Une personne définitivement inapte à tout travail à la suite d'un accident a droit à une indemnisation particulière pour compenser la souffrance née de son exclusion sociale. La Cour de cassation vient de le rappeler après l'avoir décidé en mai 2021 en invoquant le principe de la réparation intégrale, sans perte ni profit. Explications en détail...
"Dévalorisation sociale"
Un salarié se trouvant tétraplégique à la suite d'un accident réclamait au responsable l'indemnisation habituelle, notamment pour ses souffrances, pour la réorganisation matérielle nécessaire de son cadre de vie et pour ses pertes de salaires jusqu'à l'âge de la retraite. Mais il réclamait aussi l'indemnisation de sa mise à l'écart de la société, de sa perte d'identité sociale, de son désœuvrement définitif. L'assureur en cause refusait, mais à tort, a tranché la Cour de cassation, qui estime qu'il y a une souffrance psychologique liée à l'incapacité d'exercer toute activité professionnelle. Il s'agit d'une souffrance distincte de celle ressentie dans les conditions d'existence personnelles et familiales, ont expliqué les juges, et distincte de la perte des gains professionnels futurs. Ce préjudice est lié à la dévalorisation sociale, voire l'inutilité sociale, ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail, ont-ils ajouté.
Jurisprudence nouvelle
Avant 2021 et cette jurisprudence nouvelle, la justice n'indemnisait, au titre de "l'incidence professionnelle", que les préjudices financiers avérés, constitués des pertes de salaires à venir et des pertes de chance de progression professionnelle. Mais non un préjudice moral.
(Cass. Crim, 18.10.2022, P 21-86.346 et Cass. Civ 2, 6.5.2021, F 19-23.173)