Intégration scolaire : où en sommes-nous ?
La rentrée scolaire est déjà loin. Souvenez-vous des annonces répétées des médias et des débats autour de l'intégration ! C'est que cette année il y avait une grande nouveauté dans nos habitudes. ...
Nous qui restions sur la touche avec nos enfants à la maison les années précédentes, voilà que nous pouvions les inscrire dans les écoles de quartier !
Un petit rappel : la loi du 11 février 2005 affirme le droit à l'éducation pour tous les enfants handicapés.
Telle que la voilà énoncée, cette loi a trop souvent été rapportée par les journalistes d'une façon tronquée et à l'emporte- pièce. Savent- ils qu'à travers l'intégration des enfants ils s'adressent la plupart du temps à de jeunes parents ? A l'âge de la maternelle et de l'école primaire, ces parents sont encore souvent en pleine démarche de l'acceptation du handicap et leur ouvrir la porte de l'intégration à tout va, peut être un leurre pour certains d'entre eux.
L'intégration est une chance pour nos enfants. Mais n'oublions pas de dire que cette intégration est liée à un projet pédagogique personnalisé qui ne s'appliquera pas forcément à tous.
Certains auront besoin d'un accompagnement que seuls des établissements ou des services spécialisés vont pouvoir leur donner.
Parlons donc d'intégration avec précaution ! Le discours du Président de l'UNAPEI lors du congrès de juin, a appuyé avec insistance sur le danger que représentait la scolarisation proposée à tous les parents.
Voici un extrait du discours du Président Devoldère :
" Nous savons combien la venue d'un enfant différent dans le noyau familial est pour tout parent une souffrance, faire le deuil de l'enfant parfait que l'on avait rêvé demande du temps. Il ne faudrait pas que l'inscription de cet enfant à l'école de son quartier crée l'illusion de la normalité et prolonge le déni du handicap, parfois rencontré chez des parents de jeunes enfants. Cela serait préjudiciable à l'enfant à qui l'on ne donnerait pas l'accompagnement précoce indispensable à son évolution future. Tout en reconnaissant l'intérêt de l'intégration scolaire, ne tombons pas d'un extrême à l'autre... ".
En proposant l'intégration à tous les enfants, l'Etat s'engage à fournir tous les moyens susceptibles d'aider leur scolarisation. Qu'en est-il de la formation des professeurs des écoles dans les IUFM (instituts de formation des maîtres), de celle des AVS (aide à la vie scolaire) et du nombre de création des postes concernés ?
Parler de scolarisation sans que des mesures appropriées soient mises en place par l'éducation nationale relèverait de la tromperie.
En ce début d'année, j'aimerais savoir comment se sont vraiment déroulées toutes les inscriptions d'enfants handicapés dans les écoles de nos quartiers et ce qu'il est advenu des mises en place des projets pédagogiques.
La première vie de groupe de mon fils autiste fut celle du Jardin Thérapeutique de Saint Egrève, à côté de Grenoble. Il avait alors trois ans. A la demande insistante de l'équipe soignante, il a fait de toutes petites intégrations dans les maternelles de notre quartier. Ses frères étaient " passés " par là et il était bien connu de tout le monde, ce qui a aussi son importance pour une bonne intégration !
Je ne voyais pas vraiment l'intérêt d'une telle scolarisation car à l'époque, il avait des troubles du comportement très envahissants....pour tout le monde !! Son " truc " était de jeter tout ce qu'il avait sous la main, à partir du matin où il se réveillait jusqu'au soir où il se couchait, et même pas une chaise ne restait debout là où il passait. Attila quoi!! Il était aussi à l'époque facilement angoissé par des situations imprévues et pouvait alors s'automutiler.
C'est donc soulagés et sans regret pour nous, parents, que notre fils a pris le chemin du milieu spécialisé dès ses six ans.
Il y a trouvé des éducateurs formés au handicap, des instituteurs spécialisés performants, un personnel soignant à l'écoute, un rythme d'occupations qui lui convient pleinement. Il ne sait ni lire ni écrire, ne sait pas faire de bonshommes têtards mais il n'a plus de gros troubles du comportement. Il est bien " dans ses baskets ", très facétieux, aimant sortir avec ses frangins. Il ne parle pas comme un avocat mais dit de plus en plus de mots et sait se faire comprendre.
On ne peut jamais savoir vraiment, à l'annonce du handicap, quel potentiel ont nos enfants et quel progrès ils vont pouvoir faire ; heureusement car tout semblerait figé. Cependant je suis certaine que sans le soutien des équipes de l'IME mon fils n'en serait pas là.
Il serait dommage que des parents persistent dans leur demande d'intégration pour des enfants qui tireraient plus de profit à être suivi en IME ou à être accompagnés par des services spécialisés. Le retour vers des solutions plus institutionnelles est un virage difficile à prendre pour les enfants comme pour les parents.
J'ai fait un rêve, celui où l'IME ferait portes ouvertes aux enfants des écoles avoisinantes, une intégration à l'envers ! Pourquoi lorsqu'on parle d'intégration toujours aller dans le même sens, du monde spécialisé au monde ordinaire ?
L'IME, pour la plupart des parents de l'extérieur, c'est l'inconnu, un univers sombre, un ghetto. En l'ouvrant sur les écoles et les écoles sur les IME, chacun pourrait s'enrichir des savoir faire de l'autre. Une méga-CLIS, avec tout le plateau technique fourni par le médico-social. Enseignants, éducateurs et soignants pourraient travailler en équipe et les enfants tirer un maximum de bénéfices.
Il y règnerait un brassage de toutes les différences. De là à rêver qu'alors l'intégration dans la cité s'affirmerait de plus en plus, il n'y a qu'un pas à franchir.