Deux enfants indemnisés après la naissance de leur soeur trisomique
Par Hugues HONORE
REIMS, 7 oct 2005 (AFP) -
Corentin, 12 ans, et Tanguy, 7 ans, ont été reconnus victimes de l'erreur de diagnostic d'un gynécologue qui n'avait pas décelé au cours de la grossesse de leur mère la trisomie 21 de Catalina, née le 6 janvier 2001. Ils recevront 12.800 euros de la part du médecin.
Le jugement a été prononcé en juillet et l'avocat, Me Emmanuel Ludot, en a obtenu copie en septembre, mais l'information n'a été révélée que vendredi, au lendemain d'un jugement de la Cour européenne des droits de l'Homme dans une affaire proche.
L'avocat du médecin, Me Francis Fossier, a indiqué à l'AFP que son client n'avait pas fait appel, et que l'affaire était en cours de règlement. "Je trouve ce jugement tout à fait normal", a-t-il estimé.
Le tribunal relève dans son jugement, dont l'AFP a obtenu une copie, que "le temps consacré (par la mère à sa fille) l'est au détriment de ses deux frères" et qu'ils ont été "témoins de la souffrance de leurs deux parents".
"Enfin, ils sont victimes de la séparation de leurs parents" que le tribunal attribue "au moins en partie" à "l'épreuve subie" par la famille.
Les parents, divorcés, avaient également reçu, par jugement du même tribunal le 18 janvier, 15.000 euros chacun en réparation de leur préjudice.
Loi Kouchner contournée
L'avocat avait décidé de contourner la loi dite Kouchner du 4 mars 2002, qui dispose: "les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de ce handicap".
La Cour européenne des droits de l'Homme a épinglé jeudi la France pour l'indemnisation insuffisante de handicaps congénitaux non décelés avant la naissance, en raison de l'application rétroactive de la loi dite "anti-arrêt Perruche", de mars 2002.
La juridiction de Strasbourg a estimé qu'en appliquant la loi Kouchner, la France a privé les parents de Romain Draon, né en 1996, et de Caroline Maurice, née en 1997, d'indemnisations auxquelles ils pouvaient prétendre en vertu de la législation antérieure.
Après une amniocentèse, qui avait conclu dans les deux cas au développement normal du foetus, ces deux enfants étaient nés handicapés. Romain est né totalement invalide, avec de graves malformations cérébrales dues à une anomalie chromosomique, et Caroline est atteinte d'une maladie génétique (une amyotrophie spinale) passée inaperçue à cause de l'inversion des résultats d'analyses prénatales avec ceux d'un autre foetus.
Les indemnisations versées après une erreur de diagnostic prénatal ont suscité une polémique depuis l'arrêt dit "Perruche" du 17 novembre 2000. La Cour de cassation avait alors pour la première fois reconnu à un enfant, Nicolas Perruche, né en 1983, le droit d'être indemnisé pour le simple fait d'être né handicapé.
L'article 1 de la loi du 4 mars 2002 sur le droit des malades avait contrecarré cette jurisprudence en disposant que "nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance".
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