4ème plan autisme : la concertation engagée à l'Elysée

A l'Elysée, le 6 juillet 2017, Emmanuel Macron reçoit les institutions et associations du champ de l'autisme pour définir les priorités du 4ème plan autisme. Compte-rendu en détail.

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C'est l'Elysée que le chef de l'État a choisi pour lancer la concertation autour du 4e plan autisme, le 6 juillet 2017 dans l'après-midi. La séance vient de débuter. Devant l'impatience, voire le désespoir de familles, les associations (une cinquantaine sont présentes) demandent au gouvernement de "prendre la mesure de l'urgence" en matière de  recherche, d'accompagnement vers l'emploi et de scolarité ou encore de création de places dans des structures spécialisées pour éviter des départs forcés en Belgique.

14h30. 4 ministres au RV

Sophie Cluzel (secrétaire d'Etat en charge du handicap) prend la parole. "L'autisme est une question majeure qu'il nous faut mieux comprendre, mieux diagnostiquer, mieux accompagner".

Frédérique Vidal (ministre de l'Enseignement supérieur), Jean-Michel Blanquer (ministre de l'Education nationale) et Agnès Buzyn (ministre de la Santé) sont également présents, réunis en formation interministérielle. Les ministres de l'emploi, la culture et le sport sont représentés.

Jean-Michel Blanquer déclare que son ministère veut faire de l'accueil des élèves autistes une priorité. Pour mener à bien cette politique, il considère que l'interministérialité est la "clé de l'efficacité". Il y a, pour lui une évidence : "l'école de la République doit accueillir tous les enfants. Lorsque la situation ne le permet pas, une réponse doit aider les familles à trouver une organisation adaptée". Il reconnait être "au milieu du gué" et dit "connaître les inquiétudes des familles à cause de procédures lourdes et complexes". Il promet, en 2017, 112 unités d'enseignement en maternelle pour les enfants autistes. Selon lui, 50 % d'entre eux poursuivront en primaire. Il assure également que la formation des AESH sera améliorée et que le dépistage précoce sera fait le plus tôt possible, dès la maternelle, grâce à un suivi médical des enfants au sein de l'école. En 2017, 280 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en France, dont 29 326 avec des troubles autistiques (soit plus 30% depuis la fin des années 2000).

Agnès Buzyn dit vouloir partir des besoins individuels et regretter "un trop grand retard dans le champ de l'acompagnement des personnes autistes". Ce 4eme plan aura 4 axes prioritaires : développer le repérage, renforcer la qualité des interventions au sein des établissements et hopitaux, renforcer l'inclusion sociale et professionnelle et l'acompagnement des familles et des proches.

Frédérique Vidal assure que le champ de la recherche sera mobilisé dans le domaine du diagnostic, du traitement, de la prise en charge avec, notamment, l'appui de la robotique. Elle souhaite mettre en place une plateforme collaborative pour diffuser la recherche à tous les lieux de diagnostic, en soutien des familles. Elle souhaite par ailleurs développer la pédo-psychiatrie dans ce domaine et encourager la formation initiale et continue aux spécificités de l'autisme pour tous les pros de l'accompagnement.

15h15. Josef Schovanec s'exprime au nom des adultes autistes

ll rend hommage à Ségolène Neuville, ex-secrétaire d'Etat au handicap,  qui a "osé l'impensable, faire travailler une personne autiste". Josef Schovanec a en effet rédigé un rapport en 2017 sur l'emploi des personnes avec autisme, regrettant qu'aucun media ne l'ait interrogé à ce sujet au moment de sa sortie. Il déplore que ses amis autistes soient au chômage car négligés par le monde du travail. ll regrette que la France se soit concentrée sur les enfants et adolescents en oubliant qu'ils deviendraient un jour adultes. Il lutte pour que l'expertise des personnes autistes soit reconnue.

15h45 Le robot NAO fait son entrée dans la salle

Ce petit humanoïde de 58 centimètres est équipé de deux caméras et de nombreux capteurs qui enregistrent les réactions des enfants. Produit par une société française, Aldebaran Robotics, il a été testé dès 2014 auprès d'enfants autistes. Il entame un dialogue avec Sophie Cluzel exliquant tout le bénéfice qu'il leur apporte via des conversations en direct et des jeux.

