La représentation des personnes handicapées au cinéma : quels regards pour quels enjeux ?

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La représentation des personnes handicapées au cinéma : quels regards pour quels enjeux ? La présence des personnes handicapées à l'écran trouve sa source à la naissance même du cinéma. Art populaire, le cinéma balbutiant projette sur ses écrans les figures monstrueuses des êtres hors normes des cirques et des foires. L'objectif n'est pas de montrer l'humanité des personnes dissimulées dans des physiques atypiques mais bien de stimuler chez le spectateur les sentiments les plus violents, de la peur au dégoût. Le cinéma hollywoodien exploite encore aujourd'hui le paradoxe d'une âme pure dans un corps difforme, reprenant à son compte les grandes typologies de la littérature classique ou fantastique. L'humanité de tout homme se dévoile alors dans des destins terribles marqués par l'exclusion sociale, le rejet. Au cœur de cette production, le splendide film de Tod Browning, Freaks, est l'archétype d'un film dont la réflexion philosophique et poétique de l'image sur la question de l'autre n'empêche pas un discours social engagé. Il faudra plus de quarante ans pour que le film pour trouve son public et obtienne la reconnaissance qu'il mérite. A deux reprises déjà, le festival du court métrage Handica a donné l'occasion de voir des films réalisés par des amateurs, des établissements spécialisés et des professionnels de l'image. La question de la représentation du handicap est au centre de toutes ces réalisations. Si l'on tente une brève analyse de ce qui a été vu et primé, nous pouvons classer ces films en trois catégories qui ne recoupent pas nécessairement celles des modes de réalisations (amateurs, professionnels de la santé et du social, professionnels de l'image). Ces catégories témoignent de regards et d'enjeux différents : - la première catégorie regrouperait les films ayant pour vocation d'enregistrer le témoignage de la vie des personnes handicapées. Une vie qui reste, dans son quotidien le plus concret, largement méconnue du grand public. Le regard porté sur cette vie peut être poétique : il transcende alors les innombrables difficultés de la personne et de son entourage. La même poésie peut-être mise au service de la description de l'enfermement. Dans tous les cas, le propos est de dire l'indicible, de parvenir à donner, grâce à l'image, le sentiment non partageable d'une vie qui pèse lourdement sur les individus. - la seconde catégorie réunirait les films qui, entre témoignage et documentaire, tentent d'objectiver la place et la représentation des personnes handicapées. Le regard du réalisateur, engagé et proche, tente alors de s'éloigner de son sujet pour lui rendre une profondeur que le handicap absorbe.Et commencer à faire rendre gorge à l'injonction de l'exclusion de la différence qui travaille encore notre culture. - la dernière catégorie, la plus ambitieuse peut-être, assemblerait les films qui mêlent la dimension documentaire à celle de la fiction. Le défi est de taille ; en effet, il semble que la présence des personnes handicapées à l'écran crée un « effet de réel » qui interdit toute prise en compte fictionnelle du personnage et du sujet. Le handicap, comme un stigmate, se superpose à l'acteur et au personnage, occupe l'écran, et impose une parole de vérité, de sérieux et de drame dont peu de cinéastes parviennent à se dégager. Le regard est pris au piège d'une culture qui, d'Œdipe à Frankenstein, voit exclusivement le handicap comme signe tragique de la vie de l'homme. Se défaire de cet effet de réel est aujourd'hui l'enjeu d'un changement de regard à la fois social et culturel. Le prochain Festival du Court Metrage handica aura lui en juin 2007 à l'occasion du salon Handica Pascal Dreyer & Vincent Raymond Festival national Court métrage Handica Editions en 2003 et en 2005.
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