L'insuffisance des soins prodigués à un détenu lourdement handicapé est assimilable à un traitement « inhumain ou dégradant », a jugé le19 février 2015 la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), donnant raison à un Algérien détenu en France et devenu paraplégique après une tentative d'évasion ratée.
Avec l'aide d'un codétenu
Le maintien en détention de cet homme de 42 ans « n'est pas en soi contraire » à la Convention européenne des droits de l'homme, ont concédé les juges. En revanche, « l'absence ou l'insuffisance » des soins dont il bénéficie en prison « l'ont soumis à un niveau de souffrance dépassant celui qui est inhérent à une privation de liberté », ont-ils tranché. Les autorités françaises devront verser 7 000 euros pour dommage moral à Mohammed Helhal, à moins qu'elles ne contestent cette décision dans un délai de trois mois. Les juges européens ont critiqué en particulier le fait que le requérant, détenu à Uzerche (Corrèze), était contraint « de se faire aider d'un codétenu » pour se doucher, en l'absence d'aménagements spécifiques à son handicap. En outre, il n'a pas pu bénéficier de la rééducation dont il avait besoin, ayant été privé de séances de kinésithérapie pendant trois ans, a relevé la Cour.
Une nouvelle avancée pour le droit des détenus
M. Helhal, condamné à 30 ans de réclusion criminelle pour assassinat et tentative d'assassinat, est paralysé des membres inférieurs depuis une chute survenue en mars 2006 lors d'une tentative d'évasion. Il souffre en outre d'incontinence urinaire et anale. Cette décision « marque une nouvelle avancée pour le droit des détenus », s'est félicité l'avocat du requérant, Me Patrice Spinosi. Le gouvernement doit désormais « donner les instructions nécessaires » pour que M. Helhal puisse recevoir les soins dont il a besoin, a-t-il ajouté.
La France déjà condamnée
Par le passé, la France a déjà été condamnée à trois reprises pour avoir maintenu en détention des détenus souffrant de graves problèmes de santé. En 2002, un malade atteint de leucémie avait ainsi obtenu gain de cause. Et en 2006, la France avait été condamnée dans deux dossiers de détenus, l'un privé d'encadrement médical approprié malgré ses troubles psychiatriques, l'autre paraplégique et maintenu dans une prison non adaptée à son état.
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