Les procureurs de la ville de Chicago (USA) ont inculpé le 5 janvier 2017, pour "crime raciste" quatre Noirs accusés d'avoir séquestré un jeune homme blanc handicapé mental, une scène diffusée en direct sur internet qui a choqué l'Amérique et provoqué l'ire des médias conservateurs.
Agressé durant 6 heures
Sur la vidéo de 30 minutes, diffusée sur Facebook Live et qui a beaucoup circulé sur les réseaux sociaux, on peut voir les quatre suspects, deux jeunes hommes et deux filles, en train de violenter le jeune homme en criant de manière répétée : "Fuck Donald Trump ! Fuck white people !" ("Nique Donald Trump ! Nique les Blancs !"). Le jeune homme blanc, présenté par les autorités comme souffrant d'un handicap mental, est filmé prostré dans un coin de la pièce, bâillonné avec du ruban adhésif et semble avoir les mains et les pieds attachés. Ses vêtements sont en partie découpés, et une partie de ses cheveux sont coupés voire rasés, et le crâne présente une blessure qui saigne. L'agression a duré au moins six heures, selon les enquêteurs.
Aucun remord
"(Les suspects) ont admis l'avoir frappé, lui avoir donné des coups de pieds. Ils lui ont fait boire de l'eau des toilettes (...) et coupé une partie de son cuir chevelu", a précisé Kevin Duffin, commandant de la police de Chicago, au cours d'une conférence de presse. "Je ne comprends pas pourquoi quelqu'un peut vouloir mettre cela sur Facebook", a-t-il ajouté, indiquant que les quatre suspects actuellement en détention n'ont exprimé aucun remord. Trois d'entre eux sont âgés de 18 ans et un quatrième de 25 ans. Ils font l'objet de plusieurs chefs d'inculpation, parmi lesquels enlèvement, coups et blessures, effraction et crime raciste, une circonstance valant peine aggravée aux Etats-Unis. La victime, a été enlevée dans une banlieue de Chicago et conduite dans un quartier du sud-ouest de la ville où elle a été séquestrée entre 24 et 48 heures, a déclaré la police, selon laquelle l'un des suspects avait connu la victime à l'école. Cette dernière a quitté l'hôpital où elle avait été admise à la suite des faits, mais reste traumatisée et a du mal à communiquer avec les enquêteurs, selon les autorités.
Un acte de sauvagerie
Même si les enquêteurs n'ont fourni aucun élément en ce sens, les commentateurs des médias ultra-conservateurs ont rapidement dénoncé une agression contre un partisan de Donald Trump par des individus liés, selon eux, au mouvement Black Lives Matter, né de la contestation des abus policiers contre la population noire. Le militant politique pour les droits civiques Jesse Jackson, basé à Chicago, a néanmoins publié un communiqué dénonçant tout lien avec le mouvement. "Cet acte de brutalité et de sauvagerie retransmis sur Facebook Live n'a rien à voir avec notre lutte pour les droits civiques et sociaux (...). C'est un effondrement moral et spirituel".
En France, en 2014
En France, trois mineurs avaient eux aussi agressé, en février 2014, un jeune homme avec un handicap puis avaient posté la vidéo de leur méfait sur le Net (article en lien ci-dessous). Sur ces images, on voyait deux d'entre eux le tenir par les bras, la bousculer, puis le pousser dans un plan d'eau, lui immergeant les pieds et les mollets. Ne souffrant que d'un hématome à la joue, la victime, âgée de 18 ans, s'était vu prescrire trois jours d'interruption temporaire de travail (ITT). L'affaire avait connu un emballement médiatique d'envergure. Les agresseurs avaient écopé de peines de prison avec sursis par le tribunal pour enfants de Grenoble. Si ce type d'affaires, malheureusement de plus en plus récurrent, questionne sur les dérives propres aux réseaux sociaux, elle interroge surtout la vulnérabilité des personnes en situation de handicap, et les maltraitances dont elles peuvent, plus que tout autre, être victimes. Cette propension sordide à filmer les actes ne fait que révéler une réalité que certains endurent loin des caméras. L'arbre qui, pour une fois, cesse de cacher la forêt…
Par Nova Safo (AFP), avec Emmanuelle Dal'Secco (handicap.fr)