Par Isabelle TOURNÉ
PARIS, 02 mai 2013 (AFP) - Le troisième plan autisme, dévoilé jeudi, met l'accent sur un dépistage précoce et de nouvelles méthodes de prise en charge afin de rattraper le retard "considérable" pris par la France en la matière, mais laisse les associations sur leur faim.
"Il s'agit d'améliorer la vie quotidienne de centaines de milliers de personnes", a souligné la ministre de la Santé Marisol Touraine, en présentant ce plan aux côtés de la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti.
Un nouveau-né sur 150 serait en effet concerné par ce trouble, qui touche entre 250.000 et 600.000 personnes en France.
"Notre pays accuse encore un trop grand retard dans la prise en charge de l'autisme, de nombreux enfants sont dépistés trop tardivement", a reconnu Marisol Touraine. Et en 2010, "moins d'une personne sur cinq bénéficiait d'un accompagnement adapté".
Fort d'un budget de 205 millions d'euros, soit 18 millions de plus que le plan précédent, le troisième plan autisme (2013-2017) préconise notamment un dépistage dès 18 mois.
Le gouvernement entend par exemple profiter de la refonte du carnet de santé, en 2015, pour y inclure une grille de dépistage des premiers signes de l'autisme. Il prévoit aussi la création de 700 places pour les petits en unités d'enseignements en maternelle.
Autre axe fort du plan: "l'accompagnement tout au long de la vie", avec
1.500 places d'accueil en plus pour les adultes autistes. "Nous allons essayer d'améliorer les structures existantes à condition qu'elles s'ouvrent aux méthodes modernes", a précisé Mme Carlotti.
La prise en charge de l'autisme fait l'objet d'une vive opposition entre les partisans d'une méthode de soin psychanalytique d'une part (qui conduit à l'internement en instituts psychiatriques) et éducatives d'autre part.
"En ouvrant ce dossier, j'ai trouvé une situation conflictuelle, un climat tendu", a déclaré Mme Carlotti au Parisien. "Je n'en veux plus. En France depuis quarante ans, l'approche psychanalytique est partout, et aujourd'hui elle concentre tous les moyens. Il est temps de laisser la place à d'autres méthodes pour une raison simple: ce sont celles qui marchent et qui sont recommandées par la Haute autorité de santé" (HAS).
5.000 professionnels formés
En 2012, les approches psychanalytiques dans la prise en charge avaient pour la première fois été mises sur la touche par la HAS, à la grande satisfaction des associations et des familles qui défendent les méthodes éducatives et comportementales.
Ces familles seront mieux soutenues, ont aussi promis les deux ministres, en annonçant la création de 350 places "de répit" (accueil de jour ou hébergement temporaire), venant s'annoncer aux 40 existantes.
Poursuivre la recherche sur l'autisme fait aussi partie des objectifs du plan, qui met enfin l'accent sur la formation, avec l'ambition de sensibiliser
5.000 professionnels de santé, du secteur médico-social et des travailleurs sociaux, aux particularités de l'autisme.
"Décevant", a pourtant tranché jeudi M'Hammed Sajidi, président de l'association Vaincre l'autisme, interrogé par l'AFP. "Le plan ne prévoit pas la création de places dans des structures innovantes", a-t-il notamment déploré, estimant que la France allait mettre encore plusieurs dizaines années à former des professionnels aux méthodes éducatives.
Par ailleurs, les places prévues en maternelles pour les enfants autistes se feront certes "dans des écoles ordinaires, mais cela restera des classes spécialisées, c'est complètement isolant", a-t-il jugé.
Plus mesuré, Vincent Gerhards, président du collectif autisme, qui regroupe près de 200 associations, a salué un plan qui "tourne le dos aux mauvaises pratiques en s'appuyant sur les recommandations de la Haute autorité de santé". "Les bonnes pratiques sont clairement privilégiées dans tous les secteurs", a-t-il reconnu.
"Mais on peut avoir quelques inquiétudes", a-t-il poursuivi, relevant que le plan s'appuyait exclusivement sur les structures existantes. "Il faudra une volonté politique dans la durée pour que les choses bougent", a-t-il ajouté, promettant une grande "vigilance" des associations.
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