* Groupe polyhandicap France
« Un vrai bonheur pour ces personnes qui sont un peu moins oubliées que d'habitude », se réjouit Marie-Christine Tézenas, nouvelle présidente du Groupe polyhandicap France (GPF). La Haute autorité de santé (HAS) publie ses recommandations sur l'accompagnement de la personne polyhandicapée, c'est-à-dire présentant une déficience intellectuelle sévère et précoce associée à une déficience motrice, réaffirmant qu'elles nécessitent un accompagnement spécifique. En France, entre 5 et 8 personnes sur 10 000 sont concernées, soit 9 300 enfants et 23 000 adultes (chiffres 2014). « Nous allons certainement bousculer les pratiques, annonce Christiane Jean-Bart, cheffe du service Recommandations de la HAS, mais d'un point de vue extrêmement positif. »
Une approche positive en 6 volets
Conçues pour couvrir l'ensemble du parcours de vie, ces recommandations répondent à deux ambitions : favoriser la qualité de vie et le bien-être de la personne polyhandicapée et accompagner les professionnels et les familles. « Un gros travail fondé à la fois sur la littérature scientifique et les expériences de terrain », poursuit Marie-Christine Tézenas. La HAS espère plus globalement « changer de regard et centrer l'accompagnement sur le développement des compétences plutôt que sur la limitation des déficiences ». « C'est une grande première ! », se félicite madame Tézenas. Cette approche positive est détaillée en six documents thématiques : la citoyenneté, les évaluations fonctionnelles, la santé, le quotidien, les transitions et la fin de vie, les professionnels et les proches.
Quelles priorités ?
La personne polyhandicapée doit être considérée comme actrice et citoyenne, ce qui « implique de rechercher et prendre en compte sa capacité à s'exprimer, à décider et à agir », explique la HAS, via, notamment, l'utilisation de moyens de communication adaptés et en encourageant les contacts avec ses pairs. « L'idée, c'est de montrer que ces personnes très dépendantes ont toutes un potentiel à partir du moment où elles bénéficient d'un accompagnement personnalisé », poursuit Marie-Christine Tézenas. L'objectif est donc d'identifier les habiletés existantes sur lesquelles s'appuyer pour mettre en œuvre, de façon précoce, des stimulations et des apprentissages tout au long de la vie. « Elles sont capables de nous surprendre et de s'épanouir vraiment », ajoute-t-elle.
Selon la HAS, priorité doit aussi être donnée à la santé via un suivi médical régulier afin de prévenir les troubles associés, en apportant une vigilance particulière à la douleur. L'instance souhaite par ailleurs encourager l'accès aux loisirs ou encore les aménagements du cadre de vie pour que la personne polyhandicapée puisse « mieux comprendre le monde qui l'entoure et y participer de façon active ». Selon Marie-Christine Tézenas, « tous les outils innovants sont bons pour encourager leur autonomie, y compris psychique qui leur permet de s'attacher aux uns et aux autres et de communiquer ».
Ça bouge !
Il appartient donc aux professionnels, services à domicile et établissements médico-sociaux de mettre des équipements et leur savoir-faire à disposition des acteurs du territoire et des familles, encourageant par ailleurs à tenir compte de l'expertise de ces dernières. « C'est un outil extrêmement clair, pragmatique dont tout le monde va pouvoir se saisir et qui va permettre de mettre les savoirs en commun et de créer un partenariat entre les acteurs », se félicite la présidente de GPF. Une nouvelle étape est donc franchie après le Volet polyhandicap de 2016 et la parution, en mai 2020, du Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) dédié aux professionnels du soin, même si Marie-Christine Tézenas reconnaît que « ça ne va pas assez vite car il y a tellement à faire pour ces personnes si spécifiques ». Elle regrette que les établissements soient encore « sous dotés en moyens et en professionnels », à cause d'une « pénurie chronique » de candidats.
Le Ségur de la santé risque de ne rien arranger puisque le gouvernement a promis une revalorisation des salaires de 183 euros par mois qui ne concerne que les établissements médico-sociaux pour personnes âgées dépendantes. « On a déjà observé des transferts d'infirmières ou d'aide médico-psychologique (AMP) vers ce secteur, déplore Marie-Christine Tézenas, et, dans cette époque compliquée, on se retrouve avec encore moins de personnes formées. » C'est pourquoi la reconnaissance de la HAS, « à la fois des personnes polyhandicapées et de ceux qui les accompagnent est un cadeau du ciel » qui, elle l'espère, « va impacter aussi leurs formations et leur permettre de réfléchir sur leurs pratiques ».
Les rendez-vous du polyhandicap
Ces recommandations feront prochainement l'objet d'un webinaire (date à définir) afin de les faire connaître et de permettre un échange interactif avec les acteurs de terrain. En attendant, le 5 novembre 2020 (de 9 à 12h puis de 14 à 16h), en remplacement du colloque annuel GPF qui se tient d'ordinaire en juin à l'Unesco, un format plus léger adapté à ces temps de pandémie propose une visioconférence sur le thème de l'innovation dans le champ du polyhandicap : télémédecine, moyens de communication, bonnes pratiques… Objectif : aider les professionnels et les familles en ces temps difficiles. L'inscription, payante, est cependant gratuite pour les familles membres de GPF (au 09 53 66 97 39 ou gpf.secretariat@free.fr ).