Publication, fin avril 2013, d'un « Baromètre du gouvernement ». Un an après l'élection de François Hollande, l'idée est inédite : classer les ministères en fonction de leur implication dans la lutte contre les discriminations, et notamment celles liées au handicap. On doit cette initiative à République & Diversité, soutenu, entre autres, par l'APF (Association des paralysés de France). Quatre critères de discriminations sont évalués : le genre, le handicap, l'origine et l'orientation sexuelle. Chaque critère donne lieu à un baromètre spécifique, et les quatre baromètres réalisés sont ensuite agrégés dans un baromètre général. L'objectif de cette opération est de constituer une véritable Agence de notation citoyenne permettant de contribuer activement à la vie démocratique dans notre pays et de renforcer la lutte pour l'égalité.
Chacune des quatre associations impliquées dans cette initiative a interrogé les ministères concernés sur la base des propositions qui avaient été réunies dans le Pacte pour l'égalité et la diversité, publié en février 2012 (Éditions Autrement). Une note sur 20 est attribuée qui permet d'évaluer le delta entre promesses et réalité (les mesures annoncées et réellement mises en œuvre). Sur ce total, deux points sont consacrés à la qualité des liens avec le monde associatif (nombre de rendez-vous, qualité de l'écoute, réactivité...). Pour la partie concernant les questions de handicap, l'APF a choisi un jury composé de militants et d'experts techniques. Voici le classement...
1er. Ministère de l'Education nationale (Vincent Peillon) : 14/20
Le ministère a pris en compte la circulaire du 4 septembre 2012, relative à la prise en compte du handicap dans le projet de loi, pour la refondation de l'école mais pas de façon pleinement satisfaisante. La situation de la scolarisation des enfants et des jeunes en situation de handicap, ainsi que l'accompagnement des enseignants, se sont améliorés mais restent insuffisants. Le ministère agit de manière responsable en matière d'accessibilité, comme dans les locaux administratifs. On peut seulement regretter que, depuis 2008, il soit exonéré de la contribution au FIPHFP (Fonds pour l'insertion des personnes handicapées de la fonction publique). Le gouvernement n'a pas remis en cause cette disposition injuste.
2ème. Premier ministre (Jean-Marc Ayrault) : 12/20
Le premier ministre a signé le 4 septembre 2012 une circulaire invitant tous les ministères à prendre en compte les questions spécifiques aux situations de handicap dans les projets de loi. Cette mesure répond à la demande des associations pour une politique transversale. Le suivi effectif de son application reste à faire. Il a, par ailleurs, confié une mission à une sénatrice pour élaborer un plan d'actions pour réussir l'échéance 2015 en matière d'accessibilité. Enfin, il réunit pour la première fois depuis 4 ans le comité interministériel du handicap en juin 2013.
3ème. Ministère des droits des femmes (Najat Vallaud-Belkacem) : 8/20
Le ministère témoigne d'un réel intérêt sur la question du handicap. Elle est favorable à la prise en compte de la question spécifique des violences faites aux femmes en situation de handicap, de leur accès à la santé sexuelle, mais aussi à l'organisation d'un débat autour de la création de services faisant appel à des « assistants sexuels ». Néanmoins, on peut lui reprocher l'absence de prise en compte de l'accessibilité au sein de ses locaux.
4ème. Ministère chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion (Marie-Arlette Carlotti) : 8/20
• Le ministère n'a pas pris les mesures essentielles dont il a la responsabilité : le revenu d'existence, le financement intégral des moyens de compensation des conséquences du handicap (sauf pour la majoration tierce personne).
• Il a tenté de faire modifier le statut des MDPH contre l'avis des associations dans le cadre de la réforme sur la décentralisation.
• Le projet de transfert des Etablissements et service d'aide de travail (ESAT) aux conseils généraux dans le cadre de la réforme de la décentralisation soulève encore de nombreuses réserves de la part des associations.
• Droits pour les familles qui apportent une aide régulière à proche handicapé : un droit spécifique pour le congé parental a été amélioré.
• Mise en place d'un programme « soutien aux aidants familiaux et proches » pour permettre à chaque aidant familial ou proche de bénéficier d'une « dotation financière » et/ou de services en nature, qu'il pourra utiliser sous différentes formes, et établis selon ses besoins et ceux de la personne en situation de handicap : le ministère n'a pas arrêté de politique spécifique, même s'il a une attention particulière.
• La ministre a non seulement renvoyé le débat à 2014, mais, de plus, s'oppose au fait de permettre aux personnes en situation de handicap d'exprimer leurs aspirations, d'exercer leur droit à une vie affective, sentimentale et sexuelle.
• Evolution de la règlementation pour créer des services d'accompagnement sexuel faisant appel à des assistants sexuels formés pour les personnes ayant des difficultés dans ce domaine et organiser le débat public sur ce sujet avec tous les acteurs concernés : aucune mesure.
• La ministre a pris en compte l'enjeu de l'accessibilité et de l'échéance 2015.
• Mise en place d'un groupe de travail sur le vieillissement des personnes handicapées.
• La méthode de consultation/concertation est satisfaisante, tout en regrettant le nombre limité de rencontres avec la ministre.
5ème ex-aequo. Ministère chargé des affaires européennes (Thierry Repentin) : 7/20
Réelles connaissances des problématiques liées au handicap et bonne prise en compte de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées et aux politiques européennes.
5ème ex-aequo. Ministère chargé des personnes âgées et de l'autonomie (Michèle Delaunay) : 7/20
Prise en compte de la circulaire du 4 septembre 2012 satisfaisante. Attention à la question du vieillissement des personnes handicapées (création d'un groupe de travail sur le sujet). Mais regret que le sujet handicap ne soit pas traité avec le vieillissement dans une approche plus globale sur l'autonomie. Aucune mesure d'accessibilité (qui concerne aussi les personnes âgées).
D'autres ministères directement concernés par les situations de handicap ne figurent pas dans ce classement car leur note est comprise entre 0 et 2 !
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