Privé d'AAH car hospitalisé à l'étranger plus de 3 mois

Pas d'AAH si l'on séjourne plus de 3 mois à l'étranger ? Accidenté lors d'un voyage en Thaïlande, hospitalisé un temps, un allocataire a perdu ses droits, la Cour de cassation rejetant ce cas de force majeure. Il existe néanmoins des exceptions...

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Peut continuer de toucher l'AAH (allocation adulte handicapé) si l'on séjourne à l'étranger plus de trois mois ? Non, répond la loi. Et si c'est pour un cas de force majeure ? Toujours non, répond la Cour de cassation, la plus haute juridiction française. Pourtant, en cas de problème de santé, il existe une exception qu'il vaut mieux connaître avant de boucler ses valises. On explique...

Un accident en Thaïlande

La Cour de cassation s'est penchée sur le cas de monsieur U, bénéficiaire de l'AAH qui séjourne en Thaïlande en 2014. Malheureusement, le 12 mars, il est victime d'un accident de voiture avec fractures, qui le contraint à prolonger son séjour pour y être hospitalisé. Il reste alors absent du territoire français durant presque six mois, du 14 janvier au 24 juin, ce qui pousse, à son retour, la Caf des Alpes-Maritimes à lui réclamer le remboursement de son allocation sur cette période, soit un montant de 4 741 euros. La Caf avait été alertée par l'Assurance maladie suite au remboursement de frais médicaux à l'étranger durant cette période.

Monsieur U conteste cette décision au motif qu'il a été victime d'un « cas de force majeure », et la cour d'appel d'Aix-en-Provence tranche en sa faveur en janvier 2020. Mais la Caf saisit alors la Cours de cassation, qui fait, à son tour, une toute autre lecture du droit. Dans son pourvoi (N°20-14.237 du 25 novembre 2021), elle juge que le cas de force majeure évoqué ne permet pas de déroger à la règle de la condition de résidence, que la Cour d'appel a violé les articles de loi dédiés (L. 821-1 et R. 821-1 du Code de la sécurité sociale) et que monsieur U ne peut donc prétendre à la continuité du versement de son AAH.

3 mois max, ce que dit la loi ?

Voici en effet explicitement ce que prévoit la loi :
• Le titulaire de l'AAH est considéré « habiter en France » s'il fait un ou plusieurs séjours à l'étranger dont la durée n'excède pas trois mois (exactement 92 jours) au cours de l'année civile (soit du 1er janvier au 31 décembre) ou de date à date.
• En cas de séjour de plus de trois mois, l'AAH n'est versée que pour les seuls mois complets de présence ; le droit est alors suspendu le 1er jour du mois de départ puis est rétabli le 1er jour du mois suivant le retour.

Concrètement, ça se passe comment ? Prenons quatre exemples :

1)    Aline séjourne hors de France du 1er novembre 2021 au 15 février 2022 inclus. Elle est donc absente pendant une durée supérieure à trois mois de date à date (trois mois et demi). Son droit à l'AAH sera suspendu le 1er novembre 2021 et rétabli le 1er mars 2022.
2)    Christophe part à l'étranger du 15 mars au 15 avril 2021 puis du 15 juin 2021 au 15 septembre 2021. Il est donc absent du territoire durant quatre mois sur l'ensemble de l'année 2021. Son droit à l'AAH est suspendu du 1er mars au 30 avril puis du 1er juin au 30 septembre.
3)    Nadia se rend à l'étranger du 2 août au 15 septembre 2020 puis du 7 janvier au 8 mars 2021, soit 75 jours en 2020 et 61 en 2021. Elle a résidé moins de 92 jours à l'étranger sur chaque année civile et peut donc bénéficier du maintien de son AAH durant son voyage.
4)    Simon séjourne hors de France du 2 octobre 2020 au 8 février 2021, soit 130 jours d'affilée, et donc plus de 92 jours de « date à date ». Son AAH est supprimée d'octobre 2020 à février 2021 inclus.

Trois exceptions

• L'AAH peut néanmoins être versée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois à l'étranger lorsque le bénéficiaire y poursuit des études, apprend une langue étrangère ou parfait sa formation professionnelle (selon l'article R. 512-1, 2° du Code de la sécurité sociale).
• La dérogation au principe de résidence est également valable en cas de placement dans un établissement social ou médico-social belge.
• Enfin, et c'est bon à savoir, il existe une autre exception liée à la santé. Selon une circulaire de la Cnaf (en lien ci-dessous, rubrique « résidence », page 22), « l'allocation peut être maintenue en cas d'hospitalisation à l'étranger mais seulement si la personne peut justifier d'un accord de prise en charge d'un organisme français de Sécurité sociale », capable d'opérer un contrôle médical (assorti d'une preuve de résidence en France avant son départ).

Ce qui n'était visiblement pas le cas de monsieur U ; il a en effet été pris en charge par une société d'assistance privée, son hospitalisation avec chirurgie aurait en réalité duré « seulement » huit jours, il a « prétendument », selon la Cour de cassation, été immobilisé durant 60 jours par les médecins thaïlandais et a ensuite prolongé son séjour presque un mois de plus, jusqu'au 24 juin, avant de revenir en France pour poursuivre ses soins. Bref, les juges ont estimé que sa situation ne répondait pas aux conditions fixées par la loi. La justice a statué contre le plaignant qui devra donc faire l'impasse sur son allocation...

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par Handicap.fr. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, sans accord. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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