Lille, une résidence pour autistes : la vie en autonomie !

Première près de Lille ! Depuis janvier 2016, HabiTED accueille des personnes autistes qui tentent de vivre en autonomie dans une résidence HLM adaptée. Avec une aide humaine, ce projet vise l'émancipation hors des établissements spécialisés.

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Par Baptiste Becquart

« C'est un tremplin pour une vie normale » ; Vianney, la vingtaine rugissante, savoure son autonomie. Pour la première fois en France, une résidence HLM née en janvier 2016 à Roncq (Nord) a pour vocation l'émancipation de jeunes adultes autistes hors des établissements spécialisés. Dans cette banlieue de Lille, dix autistes habitent la résidence « HabiTED » en toute autonomie, ou presque. Deux fois par jour, une équipe de quatre travailleurs sociaux financée par le département rend visite à chacun d'eux dans leur appartement personnel pour les aider dans les tâches quotidiennes.

Une aide sur l'aspect pratique

Cloué au mur du local réservé aux intervenants, l'emploi du temps organise leur semaine : lessive le lundi pour Louise, rangement et budget le mardi pour Madeline, rasage et ongles le mercredi pour Vianney... « C'est surtout une aide sur l'aspect pratique : comment régler un thermostat, répondre au téléphone, sortir la poubelle. Pour des autistes, ces gestes simples peuvent très vite devenir angoissants », explique Fabienne de Oliveira, présidente de l'association Israa, porteuse du projet. Madeline, en CAP cuisine et entretien, fourre son linge dans l'une des deux machines à laver collectives, au rez-de-chaussée. « Etre en autonomie, ça ne veut pas dire savoir tout faire », claironne-t-elle. Une affiche présente les différentes étapes d'utilisation de la machine, comme « Ouvrir le hublot » certes, mais aussi « Le refermer »... « Sans quoi ils ne le feraient tout simplement pas », pointe Fabienne de Oliveira.

Des logements « banalisés »

A Roncq, la résidence se fond dans l'urbanisme. Les appartements ressemblent à des studios d'étudiants, l'espace et le confort en plus, pour un loyer de 500 euros. « L'objectif était que ça ne ressemble en rien à une résidence pour personnes handicapées : on ne stigmatise pas, on insère. Les dix logements sont banalisés, bien intégrés à la ville, à deux pas des commerces et des transports », souligne Arnaud Delannay, directeur général du bailleur social Notre Logis. Vianney, pull bleu sur les épaules, vient de faire son ménage sous les directives - fermes - d'une intervenante. Il se réjouit de sa nouvelle vie : « Je suis vraiment bien ici. J'étais pressé de m'installer, je me disais que ça apporterait un changement dans ma vie. On a plein d'activités et de sorties, ça sert de tremplin pour une vie normale ». « Depuis janvier il est plus adulte, il a plus d'automatismes », approuve sa mère, Marie-Cécile. « Il a appris aussi à appeler à l'aide car les autistes n'ont pas le réflexe de le faire ».

Un peu loin, pas pratique pour les soirées

C'est lorsqu'on demande à Vianney, en troisième année de licence de physique fondamentale, les inconvénients de la résidence, qu'on entrevoit le désir d'être un jeune comme les autres : « C'est un peu loin de Lille, quand on veut aller à des soirées ce n'est pas très pratique ». On en oublierait presque qu'ils sont handicapés - c'est d'ailleurs l'objectif. Ils devront pourtant rester deux ans au moins avant, peut-être, de chercher un logement... encore plus « normal ». Certains ont toujours des difficultés à se convaincre que le jeu en vaut la chandelle, tel Franck, 22 ans. Il ne veut « pas trop que ça se sache » qu'il est ici, soupèse longuement chacune des questions, le menton appuyé sur son poing, avant de livrer des réponses dubitatives : « Ici, c'est correct, ça peut aller ».

A rebours des établissements traditionnels

Pour Arnaud Delannay, la réussite du projet tient en ce qu'il s'inscrit à rebours des établissements traditionnels, peu adaptés aux autistes en mal d'autonomie : « En France on cherche à mettre des structures partout. C'est souvent infaisable en termes de montage, ça coûte cher et ça ne répond pas aux attentes ». « On mutualise, on optimise », abonde Fabienne de Oliveira. « Les intervenants sont stables, contrairement au système de visite à domicile traditionnel, où ils restent un mois puis partent, et où il fallait tout reconstruire à chaque fois. Or les personnes autistes sont réticentes au changement ». Des réticences que Vianney, Franck et les autres s'emploient à vaincre au jour le jour.

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