Fin du suspense. Le rapport annuel d'activité 2020 du Défenseur des droits (DDD) est tombé le 18 mars 2021 (en lien ci-dessous)... Pour la quatrième année consécutive, le handicap reste le principal motif de discrimination et totalise 21,2 % des saisines, loin devant l'origine (13,3 %), l'état de santé (11,3 %). Principaux domaines « défaillants » ? L'emploi (dans le privé et le public), l'éducation et la formation, l'accès aux biens et aux services ou encore le logement.
Saisines en hausse de 20 %
Depuis 2014, les réclamations portant sur la lutte contre les discriminations ont connu un boom de 20 %, de même que celles sur les services publics (+78 %) et la déontologie de la sécurité (+210 %). La mise en place en février 2021 d'un nouveau service de signalement et d'accompagnement, alliant la plateforme antidiscriminations.fr et le numéro de téléphone 39 28, résulte de ce constat (article en lien ci-dessous). Au total, en 2020, l'institution a reçu 96 894 réclamations et 69 705 appels, soit une hausse globale des sollicitations de 10 % par rapport à 2019, liée notamment à la crise sanitaire. Selon Claire Hédon, qui a pris les rênes de l'institution en juillet 2020, elle a « incontestablement fragilisé l'accès aux droits », a fortiori pour les personnes âgées, dépendantes, en situation de précarité ou de handicap.
La crise, facteur aggravant d'inégalités
« Précarité, isolement, mal-logement, décrochage scolaire, répercussions sur la santé mentale, notamment des jeunes... » Cette pandémie aggrave, encore un peu plus, les inégalités. Le DDD déplore notamment le refus de paiement en espèces dans certains commerces, au début de l'épidémie, privant certaines personnes bénéficiant d'une mesure de protection judiciaire (régime de tutelle ou curatelle) dépourvues de carte bancaire de faire leurs courses. Face à ce « sombre tableau », Claire Hédon mise sur la capacité de son institution à appréhender en temps réel les risques d'atteintes aux droits et libertés, à commencer par la reconduction de l'état d'urgence sanitaire. « En toutes circonstances, le respect des libertés doit demeurer la règle, et les restrictions l'exception », martèle le rapport.
Protéger les enfants !
« La période de confinement a également fait craindre la multiplication des violences à l'égard ou en présence des enfants au domicile familial », souligne le rapport. En 2020, l'institution fait état de 2 758 réclamations concernant les droits de l'enfant, soit une hausse de plus de 10 % depuis 2014. Dans un communiqué du 20 mars 2020, le Défenseur des droits et la Défenseure des enfants en ont appelé à la « responsabilité collective » et incité à signaler aux numéros d'urgence, tels que le 119 (joignable 7j/7, 24h/24), toute situation préoccupante. Le DDD a, par ailleurs, été alerté à plusieurs reprises depuis 2018 sur la situation d'enfants, pour certains âgés de 13 ou 14 ans, qui séjournent en service de psychiatrie adulte. « Cette réalité, qui peut parfois conduire à des évènements dramatiques, tient généralement à l'insuffisance de structures d'accueil adaptées (ndlr : aux plus jeunes) ainsi qu'à l'absence de détermination légale d'un âge seuil dans les textes », pointe le rapport. Le DDD demandait donc d'inscrire dans la loi l'interdiction d'accueillir des mineurs dans ce type de structures. Elle exhortait également à renforcer et structurer l'offre de soins en pédopsychiatrie sur l'ensemble du territoire, certains départements en étant totalement dépourvus.
Des recours trop peu nombreux
Le rapport pointe également d'autres ruptures de droits : la fermeture des bureaux de poste, la « dématérialisation à marche forcée des services de l'Etat », les restrictions imposées aux familles et proches des résidents en Etablissement d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes (Ehpad), le manque d'accessibilité des attestations de déplacements ou encore du 114, numéro national d'urgence réservé aux personnes déficientes auditives... « Force est de constater que les recours restent trop peu nombreux par rapport à l'ampleur des phénomènes de discriminations en raison d'un certain découragement, de difficultés à établir les faits, lenteurs des procédures, faiblesse des sanctions... », déplore George Paul-Langevin, adjointe en charge de la lutte contre les discriminations. Face à ce constat, l'institution se dit bien décidée à renforcer sa « capacité à susciter des prises de consciences individuelles et collectives, des réactions et des recours, des réponses permettant de rétablir les victimes dans leurs droits ».