Trouble-fêtes, les artifices ? Utilisés sans précaution, ils peuvent entraîner des dégâts très sérieux, principalement sur les mains de leurs utilisateurs. Si aucune classification ne répertorie le nombre d'accidents à la suite des festivités du 14 juillet ou du Nouvel An, des dizaines de fêtards arrivent chaque année aux urgences, sévèrement mutilés. « C'est très aléatoire, explique Dr Alexandre Kilinc, secrétaire général du réseau Prévention main, qui exerce aujourd'hui en libéral. En 2012, plus d'une quarantaine de blessés ont été opérés rien qu'en Ile-de-France le 14 juillet. L'année suivante, ils étaient une vingtaine. » Active sur toute la région Île-de-France, Prévention main réunit chirurgiens, kinésithérapeutes, psychologues afin de prendre en charge les victimes d'un traumatisme ou d'une pathologie professionnelle du membre supérieur. Suivi psychologique et encadrement médico-social sont assurés gratuitement.
Des lésions parfois irréversibles
Les explosifs provoquent une détonation due à un souffle, une chaleur. Ce souffle blesse et provoque des lésions majeures, parfois irréversibles, allant jusqu'à l'amputation de la main. « En 2012, un père de famille a perdu tous les doigts de sa main droite, confie Dr Kilinc. Dans de nombreux cas, le pouce est écarté du reste de la main. Les muscles à la base du doigt sont arrachés. Les nerfs peuvent également être brûlés. » À la fois sensitives et motrices, les séquelles sont souvent irréversibles ou nécessitent de longues périodes de rééducation.
La main, organe effecteur et fragile
Le réseau de prévention constate que la plupart des personnes blessées par les pétards sont des adolescents ou des enfants mal accompagnés. Les accidents dramatiques dus à une mauvaise utilisation d'explosifs engendrent alors de lourdes conséquences en termes de projets, d'estime de soi et de vie professionnelle. « À 15 ans, vous commencez à penser au métier que vous souhaitez exercer. Une main handicapée réduit les options possibles et induit une grande remise en question, affirme le chirurgien. Chez les adultes, certains blessés doivent penser à un reclassement professionnel. » « Le handicap de la main est souvent très mal vécu, ajoute-t-il. La main est un organe effecteur qui permet l'action. C'est un outil de travail et un instrument. Lorsqu'elle se trouve mutilée, les séquelles psychologiques sont sévères et le besoin de soutien plus important. »
Appui stable et périmètre de sécurité
Une méconnaissance de la dangerosité des produits contenus dans les explosifs mène droit à l'accident. Les substances pyrotechniques très néfastes, employées avec négligence, font d'ailleurs l'objet d'une législation précise en France ; seuls les pétards de la catégorie K1 sont autorisés. Pour ces raisons, Prévention main conseille vivement de ne jamais se procurer un artifice illégalement. L'organisme recommande de ne jamais tenir l'explosif dans la main, de l'utiliser dans un terrain spacieux ou isolé (ou de définir un périmètre de sécurité) et de ne jamais le projeter en direction d'un individu. Il est également conseillé de placer l'artifice sur une surface d'appui stable, d'anticiper les conditions météorologiques, de ne jamais placer son visage au-dessus du pétard et de s'écarter le plus vite possible de la mèche après sa mise à feu.
Jamais à portée des enfants
Le réseau de prévention insiste par ailleurs sur le fait de ne pas laisser les explosifs à portée des enfants et de respecter une distance minimale de sécurité. « Les personnes passionnées par l'utilisation de pétards respectent toutes ces conditions. Elles se filment, trouvent des terrains isolés qui ne risquent pas de faire des dégâts sur autrui. Sinon, les accidents arrivent trop vite et mènent à des conflits », déplore Dr Kilinc, qui mène des actions de sensibilisation en entreprise et en milieu scolaire. Pour laisser exploser sa joie correctement, il s'agit donc de manipuler les artifices avec minutie et précaution.
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