Handicap.fr : Même si les personnes handicapées sont passées plutôt inaperçues dans cette campagne, les associations n'ont pas ménagé leurs efforts pour faire entendre leur voix. La FNATH est, elle aussi, montée au créneau...
Arnaud de Broca : Depuis le début de la campagne électorale, la FNATH se mobilise en effet pour une participation pleine et entière des personnes handicapées à cette étape importante de la vie citoyenne. Nous n'avons donc cessé de rappeler les dispositions légales en ce qui concerne l'accessibilité des bureaux de vote. D'autres associations se sont impliquées. Chacun avec ses propres revendications car nous nous adressons à des publics différents.
H.fr : A quoi ressemble un bureau de vote accessible ?
ADB : Il ne s'agit pas uniquement de prévoir l'accessibilité à l'intérieur de la salle, mais aussi son environnement (transports à proximité, chaîne de déplacement, places de stationnement...). Il ne faut pas non plus réduire le handicap au seul problème de mobilité ; tous les types de handicap sont concernés, ce qui suppose l'installation d'une rampe, de signalisation adaptée, de contraste visuel et tactile, d'un éclairage suffisant, d'une bonne lisibilité des bulletins de vote et pourquoi pas d'étiquettes en braille... Au moins un isoloir et les urnes doivent être accessibles aux personnes en fauteuil roulant.
H.fr : On entre en principe seul dans l'isoloir ? Qu'en-est-il pour les électeurs qui ont besoin d'être accompagnés ?
ADB : Le vote est en effet un acte individuel, chacun doit en principe pouvoir voter seul. Toutefois, les personnes handicapées peuvent être accompagnées par un électeur de leur choix, qui n'est pas obligatoirement du même bureau de vote, ni de la même commune. Il peut entrer dans l'isoloir et introduire l'enveloppe dans l'urne. Si la personne handicapée n'est pas en mesure de signer la liste d'émargement, l'accompagnant peut le faire à sa place avec la mention manuscrite : « L'électeur ne peut signer lui-même ».
H.fr : Vous avez diffusé une brochure pour rappeler à tous l'obligation d'accessibilité des bureaux de vote ?
ADB : Grâce à l'association Civisme et Démocratie (CIDEM) et celle des Maires de France, avec le soutien financier de la Fondation de France, nous avons pu accéder au fichier de toutes les communes de France, à qui nous avons envoyé, en janvier, notre brochure en format numérique. 15 000 exemplaires en version papier ont également été diffusés. Cette brochure s'intitule « Des élections sans entraves pour les personnes handicapées ». Elle a pour cible à la fois les partis politiques, les organisateurs de scrutin et les personnes handicapées. Elle est téléchargeable sur www.fnath.org et www.cidem.org.
H.fr : La simplification des procurations est-elle un bénéfice pour les électeurs handicapés ?
ADB : Certainement ! Une personne nous a d'ailleurs confié qu'elle avait préféré faire une procuration car elle était convaincue qu'elle ne pourrait jamais arriver jusqu'à l'urne ! Ce n'est d'ailleurs pas la seule. Il serait important que les mairies avertissent les personnes concernées que tous les bureaux de vote sont désormais accessibles, une condition imposée par la loi. Pour revenir à votre question, dans l'absolu, plutôt que de généraliser le principe de procuration, mieux vaut faciliter l'accessibilité des bureaux de vote.
H.fr : Est-il encore aujourd'hui nécessaire de rappeler les responsables de bureaux de vote à l'ordre ?
ADB : C'est toute l'ambition de notre brochure. Ils ont une telle liste de réglementations à appliquer que le cas particulier du handicap passe parfois à la trappe. D'où l'intérêt d'une petite piqure de rappel ! Dans l'un d'entre eux, par exemple, l'isoloir accessible avait pour seule modification un logo agrafé sur le rideau, mais la tablette était toujours à la même hauteur ! Et le rideau était si court que l'on voyait l'électeur assis dans son fauteuil !
H.fr : Une adresse mail dédiée a été mise en place par la FNATH pour recevoir les témoignages et doléances ?
ADB : En effet, les citoyens handicapés confrontés à des difficultés d'accès aux bureaux de vote peuvent nous y interpeler. Nous avons reçu près de 300 témoignages.
H.fr : Certains n'ont pas pu voter ?
ADB : Non, aucun message ne va dans ce sens. Disons que, pour certains, ça a été compliqué : difficulté pour accéder au bureau de vote par les transports, pour se garer... Un internaute nous a confié que son bureau était si mal agencé qu'il ne pouvait pas se déplacer avec son fauteuil-roulant ; mais les responsables en ont tenu compte entre les deux tours et tout s'est arrangé.
H.fr : Peut-on estimer la part des personnes handicapées inscrites sur les listes électorales ? Sont-elles moins nombreuses proportionnellement que les électeurs valides ?
ADB : Non, il n'existe aucun chiffre ! Mais une chose est certaine, pour participer à la vie de la cité et exprimer leur choix politique de manière éclairée, les personnes handicapées doivent être informées. Ce qui est loin d'être le cas. Certaines ont tenté de lire les programmes des candidats en cliquant sur des sites internet peu accessibles. Il y a des tas d'électeurs qui n'ont pas pu suivre la campagne, par exemple les personnes handicapées mentales, car aucun parti n'a pris la peine de proposer des programmes simplifiés. Idem pour les personnes sourdes : pas une émission traduite en langue des signes ! Se sentir exclu du débat, c'est peut-être un bon motif pour renoncer à faire son devoir civique !
H.fr : Mais, globalement, c'est tout de même mieux qu'il y a cinq ans ?
ADB : Oui, c'est ce qui ressort de la plupart des témoignages. Même si le handicap n'a pas fait la Une du 20h, il est indéniable que cette question a été plus souvent abordée qu'auparavant, notamment dans la presse locale. Cela a certainement permis une plus grande participation des personnes handicapées au scrutin.
Mail élections : elections@fnath.org
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