Autophagie, se manger soi-même pour rester en bonne santé ?

Se manger-soi-même ? La découverte du mécanisme de l'autophagie, récompensée par le prix de Nobel de médecine, pourrait contribuer à une meilleure compréhension de certaines pathologies et permettre de vivre plus longtemps en bonne santé.

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Par Elisabeth Zingg

Le Japonais Yoshinori Ohsumi a reçu le 3 octobre 2016 le prix Nobel de médecine pour ses travaux de recherche fondamentale sur l'autophagie, un processus de nettoyage et surtout de « recyclage » dans la cellule. « Ce processus est très important car si la cellule n'est pas capable de se nettoyer, on va avoir une accumulation de déchets », explique Isabelle Vergne, chercheuse au CNRS qui travaille sur l'autophagie. « Si ce processus est complétement déréglé, ça peut entraîner de nombreuses pathologies », ajoute-t-elle. C'est le cas notamment des maladies neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson, des maladies infectieuses ou des cancers. Mais d'autres pathologies comme l'obésité ou le diabète, certaines maladies cardiovasculaires ou intestinales, voire même l'arthrose seraient également concernées. « La plupart des grandes pathologies sont liées à une insuffisance ou à un dysfonctionnement du processus autophagique », relève de son côté le Pr Guido Kroemer, autre spécialiste français qui travaille à l'Inserm.

Se manger soi-même

L'autophagie (qui signifie « se manger soi-même ») est un processus connu depuis les années 60. Le Pr Ohsumi a identifié les gènes essentiels à l'autophagie dans les années 1990 en utilisant de la levure et en montrant qu'un mécanisme similaire était employé dans nos cellules. Cette découverte a suscité une floraison de recherches, qui pour l'instant sont restées cantonnées aux plantes et aux animaux. « Nous essayons de comprendre pourquoi ce processus diminue avec l'âge et de trouver des innovations capables de l'activer afin de maintenir nos cellules en bon état plus longtemps, et de pouvoir vivre une vie meilleure et plus longue » indique de son côté le Pr Ioannis Nezis de l'Université britannique de Warwick. Dans la plupart des pathologies, l'autophagie doit être stimulée, comme dans les maladies neurodégénératives, pour éliminer les agrégats de protéines qui s'accumulent dans les cellules malades.

Stimuler une réaction immunitaire

Il en va de même pour le diabète, l'artériosclérose ou les maladies infectieuses lorsqu'il s'agit de stimuler la réaction immunitaire. « C'est plus complexe dans le cancer », selon le Pr Kroemer qui précise que, selon les cas, on peut envisager de « stimuler, voire au contraire d'inhiber » le processus d'autophagie. Des travaux sur l'animal ont ainsi montré que des stimulateurs de l'autophagie pouvaient améliorer la réponse anti-cancéreuse, par le biais de la réponse immunitaire. Mais d'autres chercheurs se sont au contraire efforcés d'inhiber l'autophagie pour « réduire le stress cellulaire lié à la chimiothérapie », précise-t-il. Selon Mme Vergne, qui travaille sur la mycobactérie à l'origine de la tuberculose, de plus en plus souvent résistante aux antibiotiques, la stimulation de l'autophagie permet de contrôler l'infection.

Pour la mucoviscidose et l'arthrose

Une stratégie qui s'adresse également à une autre mycobactérie, très présente chez les patients atteints de mucoviscidose, et elle aussi très difficile à traiter. « On pense que si on arrive à augmenter l'autophagie, on pourrait l'éliminer (..) en demandant à l'organisme, via l'autophagie, de la tuer », explique-t-elle. Une autre pathologie, l'arthrose qui touche essentiellement les personnes âgées, est également en première ligne. Selon Claire Vinatier, chercheur à l'Inserm, des études pré-cliniques sur des souris ont montré que l'activation de l'autophagie ralentissait l'apparition de l'arthrose et améliorait « les signes de mobilité ». « Mais on est loin d'en être à l'Homme », explique-t-elle à l'AFP. Parmi les molécules déjà testées sur l'animal figure la rapamycine, un médicament anti-rejet déjà utilisé chez l'homme lors des greffes. Pour éviter les effets secondaires de ce puissant médicament, il est injecté directement dans l'articulation.

Vin rouge : une option ?

D'autres candidats sont aussi sur les rangs comme la protéine Klotho qu'on trouve dans le corps humain. En attendant les essais cliniques chez l'humain, ce qui pourraient encore prendre quelques années, on peut déjà doper son autophagie grâce à son alimentation, avec le resvératrol, un antioxydant contenu dans le vin rouge, certains fruits et le chocolat, ou encore la spermidine, une autre arme secrète anti-vieillissement, présente notamment dans le roquefort, avance Patrice Codogno, un autre spécialiste de l'Inserm.

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