Aucune étude fiable n'existe qui permette de mesurer" l'ampleur de cette maltraitance, a affirmé M. Juilhard, en notant pourtant que 70% des cas connus se produisent en famille et 30% seulement en établissement.
Selon le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées, les violences sexuelles représentent en moyenne 60% (70% pour les mineurs) des maltraitances en établissement médico-social. Six fois sur dix, violences physiques ou sexuelles sont le fait d'autres résidents handicapés.
Le rapport cite aussi le ministère de la Justice pour l'année 2001: 1.818 poursuites entamées concernant des infractions (violences, vols, abus) tenant la vulnérabilité des victimes (mineures, handicapées, âgées) comme "élément
constitutif ou aggravant", et 612 condamnations à des peines de prison ferme.
Un rapport de l'inspection générale des affaires sociales(IGAS), également cité, fait état de 106 enquêtes préliminaires dans des procédures judiciaires ouvertes en 2001, 14 classements sans suite et 7 incarcérations.
Le sénateur explique ce manque de données exhaustives par "une prise de conscience tardive" du phénomène: elle remonte à fin 2000, avec la révélation du silence imposé par plusieurs autorités sur la disparition de sept jeunes filles handicapées dans l'Yonne à la fin des années 1970.
"L'omerta commence à peine à se fissurer", estime-t-il en dénonçant une "xénophobie ordinaire" du grand public.
[BB]Maltraitance "en creux"[EB]
Définir la maltraitance des personnes handicapées est d'autant plus difficile qu'elle prend des formes très diverses: elle peut être volontaire (abus physiques, sexuels, inanciers), et sera qualifiée d'"active", ou résulter de négligences, d'oublis, et sera dite "passive" ou "en creux".
"De petits actes anodins accumulés peuvent créer une souffrance difficile à dénoncer", note le rapporteur. Ses conclusions citent aussi des
dysfonctionnements professionnels et des punitions "éducatives" excessives.
"Les personnes handicapées sont de plus en plus nombreuses en raison de l'allongement de la durée de la vie" et de ce fait, le recrutement de personnels formés est "de plus en plus problématique", note encore le rapport
qui préconise plusieurs mesures pour améliorer la formation initiale et continue des professionnels les approchant, même de loin, comme les salariés des services généraux (administratifs, jardiniers, chauffeurs, etc.).
Une des pistes les plus optimistes concerne l'ouverture sur l'extérieur des établissements accueillant des personnes handicapées: la "bientraitance" de ces personnes est liée au niveau de leur participation ou celle de leurs
proches à la vie de l'établissement, affirme le rapport.
La présence de prestataires extérieurs (activités culturelles, sportives), la sortie régulière des personnes dans leur famille ou l'existence de formules d'accueil temporaire pour soulager les proches qui s'en occupent à plein temps peuvent également réduire les cas de maltraitance, estime-t-il.
cd/tm/oaa
[BI]« Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© (2003) AFP.