Non, Melissa ne montera pas dans les chaises volantes. Ainsi en ont décidé deux agents du Jardin d'acclimatation, dans le Bois de Boulogne, le 1er mai 2019. Pour quelle raison ? Parce que cette jeune fille de 13 ans est autiste, cela lui a été signifié de vive voix. Elle fréquente pourtant ce parc, concession de service public de la ville de Paris, depuis plus de 10 ans sans qu'on ne lui ait jamais opposé le moindre refus, ici comme ailleurs. Sa maman a trouvé cette situation « extrêmement choquante », parce que sa fille a été évacuée devant tout le monde.
Erreur de diagnostic
Les employés lui précisent que, selon le règlement, « Les personnes atteintes d'une maladie mentale et psychiatrique n'ont pas le droit de monter dans ce manège ». Elle a beau expliquer que ce n'est pas le cas de l'autisme, elle ne réussit pas à obtenir gain de cause. Une lettre ouverte a pourtant été postée sur les réseaux sociaux début avril 2019 destinée aux associations de personnes autistes par Marc-Antoine Jamet, président du Jardin d'acclimatation, qui, après un incident similaire avec un jeune garçon autiste, mentionnait cette restriction et en expliquait les raisons. La maman de Mélissa, présidente d'association, n'était donc pas au courant ? Elle décide de porter plainte pour discrimination et dépose l'affaire sur le bureau du Défenseur des droits, interpellant également Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap. Cette dernière a fait savoir, dans un tweet qu'elle apporte tout son « soutien à Mélissa (…) injustement interdite de profiter d'un manège ». Selon elle, « rien ne justifie un tel comportement ».
Question de sécurité
Les agents du manège ont présenté leurs excuses tandis que les responsables du parc ont remboursé la journée à cette famille. Marc-Antoine Jamet, adresse, dès le lendemain une lettre aux associations de personnes handicapées, et notamment à l'Unapei, dans laquelle il invoque des questions de sécurité. Cette restriction ne porte que sur trois manèges anciens sur les 41 que compte le parc : « A la fois le bureau de contrôle, le constructeur et le cabinet de conseil en accessibilité avec qui nous travaillons ont établi que les enfants qui ne pouvaient pas être évacués de manière autonome ne pouvaient pas monter dans ce manège. » Rappelant que le Jardin d'acclimatation est très engagé auprès de « nombreuses causes solidaires en faveur de l'enfance en souffrance ou en difficulté », Marc-Antoine Jamet assure vouloir « relancer auprès de tous (ses) salariés un programme de formation sur la compréhension et l'acceptation de la différence ».
Une réunion prévue
Mais il souhaite également aller plus loin en rassemblant tous les acteurs du secteur, aux côtés des associations de personnes handicapées afin de « revoir les procédures, attraction par attraction, pour mieux définir les conditions d'accessibilité. » La ministre a répondu à son invitation et, de la même façon qu'elle avait réuni la grande distribution pour un rappel aux obligations après qu'un jeune homme a été refusé avec son chien-guide dans un magasin en août 2018 (article en lien ci-dessous), elle entend convoquer les « responsables des parcs d'attraction pour une véritable charte de l'accueil bienveillant et professionnel », même si, en France, ils mènent globalement des politiques très engagées en faveur du public en situation de handicap (coupe-fil, tarifs spécifiques, prêts de fauteuil…). Faudrait-t-il parfois s'inspirer d'autres modèles ? En Pennsylvanie, le parc d'attractions Sesame Place a mis en place, en avril 2018, une certification garantissant l'accessibilité aux visiteurs autistes (article en lien ci-dessous).