Pour clore notre série consacrée aux vainqueurs des Prix Ocirp handicap 2018, zoom sur le coup de cœur du jury : la chaîne YouTube World of Clarence. Un graal pour Clément Charron, jeune infirmier de 24 ans, à l'origine du projet. Dans ses vidéos, il livre des témoignages anonymes de personnes en souffrance mentale, physique ou sociale.
L'art au service des maux
Depuis un an, Clément partage des vidéos dans le but de sublimer le handicap. Sur sa plateforme, il comptabilise déjà plus de 11 000 abonnés. Il explique : « Je poste des vidéos qui mettent en scène artistiquement les témoignages de ces personnes. Elles sont rendues anonymes et réalisées à la demande et sous leur supervision. ». Après avoir voulu faire rire un temps, le jeune homme se tourne vers des contenus plus forts et partage ses expériences et les rencontres lors de ses différents stages dans le monde médical. Il veut démystifier la psychiatrie, promouvoir le partage, l'acceptation de la différence et se fait le relais entre le celui qui partage son histoire et le monde extérieur. Nadia Flicourt, cadre de santé, soutient le projet et en explique les bénéfices : « Parler du handicap à travers cette chaîne permet de dire ce que les personnes en situation de handicap pensent et ne disent pas. Les propos sont justes, vrais et vérifiés. ».
Un côté théâtral
« À partir du moment où le témoin me dit qu'il se reconnaît, quelle que soit la violence de la vidéo, alors j'estime que c'est vrai. », explique Clément. C'est donc tout un travail de mise en contexte et d'appropriation qui est fait, à l'image d'un travail d'acteur. « Je travaille beaucoup avec l'émotion, les bruitages, la musique, les images, de façon à embarquer le plus possible le spectateur dans la tête de la personne qui témoigne. ». Ce parti-pris fonctionne auprès des abonnés, comme Coleen Perat-boyer : « Le côté théâtral favorise la transmission des émotions et rend la parole percutante, et c'est ce qui me permet de vraiment rentrer dans le témoignage ».
Avant tout du partage
Son ambition est de susciter un choc émotionnel et sensoriel, propice à générer une réflexion sur l'autre et sur soi. Cet espace qui promeut la tolérance et le vivre-ensemble est également un lieu d'interaction, où chacun est libre de s'exprimer, à l'image d'Aïnhoa Merry, dont l'histoire a fait l'objet d'une vidéo : « Pour moi, sa chaîne, c'est d'abord du partage de l'empathie et de la dédramatisation de tout ce qui tourne autour du handicap physique ». Des contenus qui peuvent servir aux aidants mais aussi aux équipes médicales. « Les thématiques sont très diverses, conclut Clément. J'ai pu traiter de la dépression, du trouble bipolaire, de l'anorexie mais aussi du handicap physique et également de la souffrance sociale. Tout cela est très lié, finalement. ».
© Capture écran Instagram world_of_clarence + Pchagnon