Pas assez d'orthophonistes en France ? Et ce n'est pas le nouveau quota prévu par le gouvernement qui va changer la donne… L'arrêté fixant le nombre d'étudiants à admettre en première année en septembre 2020 est paru au Journal Officiel le 28 janvier : 912 au total, soit 7 de plus qu'en 2019 ! Une augmentation jugée « ridicule » par la Fédération nationale des orthophonistes. La FNO en avait réclamé 100 de plus à Agnès Buzyn, ministre de la Santé, au motif qu'il « n'y a pas assez d'orthophonistes en France pour répondre à la demande ».
Des régions à l'abandon
Un grand nombre de régions connaissent en effet une sévère pénurie, notamment Auvergne-Rhône-Alpes avec une moyenne de 20 professionnels pour 100 000 habitants, le niveau national, déjà bas, étant de 36 pour 100 000 habitants. Dans le Puy-de-Dôme, pour un rendez-vous chez un orthophoniste, il faut compter entre deux mois (dans le meilleur des cas) et un an, rapporte le site La Montagne. Ce ne sont pourtant pas les postulants qui manquent. A la rentrée 2019, seulement 3 % des candidats (très majoritairement des candidates) ont obtenu une des 900 places ouvertes dans l'un des établissements de formation disséminés dans toute la France. De plus en plus de jeunes sont alors contraints de s'expatrier, notamment en Belgique qui autorise un quota de 30 % d'étrangers dans ses formations.
Rééducation de groupe ?
Les 25 000 professionnels ne sont plus en mesure de répondre à l'ensemble des demandes, « créant des situations de perte de chance et de tension », selon la FNO. « Les quotas doivent être fixés en fonction des besoins et non des contingences matérielles, poursuit-elle. Pour cela, le Ministère doit donner les moyens aux Universités de former plus de futurs professionnels. » Cette profession exige un certificat de capacité, après 5 ans d'étude. Auxiliaire médical, l'orthophoniste intervient, sur prescription médicale, auprès de patients de tous âges concernés par : l'illettrisme, les troubles dys, ceux de la parole, de la respiration, de la déglutition et de la voix après un cancer de la sphère oro-bucco-pharyngée, et ceux du langage après un AVC (accident vasculaire cérébral), la surdité... Or les patients sont de plus en plus nombreux, les délais d'attente s'allongent au-delà du raisonnable, au point que certaines rééducations d'un genre nouveau, en groupe, font leur apparition dans des régions sous-dotées. Certains professionnels sont contraints de faire des choix dans leurs priorités thérapeutiques, privilégiant les troubles du langage et la surdité chez le jeune enfant, le bégaiement, la cancérologie en ORL, les séquelles d'AVC et l'autisme. Face à « l'inaction » du gouvernement, la FNO promet une campagne pour sensibiliser le grand public.
Des mesures favorables pour les patients
Dans ce contexte tendu, quelques bonnes nouvelles tout de même pour les patients… Rappelons que, depuis juillet 2019, les séances d'orthophonie réalisées en milieu scolaire auprès d'enfants en situation de handicap sont prises en charge par l'Assurance maladie ; auparavant, elles devaient être effectuées à domicile ou au cabinet du médecin (article en lien ci-dessous). Depuis le 1er juillet, le secrétariat d'Etat à la Protection de l'enfance a également mis en place une « majoration pour la prise en charge d'enfants de moins de 3 ans » et une « revalorisation des actes de rééducation des retards de parole, des troubles de la communication et du langage oral ». Encore faut-il qu'ils soient reçus !