16h Le détail sur la concertation du 4ème plan

Les réunions pour préparer ce plan auront lieu entre juillet et décembre 2017 et devront donner lieu à des propositions concrètes. Cinq groupes de travail seront mis en place : scolarité et formation professionnelle, insertion dans la société et dans le monde du travail, recherche et nouveauté, famille et, enfin, aide au changement.  Cette concertation doit faire participer les familles, les collectivités territoriales. Elle doit aussi repérer les actions à mettre en place. "Nous avons six mois de travaux ! Rendez-vous début 2018 pour un plan opérationnel et chiffrable", a déclaré Sophie Cluzel. Le troisième plan autisme avait été doté de 205 millions d'euros pour la période 2013-2017. Malgré de réelles avancées, il a aussi compté des "lacunes", notamment sur la prise en charge des adultes atteints de ce trouble et l'accompagnement des familles, et toutes ses mesures n'ont pas vu le jour. En juillet 2015, un tribunal administratif condamnait l'Etat français pour "des carences" dans la prise en charge d'enfants autistes.

16h Goûter avec des enfants autistes à l'Elysée

Poignées de main, tapes dans le dos et selfies dans les couloirs de l'Elysée ! Le couple présidentiel a passé près de 40 minutes avec 13 jeunes âgés de 7 à 21 ans atteints de ce trouble neuro-développemental. "Vous me semblez bien belle !", a d'emblée lancé l'un d'eux à Brigitte Macron, en lui tendant la main. Après la traversée de la cour et une photo souvenir sur le perron, ces écoliers, collégiens, lycéens et étudiants de la région parisienne et de Strasbourg ont pu accéder au bureau du chef de l'État, qui, tel un prof d'histoire, leur a conté l'histoire du lieu.

16h30 Cri de colère de Danièle Langloys

La présidente d'Autisme France lance un cri d'alarme : "Comment peut-on construire un 4ème plan autisme sans rendre ses enfants à Rachel ?". Largement applaudie par la salle, elle fait allusion à cette maman de trois enfants autistes qui lui sont arrachés depuis deux ans. Elle accuse certains départements de "perversité et d'incompétence" qui continuent de mettre le trouble autistique sur le dos des mamans. Elle se veut la porte-parole de la "détresse et de l'épuisement des familles". Pour elle, deux autres axes majeurs pour ce futur plan : simplifier le parcours "cauchemardesque" des parents dans les MDPH et proposer une véritable aide aux familles, notamment via de la guidance à domicile, des relais en cas d'épuisement. Elle lance un "appel au secours au Gouvernement" et espère le soutien massif de la Nation.

17h Le président prend la parole

Arrivant à la conclusion des débats, le chef de l'Etat dit avoir beaucoup appris avec les jeunes avec lesquels il a passé un peu de temps en compagnie de son épouse Brigitte. Il dit se "méfier des plans qui sont trop souvent homogènes. La vingtaine de jeunes avec qui j'étais suffit à montrer qu'il n'y a aucune homogénéité. Et donc les réponses sont multiples". Et de saluer le travail global réalisé par l'ensemble des acteurs et l'intérêt du caractère interministériel de ce chantier, les ministres présents ayant déjà intégré dans leur action cette dimension. Il est interrompu par le jeune Thomas qui ne tient plus en place, et s'adressant avec le sourire à ses éducateurs: "Je crois que vous avez échoué à le mettre sous une contrainte". Avant d'ajouter : "Et c'est sans doute très bien ainsi".

Les 6 prochains mois seront donc consacrés à l'analyse de cette approche transversale, "partant plutôt du bas qu'un plan dicté d'en haut" selon le chef de l'Etat, en proposant des "familles de solutions". C'est, selon lui, la "plus-value de ce 4ème plan", en articulant convenablement le médico-social et non médico-social et sans oublier les adultes qui "peuvent se retrouver plongés dans la violence d'un monde qui n'est pas fait pour eux." Et de conclure : "les sociétés contemporaines ont ce défi à relever, et c'est plutôt un défi de civilisation. Et c'est dans cette maison (NDLR : l'Elysée) que cela doit se faire", même s'il se dit conscient que ces problèmes ne seront pas réglés en un jour. Le chef de l'Etat affirme qu'il sera présent, sur le terrain, "pas pour de grandes annonces" mais pour des "situations concrètes" et, cela, "autant de fois que nécessaire". 

 

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