Cirque, clown, musique, conte, poésie, danse, mime, théâtre, spectacles pour enfants, marionnettes… Les 1 538 spectacles du festival Off d'Avignon investissent 133 lieux : théâtres, cours, écoles, chapelles, cafés, appartements et les rues de la ville. Il y en a pour tous les âges et tous les goûts. Dans cette abondance, le handicap est en bonne place. Morceaux choisis.
Des spectacles en chansigne
- La chanteuse Liz Cherhal présente son nouveau spectacle musical L'Alliance dont les compositions autour de « l'intime universel, la question des liens que l'on fait et que l'on défait, la famille, le couple ou encore la parentalité » sont toutes traduites en chansigne, version chorégraphiée de la langue des signes française (LSF), par un interprète présent sur scène. Il est pleinement intégré au spectacle où danse, musique et LSF se mêlent.
- La comédienne Emmanuelle Laborit, directrice d'IVT (International Visual Theatre) donnera une représentation exceptionnelle de son spectacle Dévaste-moi avec les formidables musiciens The Delano Orchestra, le 17 juillet. Elle y joue sur des chansons connues ou moins connues, toutes les facettes d'une vie de femme qui pleure, aime, danse, crie, jouit, vit, se dévoile. Époustouflant.
- Maud et Aurélien sont de retour à la Maison de la parole, dont la programmation met « l'accent sur l'oralité, la musique, l'écriture», pour tout le festival cette fois. Leur duo Après vous, chansons contresignées mêle chansons à texte accompagnées à la guitare, langue des signes et danse.
- Depuis le ventre de sa mère, Maryam vit de front les premières heures de la révolution iranienne. Six ans plus tard, elle rejoint avec sa mère, son père en exil à Paris. Marx et la Poupée, le récit de ces années, est proposé dans une lecture musicale bilingue français-LSF.
- Pour une initiation à la LSF dès 6 mois, le spectacle Je signe avec bébé, veut permettre de « mieux échanger et communiquer avec les tout-petits, de manière amusante, efficace et en chansons, grâce à des mots issus de la LSF. »
Ils parlent de leur vécu
- « Alors moi, je n'entends pas, et toi, tu n'écoutes pas ? » Dans le spectacle Ouïe à la vie de sa sœur Camille Combes, qu'il interprète avec elle, Nicolas, sourd de naissance implanté cochléaire, retrace son parcours, de l'enfance à l'âge adulte, du silence profond à la musique, rejoue les moments forts de sa vie et dessine ses émotions lorsque les mots ne suffisent plus. Une belle complicité. Accessible à tous avec surtitrage, LSF et LPC (langage parlé complété).
- Dans Maelström, Vera, 14 ans, sourde ayant des implants cochléaires, est « debout, immobile, au coin d'une rue à n'attendre personne. Elle dit la tempête qui a la forme de son cœur. Elle est murmure et réclusion, résistance et cri, grain de sable et tempête… »
- « 10 ans (avec la sclérose en plaques, c'est long... Alors pour mettre un peu de piment dans leur relation, elle a décidé de l'afficher sur scène. On peut rire de la sclérose en plaques ! Double A, elle, s'y emploie avec un malin plaisir. » Anne-Alexandrine nous entraîne dans son quotidien où se croisent le handicap, les hôpitaux, les organismes sociaux, les médecins, les infirmiers, les aidants, ses autres maladies. Double A : spectacle de MalAAde, entre humour et réalisme, à découvrir !
- Geoffrey Bugnot est seul en scène dans son fauteuil roulant électrique dans Geoffrey dérape ! rodé en 2017. Il revient à Avignon avec l'ambition que « vous n'en ressortirez pas handifférent. »
Trisomie, autisme ou Alzheimer…
- « Et puis, j'ai envie de vivre moi ! J'ai plein de projets, j'ai plein d'envies… Moi j'ai pas de problème ! » C'est la rencontre de deux jeunes trisomiques qui est à l'origine du spectacle Samuel. La comédienne Sandrine Gelin leur donne la parole ainsi qu'à une galerie de personnages aux réactions différentes. Sensible et juste.
