3h05 du matin. Caroline est réveillée par du bruit dans le salon ; elle y découvre François en train de jouer à la Wii. Visiblement étonnée, elle lui demande ce qu'il fait debout si tard. Sa réponse fuse : « C'est depuis mon opération à la tête, je fais des insomnies ». Ce à quoi Caroline rétorque : « D'accord, mais vous pouvez mettre un casque… et un slip ! » C'est à ce genre de situations que Claudia et Caroline devront s'habituer le temps d'un week-end. L'appartement de leurs nouveaux voisins, Isabelle et François, ayant tous deux des lésions cérébrales, est inondé. Ils ont donc décidé de squatter chez ce couple lesbien. Au grand dam de Claudia, à la satisfaction de Caroline… pour un temps. S'enchaînent alors des scènes plus cocasses les unes des autres avec, en toile de fond, l'idée « de parler d'un handicap invisible que beaucoup ne connaissent pas tout en transgressant le politiquement correct », explique le réalisateur de Casse-Tête, Marc Jonas.
« Une maman m'a dit : "Ce n'est plus mon fils" »
Ce projet a émergé grâce à une rencontre bouleversante. « J'étais alors journaliste pour France 3 Alsace, confie le réalisateur. Un jour, j'ai été envoyé pour couvrir un évènement organisé par une association. C'est là que j'ai rencontré une dame, mère d'un cérébrolésé, qui disait de lui : "Ce n'est plus mon fils". Je me suis beaucoup interrogé sur notre vie, notre identité, qui peut basculer du jour au lendemain. Un accident de voiture, une chute, une branche qui nous tombe dessus… J'ai alors réalisé qu'il y avait matière à faire un documentaire. » En effet, l'idée de tourner une fiction n'est arrivée que plus tard. « Je recherchais des couples. Isabelle Stepp et François Dupuy faisaient partie de ceux que j'avais rencontrés. Isabelle m'a dit qu'elle verrait plutôt une fiction, qu'elle avait toujours rêvé de faire du cinéma. Nous nous sommes donc lancés pour faire un court-métrage sur leur vie. Sauf que la réalité rattrapait la fiction... »
Un tournage pas comme les autres
Finalement, la création d'une web-série humoristique apparait comme le meilleur compromis. Mais, sur le plateau, tout ne s'est pas passé sans mal. « J'ai eu plusieurs grosses frayeurs, confesse Marc. J'avais mis un point d'honneur à ce qu'Isabelle et François jouent leur propre rôle, alors j'ai adapté mon écriture afin qu'elle se rapproche de ce qu'ils vivent. Mais ce n'était pas toujours facile de gérer leur handicap. » Les trous de mémoire sont réels, la fatigue se fait sentir, les répétitions, qui durent deux mois, s'enchaînent… Même l'idée de les laisser improviser sur certains dialogues est vite abandonnée. « On avait la chance d'avoir une très belle équipe. Tout le monde jouait le jeu, et ce qui se passait hors caméra entre Isabelle, François et les autres acteurs était aussi important que les scènes elles-mêmes. »
Web-série ou série TV ?
Bilan : sept jours de tournage au total et six premiers épisodes prêts à être diffusés depuis le mois de mars 2015. Puis, brusque retournement de situation ! « Au départ, nous devions présenter ces épisodes dans le cadre d'un congrès puis les mettre en ligne sur internet mais la réunion a été reportée. Et afin de nous aider à financer les autres épisodes, nous nous sommes rapprochés d'une chaîne de télévision qui pourrait retransmettre la série. » Si rien n'est encore décidé, les discussions ciblent une diffusion deux samedis soirs consécutifs sous la forme d'un épisode de 25 minutes, suivie d'un débat avec les acteurs. En attendant la décision finale, la saison 2 de Casse-Tête est déjà en phase réflexion… Attention, spoilers ! Après ce week-end éprouvant, Isabelle et François retrouveront leur appartement et leur quotidien. Claudia va alors confier un travail à François. « Et, là encore, rien ne se passera comme prévu… », glisse le réalisateur. A suivre...