- « J'ai trois ans, je ne parle pas, et vous n'entendrez aucun mot sortir de ma bouche. » Dans J'entrerai dans ton silence, Serge Barbuscia mêle les voix de Françoise Lefèvre, auteur du Petit Prince cannibale, témoignage sur son enfant différent, et de son fils, Hugo Horiot, artiste et autiste, auteur de L'Empereur, c'est moi.
- La maladie d'Alzheimer n'est pas oubliée avec André y Dorine qui doivent « se souvenir de comment ils aimaient pour continuer à aimer. » Dans Avant que j'oublie, rencontres dominicales entre une mère atteinte de la maladie d'Alzheimer et sa fille, on découvre leur amour et leur désamour, leur tentative de se réapprendre comme deux inconnues…
Des figures du handicap
- Deux spectacles évoquent la personnalité de Frida Kahlo, artiste peintre mexicaine : Frida Kahlo, Esquisse de ma vie qui met plus d'emphase sur le handicap de l'artiste, « icône de la persévérance et du courage » incarnée par Nadia Larbiouene. Dans Claudel Kahlo Woolf, Camille Claudel, Frida Kahlo et Virginia Woolf se croisent dans le même espace. Interpellées à vif, elles se confrontent, dévoilant leur l'intimité et leur dimension inconsciente.
- Camille Claudel est aussi à l'affiche de Melle Camille Claudel, où « elle est une artiste en pleine conscience de son art, une femme qui est sculpture, pas folle, seulement femme mal née, vivant hors cadres et codes de son époque ».
- La figure du psychiatre catalan François Tosquelles, « ce Don Psyquichotte qui révolutionna la psychiatrie asilaire du XXe siècle », est évoquée dans deux spectacles qui lui rendent hommage : La méningite des poireaux et L'enseignement de la folie, titre d'un de ses livres majeurs et pour qui « sans la reconnaissance de la valeur humaine de la folie, c'est l'homme même qui disparaît.» Indispensable.
- Vincent, la vraie histoire de Van Gogh retrace la vie du peintre, interprété par Leonard Nimoy, tandis que ses œuvres sont projetées au mur, en s'inspirant des écrits de Théo, son frère. Fort et émouvant.
- La belle Jacqueline Auriol voulut devenir pilote d'essai mais fut défigurée après un accident et subit 22 opérations. Pierrette Dupoyet raconte son impressionnant chemin de renaissance dans Jacqueline Auriol ou le ciel interrompu.
Et bien d'autres spectacles…
- Un coup de cœur, à découvrir ou revoir, le beau spectacle de marionnettes, pour petits et grands, Les yeux de Taqqi, l'histoire d'un petit Inuit aveugle qui « veut voir, veut savoir, veut pouvoir ».
- Soyez vous-même, de Côme de Bellescize, ou comment un entretien d'embauche, qui réunit la directrice aveugle d'une entreprise d'eau de javel et une jeune candidate enthousiaste, dégénère. « Entre grotesque, poésie, hystérie et questionnement philosophique, Soyez vous-même détourne les codes du huis clos et de la satire sociale pour dessiner une comédie acide et déjantée. »
- Altervision est « un spectacle qui présente la façon de percevoir le monde à la manière des aveugles avec la participation de comédiens non-voyants. » Les spectateurs les yeux bandés sur le plateau sont invités à utiliser leurs quatre autres sens.
- Les chaises, de Ionesco, interprété en persan par une troupe de comédiens en situation de handicap, surtitré en français.
Bien d'autres spectacles sont naturellement accessibles selon le handicap : Adieu Monsieur Haffmann pièce aux quatre Molières ; Le Maître et Marguerite adapté et mis en scène par Igor Mendjisky ; Zorba d'Éric Bouvron, un voyage en Crète ; Le cas Martin Piche qui souffre d'un ennui permanent et passionne un psychiatre ; Les Monstrueuses, quatre figures de femmes des années 20 à aujourd'hui ; Ce qui demeure, autour des souvenirs d'une femme de 93 ans ; Eugénie Grandet adapté par Camille de La Guillonnière « un formidable miroir de notre époque »…
L'information sur l'accessibilité du festival Off d'Avignon est moins précise que pour le festival d'Avignon (article en lien ci-dessous). Seul l'accès PMR est clairement indiqué, et il est possible de faire des recherches sur le site Internet avec ce critère (en lien ci-dessous). Quelques salles disposent d'une boucle magnétique, comme Le Théâtre du Chien qui fume.